© Bojana Tatarska Allary Editions

Charles Pépin, philosophe : «On ne peut pas devenir soi dans le déni du passé» (entretien)

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

On le décrit volontiers comme le chantre d’une «philosophie pratique». Charles Pépin revendique ce statut. Le podcast qu’il a lancé sur la plateforme Spotify a cette formule pour titre. L’outil est le dernier qu’il a utilisé pour vulgariser la connaissance de la philosophie et démocratiser son accès, après des participations à des émissions de télé et de radio, des chroniques dans Philosophie magazine ou des séminaires «Les lundis philo», ouverts à tous.

A travers ses essais, il a exploré les vertus de l’échec, la meilleure façon d’acquérir de la confiance en soi, ou la puissance que recèlent les rencontres. Dans son dernier livre Vivre avec son passé (1), il explique «comment faire de notre passé une force d’avenir». Car «nous sommes faits de passé plus que de présent». Une exploration, par certains aspects, vertigineuse.

Pourquoi «ne sommes-nous libres que dans la mesure où nous sommes conscients du passé qui a fait de nous ce que nous sommes»?

Si nous croyons que nous serons libres en inventant notre avenir, indépendamment de notre passé, nous risquons de nous prendre l’effet rebond de cet évitement, qui est très documenté par les psys. Pour combattre cela, je définis la liberté comme une manière de vivre et d’agir qui nous ressemble. Je ne peux le savoir que si je me replonge dans mon passé, que j’observe comment j’ai vécu, ce qui m’a plu, m’a déplu, et que je recherche des indices de ce qui pourrait me rendre heureux aujourd’hui. Si je ne sais pas de quoi j’hérite, comment pourrais-je fonder quelque chose de nouveau? Si je ne me connais pas, si je ne mesure pas, par exemple, comment je peux être entravé par des blessures d’enfance, comment pourrais-je aller de l’avant? L’idée est que la connaissance de soi, produite par le passé, permet d’avancer de manière plus sereine, plus consciente et plus libre.

Plus on sait ce dont on hérite, plus on peut fonder son avenir librement.

Il faut donc affronter ce passé dans toutes ses dimensions?

Tout le passé. De toute façon, il est là. Il persiste en nous. Il est présent à travers nos peurs, nos névroses, nos goûts, nos plaisirs… Mais le passé, c’est aussi ce qui s’est bien passé. Nous l’oublions souvent. Nous omettons de nous réchauffer à la flamme des joies passées. Nous sommes trop souvent nostalgiques. Nous nous lamentons sur notre jeunesse passée, sur une histoire d’amour terminée ou sur un ami disparu avec lequel nous avons connu de merveilleuses années. Pourquoi ne pas se réjouir d’avoir vécu ces moments? Là où le nostalgique regrette que cela ne soit plus, l’épicurien se réjouit que cela se soit passé. C’est déjà bien. Surtout que, par la puissance de la mémoire, ce passé est encore présent. Pour s’en rendre compte, il faut s’arrêter quelques instants, plonger dedans, le laisser revenir. Si on ne prend pas assez de temps, le passé nous happera juste de manière nostalgique. Si on prend le temps – pas deux heures, quelques minutes –, il redeviendra présent comme un bonheur retrouvé. On pourrait dire un bonheur au carré. Mais le passé ne sera pas exactement le même, puisque dès que nous nous souvenons, nous le reconstruisons en partie.

Que sont la mémoire épisodique et la mémoire sémantique?

La mémoire épisodique est la mémoire des épisodes vécus. Dans celle-ci, je ne peux rien effacer. Les mauvais souvenirs, je ne pourrai pas les gommer. La mémoire sémantique est la mémoire de ce que j’ai compris de ces épisodes vécus, les notions, les valeurs, les règles de vie… Or, selon une découverte récente importante, une grande part de cette mémoire sémantique est implicite. Cela signifie que l’on ne sait pas ce que l’on a inféré des épisodes passés. Un exemple. J’ai vécu une histoire d’amour, j’ai été trahi et quitté. C’est l’épisode qui s’inscrit dans ma mémoire épisodique. J’en ai déduit l’idée que je suis indigne d’amour et que je me retrouverai seul et trahi dès que je déclarerai ma flamme la prochaine fois. C’est une généralisation abusive inscrite dans ma mémoire sémantique. Or, je peux ne même pas savoir que j’ai tiré cette déduction. C’est comme si elle était inconsciente.

Lors du soixantième anniversaire de la libération des camps d’extermination nazis, en 2015, Simone Veil se rend à Auschwitz avec Jacques Chirac.
Lors du soixantième anniversaire de la libération des camps d’extermination nazis, en 2015, Simone Veil se rend à Auschwitz avec Jacques Chirac. © belgaimage

Comment, à partir de ce constat, peut-on «reconstruire en partie son passé»?

