Les slogans féministes ont évolué avec la lutte. Mais certains traversent les âges, s’avérant toujours d’une cruelle actualité, 40 ans après.
Un slogan est bien plus qu’une phrase. Il relève du symbole. «Dans le mouvement féministe, précise Aurélie Aromatario, chercheuse en sociologie du genre à l’ULB, les slogans sont le reflet d’un travail militant, du cadrage de l’action collective.» Le mouvement féministe n’ayant jamais connu de véritable mobilisation de masse, il a dû se faire remarquer par le biais, entre autres, de formules interpellantes. Pour Béatrice Fraenkel, anthropologue française et coautrice de 40 ans de slogans féministes. 1970-2010 (éd. iXe, 2011), « l’humour y est très courant, un tas de messages sont provocateurs ». Ainsi, un slogan d’époque, « Crie plus fort, les voisins sont sourds », dénonçait cyniquement les violences conjugales. Aujourd’hui encore, ton mordant et jeux de mots piquants demeurent : au « Ras le viol » des années 1980 répondent les « La cup est pleine » et « Patriarcrame » de 2023…
Il y a quarante ans, les revendications portaient sur le droit de disposer de son corps ou de crèches gratuites et dénonçaient déjà les violences. Certains thèmes sont, hélas, toujours d’actualité: « Les slogans sur le corps, les droits politiques et sexuels. Les thèmes les plus récurrents touchent aux violences sexistes et sexuelles », précise Valérie Piette, professeure d’histoire contemporaine à l’ULB. Car la lutte féministe colle par principe à l’actualité. Ainsi, les slogans féministes défendant le droit à l’avortement, un des grands combats des années 1980, sont revenus battre le pavé à chaque fois qu’il a été mis en péril. Du haut de ses cinquante ans, « Un homme sur deux est une femme », est toujours utilisé lorsqu’il est question de parité. Seules certaines méthodes, comme les collages, et certains termes, comme féminicide, sont plus récents.