Manifestation des agriculteurs: les convois de tracteurs quittent Bruxelles après une journée sous haute tension
Une nouvelle manifestation d’agriculteurs se tenait ce mardi à Bruxelles, la troisième depuis le début de l’année. Les esprits se sont échauffés l’après-midi, entre agriculteurs, policiers et journalistes.
Les 250 tracteurs présents à Bruxelles quittaient la rue de la Loi et la place du Luxembourg vers 17h30, annoncent mardi après-midi la zone de police Bruxelles Capitale/Ixelles et l’administration régionale Bruxelles Mobilité. Des perturbations sont à prévoir sur les axes sortants de la ville en cette fin de journée.
Des centaines d’agriculteurs étaient présents mardi sur la rue de la Loi et dans le quartier européen dans le cadre d’une troisième manifestation en moins de deux mois.
Ceux-ci dénonçaient des propositions européennes insuffisantes, notamment concernant les accords de libre-échange et les prix du marché.
Les premiers convois de tracteurs ont quitté la capitale à partir de 15h45, ont indiqué la police et Bruxelles Mobilité. Ils suivaient notamment le boulevard de la Woluwe (R22) vers Zaventem, la petite ceinture de Bruxelles vers Midi et l’avenue de Tervueren (N3) vers les Quatre Bras.
Des perturbations étaient constatées sur ces axes et aux alentours, ainsi que sur le ring de Bruxelles et l’E40 vers Louvain. La rue de la Loi, la place du Luxembourg, la chaussée d’Etterbeek et l’avenue d’Auderghem restaient fermées à la circulation, tout comme les tunnels Tervuren, Cinquantenaire, Loi et Reyers en direction du centre.
Du côté des transports en commun, la Stib indique que les stations de métro Maelbeek et Schuman sont rouvertes depuis 17h30.
Un journaliste blessé
Les confrontations entre les agriculteurs et la police ont été intenses, mardi midi, aux abords de la rue de la Loi et du rond-point Schuman. Ces affrontements ont mené à des tensions au sein même de la manifestation, entre des participants et des journalistes, pris à partie avec des jets d’œufs et de pétards à leur encontre. L’un d’eux a même été frappé.
De nombreux agriculteurs n’ont pas caché leur inquiétude quant à la présence nombreuse de journalistes, photographes et cameramen durant la manifestation. Selon eux, un policier en civil s’est fait passer pour un journaliste ou photographe. Dès les premières heures de la protestation, des manifestants tentaient de masquer les caméras et des membres de la presse ont été bombardés d’œufs, de feux d’artifice et de pétards.
Un journaliste qui voulait photographier les agriculteurs a par ailleurs été frappé au visage durant la manifestation. Aucune interpellation n’a toutefois eu lieu, les policiers restant en retrait et utilisant principalement des canons à eau et des lacrymogènes pour garder les manifestants à distance et calmer les esprits.
Certains manifestants semblaient par ailleurs craindre d’être poursuivis par la suite sur base de vidéos. Lundi, le parquet de Bruxelles a en effet annoncé que trois agriculteurs soupçonnés d’avoir commis des actes de violence contre la police lors d’une précédente manifestation à Bruxelles, fin février, ont été identifiés grâce à des images vidéos. L’un d’eux a déjà été auditionné par la police puis relaxé. Les deux autres seront prochainement convoqués pour être entendus.
«On attend que l’Europe revienne en arrière»
« Notre revendication principale est que l’établissement des prix agricoles soit plus juste. Et cette base se fait au niveau mondial, c’est l’Union européenne qui peut faire pression », explique Hugues Falys, porte-parole de la Fugea. « Nous attendons que l’Europe revienne en arrière sur sa politique ultra-libérale. Les décisions récentes sur les réglementations environnementales ne sont absolument pas les réponses attendues », ajoute-t-il. « Les prix agricoles ne devraient pas tomber sous les coûts de production », surenchérit Leonardo van den Berg, agriculteur néerlandais et représentant de l’ECVC. « Les prix actuels mettent la pression sur des exploitations qui ne peuvent plus suivre ».
Les fédérations européennes présentes à Bruxelles souhaitent que l’UE régule les marchés via la PAC afin d’assurer des prix plus équitables pour les agriculteurs. « L’enjeu, ce sont vraiment les prix agricoles, totalement libéralisés, et qui nous mettent en concurrence avec des pays qui n’ont pas du tout les mêmes normes, les mêmes coûts et conditions de production… », appuie le représentant de la Fugea.
« Il faut protéger les agriculteurs de la spéculation qui mine actuellement le marché », ajoute M. Van den Berg. Les accords de libre-échange, notamment celui du Mercosur, toujours en négociation, sont également remis en cause. « Ceux-ci nous forcent à être en concurrence avec des pays qui n’ont pas les mêmes conditions et normes que nous », estime M. Falys. « Nous ne sommes pas contre les accords internationaux en soi. Il faut toutefois qu’il y ait des conditions et des normes claires, semblables à ce qui est en place en Europe », confie son homologue néerlandais.
« L’UE doit surtout mettre une plus grande emphase sur la production et la consommation locales ». Les manifestants appellent enfin à une réduction de la charge administrative et une meilleure répartition des subsides de la PAC, notamment pour favoriser la transition. La Fugea se dit par ailleurs confiante des discussions en cours avec les autorités régionales et fédérales, notamment autour de la réduction de la charge administrative. « Ils ont compris qu’il y avait un problème. Nous sommes confiants que des solutions seront trouvées », espère M. Falys.