Plus d’un demi-million de Belges ont choisi de s’expatrier: les raisons d’une tendance en hausse, entre fiscalité et météo
L’essentiel
• Environ 535 000 Belges ont choisi de s’expatrier, principalement pour des raisons professionnelles.
• Les destinations les plus populaires sont la France, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l’Espagne et l’Allemagne.
• Les ingénieurs, le personnel soignant et les professionnels de la technologie sont les plus susceptibles de travailler à l’étranger.
• Outre les motivations financières, de nombreux Belges sont attirés par des conditions de vie plus agréables et une météo plus clémente.
• Pour réussir une expatriation professionnelle, cinq conseils sont primordiaux.
Environ 535.000 Belges ont élu domicile à l’étranger, dont une majorité pour des raisons professionnelles. Ingénieurs, personnel soignant, pilotes… la majorité des secteurs sont concernés. Les motivations, elles, peuvent être diverses. Mais où s’expatrier pour mieux gagner sa vie?
Pour certains, c’était un rêve d’ado. Pour beaucoup, l’aboutissement d’un projet de carrière. Quelle que soit la raison, l’expatriation professionnelle a la cote auprès des Belges.
En mars 2024, ils étaient au moins 532.421 à avoir posé durablement leurs valises à l’étranger, un chiffre qui englobe également les retraités. Ce nombre ne concerne toutefois que les ressortissants inscrits dans un consulat ou une ambassade, une démarche recommandée mais non obligatoire sur le plan légal. Cette (sous-)estimation progresse chaque année, selon les statistiques du Service public fédéral Affaires étrangères. En 2017, le nombre d’expatriés belges à travers le monde s’élevait seulement à 453.000, avant de franchir la barre des 500.000 en 2022.
Le secteur de la technologie attire beaucoup de Belges, surtout aux Etats-Unis.
Une (légère) évolution dans les destinations
Au fil des années, les mêmes pays continuent de séduire les Belges. A commencer par la France, qui accueillait en 2023 quelque 145.000 ressortissants, soit plus d’un quart des expatriés (28,4%). Un choix justifié notamment par la langue et la proximité avec la Belgique, deux facteurs déterminants dans un projet d’expatriation. Logique, donc, de voir les Pays-Bas rafler la seconde place du podium, avec 42.036 Belges installés en terres néerlandaises en 2023.
Bien que la composition du Top 5 n’avait guère changé au cours des six dernières années, le classement a néanmoins connu quelques évolutions. Récemment, le Royaume-Uni (34.887 Belges en 2023) a rejoint le trio de tête des destinations préférées des Belges, en devançant l’Espagne (34.208) et l’Allemagne (29.972). La raison tient aux démarches administratives liées au Brexit: le visa étant désormais obligatoire pour les Européens souhaitant légalement s’y établir, leur recensement est dès lors plus aisé et plus précis. Hors du continent européen, ce sont les Etats-Unis qui attirent le plus, avec 29.956 Belges enregistrés en 2023, suivis par le Canada (17.036), Israël (9.468), l’Afrique du Sud (7.537) et l’Australie (6.710).
750
permis de travail sont attribués annuellement à des Belges au Canada.
Ingénieurs et personnel soignant
Que ce soit pour débuter sa carrière ou pour la redynamiser après plusieurs années au sein d’un même secteur, la proportion de Belges à travailler sous d’autres cieux est donc de plus en plus importante. Sur le plan statistique, aucun registre, chez nous, ne recense les professions qui voient le plus de travailleurs exercer à l’étranger. «En réalité, cela concerne à peu près tous les domaines», nuance Diego Angelini, conseiller expatriation à l’Union Francophone des Belges à l’Etranger (UFBE). De par son expérience, il note tout de même plusieurs tendances: «Les ingénieurs sont souvent ceux qui partent le plus, quelle que soit leur spécialité, car leur profil est très recherché.» Les métiers médicaux –infirmiers, kinés, sages-femmes…– s’expatrient également sans trop de difficultés (avec une préférence pour la France et les territoires d’outre-mer) en raison des pénuries criantes de ce type de main-d’œuvre à l’étranger. «De nombreux pilotes d’avion belges ont également récemment émigré aux Emirats ou en Chine», complète Diego Angelini. Enfin, le secteur de la technologie attire beaucoup de Belges, surtout aux Etats-Unis.
