Comment lutter contre la servitude numérique
Beaucoup a déjà été écrit sur les dangers de la surdépendance au Web, aux réseaux sociaux, aux applications. Journaliste, essayiste et – ce qui n’est pas indifférent à l’intérêt de cette étude – spécialiste du monde communiste, Thierry Wolton tente, dans Les Nouvelles Routes de notre servitude (1), d’analyser les conséquences de cette aliénation.
Comment s’exerce-t-elle? «Nous sommes doublement aliénés par la captation de notre attention et par le mécanisme de dépossession qui se met en place au travers du lien de dépendance que développe l’outil numérique qui conquiert, transforme et produit du temps», écrit l’auteur. L’aliénation est d’autant plus consentie que ce temps absorbé apporte des satisfactions. «Les réseaux sociaux satisfont à deux comportements fondamentaux: le narcissisme par le biais du regard des autres, le conformisme par l’assimilation des opinions des autres, par suivisme.»
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De ce fait, le débat démocratique est en danger, car si la société numérique n’est pas en soi totalitaire, elle offre les possibilités de l’être, estime en substance Thierry Wolton. L’évolution de la Chine, où le parti-Etat est maître du contenu comme de l’usage qui est fait des outils numériques, l’illustre. Et quand on apprend que «plus d’une centaine de pays ont importé de République populaire les technologies nécessaires pour un meilleur contrôle de l’information», on peut se demander si la bataille pour les libertés à l’échelle mondiale n’est pas déjà perdue.
Pour Thierry Wolton, la révolution numérique est, dans son genre, aussi capitale que l’avènement de l’ère industrielle. Il ne s’agit pas de la rejeter. La «bienveillante mise en garde» qu’il nous adresse dans son essai doit nous aider à en contenir les effets délétères.
(1) Les Nouvelles Routes de notre servitude. Aliénation, normalisation, soumission, par Thierry Wolton, Grasset, 216 p.
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