La météo plus que le salaire?
Logiquement, les motivations financières entrent en ligne de compte dans un projet d’expatriation. Même si les barèmes salariaux vont souvent de pair avec le coût de la vie, les avantages fiscaux dans certains pays, comme au Luxembourg, ne sont pas non plus négligeables. Mais l’attrait pécuniaire n’est pas l’unique facteur à peser dans la balance.
De nombreux Belges, lassés par la pluie et la grisaille, se laissent séduire par des conditions de vie plus agréables, notamment sous les tropiques. «La majorité des infirmières qui partent travailler en Martinique ou à La Réunion ne s’y installeraient pas s’il y faisait moche», sourit Diego Angelini. Avec l’essor du télétravail, de nouvelles destinations exotiques gagnent également le cœur des Belges, comme le Costa Rica ou le Cap Vert, la maîtrise de la langue locale ne conditionnant pas l’expatriation des digital nomads.
Toutefois, le projet professionnel reste généralement le facteur le plus déterminant. «L’innovation de certains chantiers à Dubaï, par exemple, attire de nombreux ingénieurs en quête de nouveaux défis. Sans parler des coopérants, qui ne se rendent évidemment pas à Gaza, en RDC ou en Irak pour l’argent ou la météo. Pour eux, seul le dévouement compte.»
Pour beaucoup, l’aspect découverte fait aussi fantasmer. «D’année en année, les pays qui font rêver les jeunes n’ont pas changé: les Etats-Unis, le Canada, l’Australie ou encore la Nouvelle-Zélande reviennent sur toutes les lèvres, note le conseiller à l’UFBE. Or, ce sont ceux qui affichent les conditions d’expatriation les plus strictes.» Ces destinations pratiquent généralement l’immigration choisie et sélectionnent uniquement les profils professionnels qui les intéressent. Victimes de leur succès, ces pays ont également imposé des quotas pour les permis vacances travail (PVT), réservés aux jeunes de 18 à 30 (voire 35) ans. Au Canada, 750 PVT sont attribués aux Belges annuellement. Passé ce plafond, les vannes se referment. «Bref, un rêve d’expatriation à Sydney peut rapidement se transformer en un voyage de consolation à Carcasonne», caricature Diego Angelini.
5 conseils pour réussir son expatriation professionnelle
1. Choisir le pays adapté à son métier. La première étape est de vérifier si son diplôme y est reconnu et se renseigner sur l’état du marché du travail local, les pénuries ou les éventuels quotas. «Tout travailleur peut s’expatrier à condition qu’il aille au bon endroit», résume Diego Angelini, de l’UFBE.
2. Se plier aux exigences administratives. Un permis de travail est-il requis? Un visa? Un passeport? Une fois le départ confirmé, respecter les obligations belges, à savoir la radiation à la commune et l’inscription à l’ambassade ou au consulat belge local.
3. Se renseigner sur la sécurité sociale. Si le régime belge est très avantageux, à l’étranger, surtout hors de l’Union européenne, il confère généralement moins de protection. Mieux vaut en tenir compte dans son budget mensuel ou dans ses négociations salariales avec un futur employeur.
4. Garder un œil sur la fiscalité. Le régime fiscal varie fortement d’un pays à l’autre. Ne pas hésiter à vérifier si la Belgique a conclu une convention fiscale avec le pays d’accueil pour éviter la double imposition.
5. Se faire accompagner. Chaque projet d’expatriation est différent en fonction du pays, du métier exercé et du statut envisagé.
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