La découverte à laquelle les neurosciences ont abouti est que, autant on ne peut pas effacer l’épisode dans la mémoire épisodique, autant on peut détruire la règle de vie implicite qui en a découlé dans la mémoire sémantique. De plus, d’après ces nouveaux thérapeutes, on peut le réaliser assez facilement. C’est intéressant. Moi, j’adore la psychanalyse, j’ai passé quinze ans sur le divan, et j’ai beaucoup lu Freud et Lacan. Mais ce que disent les patients de cette thérapie, c’est qu’elle arrive à reconsolider la mémoire en quelques mois, pas en quelques années. C’est un espoir nouveau par rapport au passé traumatique. L’espoir de pouvoir aller de l’avant, à la fois en se souvenant des choses dures vécues et en étant moins marqué par celles-ci. Bien souvent, lorsqu’on a un passé douloureux, ce qui nous empêche de vivre n’est pas le mauvais souvenir, c’est la règle de vie implicite qu’on en a retiré. On peut travailler sur cela dans sa vie, sur le divan d’un psychanalyste, ou, désormais, avec des thérapeutes de la reconsolidation de la mémoire.

Vous vous référez dans votre livre au philosophe Henri Bergson qui, lui, avait mis en évidence la «récapitulation créatrice»…

La récapitulation créatrice de Bergson est un concept du début du XXe siècle qui n’intègre pas encore les travaux tout récents de la reconsolidation de la mémoire. Il s’agit d’une manière d’accueillir ce que notre passé a fait de nous pour aller de l’avant, et de façon créatrice. La reconsolidation de la mémoire va plus loin que les travaux de Bergson. Elle ne consiste pas seulement à récapituler son histoire d’une manière créatrice, elle met de la créativité dans la mémoire elle-même. Cela signifie qu’on peut intervenir dans son passé, par exemple, en faisant participer un personnage du présent dans une scène déjà vécue, c’est ce que l’on appelle le «reparentage».

Les recherches en neurosciences ont-elles beaucoup fait avancer ces connaissances?

Elles nous montrent que le passé n’est pas ce que l’on croyait. Il est en grande partie une contrée à redécouvrir. Si on veut résumer, le passé n’est pas du passé. C’est une présence. C’est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle. Une mauvaise nouvelle, parce que cela veut dire que les douleurs du passé sont encore en soi. Et une bonne, parce que cela signifie qu’on peut les travailler et les resculpter, soit, tout simplement, en vivant, soit en suivant une thérapie si la vie ne suffit pas.

Le passé surgit quand il veut, écrivez-vous. Pourquoi chercher à l’affronter puisqu’il fera de toute façon irruption? Parce que ce sont plutôt les souvenirs douloureux qui rejaillissent «naturellement»?

Oui, pour des raisons liées à l’évolution de l’espèce humaine dont notre cerveau hérite. Nos ancêtres ont appris à se souvenir des dangers de mort. Un rapport s’est établi entre le développement de la mémoire et l’instinct de survie. Cela explique pourquoi, des milliers d’années plus tard, nous nous souvenons davantage des choses négatives que des événements positifs. Pour ne pas répéter une épreuve trop violente ou pour ne pas prendre un risque déjà encouru, nous nous remémorons surtout le danger, la douleur ou l’échec. Il faut lutter contre cela. Nous devons faire preuve d’une forme de sagesse pour ressusciter des souvenirs heureux. C’est ce que nous dit Marcel Proust dans A la recherche du temps perdu à travers la saveur d’une madeleine trempée dans une tasse de thé. Le passé heureux revient. Mais ce n’est pas si naturel que cela. Il faut faire un petit effort de remémoration, dit Proust. En revanche, oui, le passé douloureux, lui, ressurgit quand nous ne le voulons pas. Vous êtes au début d’une histoire d’amour. Vous dînez avec quelqu’un. Soudain, vous avez le souvenir de l’échec passé d’une relation amoureuse. Il peut entraver votre bonheur. D’où l’idée de s’occuper de son passé, de l’analyser, de voir si nos souvenirs sont justes et vérifiés pour, peut-être, les déconstruire et retrouver une capacité d’aller de l’avant. La juste distance, c’est de se tourner vers son passé comme un enquêteur cherche à vérifier les indices, à les corroborer, à les croiser, mais toujours avec l’idée de se demander ce que j’en fais maintenant et demain. Plus je sais ce que mon passé a fait de moi, plus j’aurai d’idées sur ce que je peux en faire.

En quoi l’évitement du passé peut-il être dangereux?

L’évitement est dangereux parce que, au début, cette attitude porte ses fruits. On a donc l’illusion qu’elle fonctionnera tout le temps. Si vous buvez beaucoup d’alcool pour oublier un échec, dans un premier temps, cela fonctionnera. Le problème est que rien n’est réglé. Ce que vous avez fui opérera un retour parce que ce passé est là et fait partie de votre histoire. Quand il ressurgira, vous serez d’autant moins prêt à l’affronter que vous aurez entretenu l’illusion de vous en être débarrassé. Dans le cas de l’alcoolisme très sévère, s’ajoute quelque chose de très intéressant, le syndrome de Korsakoff. L’alcoolique sévère ne se souvient pas des nouvelles expériences heureuses qu’il est en train de vivre, par exemple se marrer au bar avec des amis. Il n’arrive plus à enregistrer de nouveaux souvenirs, tellement son cerveau est atteint par l’alcool. Il boit pour oublier. Mais il n’omet en réalité que les nouveaux souvenirs. Le passé traumatique, lui, reste bien présent. En raison de ce syndrome, il ne diluera pas ses mauvais souvenirs dans de nouvelles expériences heureuses. Il sera totalement vulnérable. L’alcoolisme est un bon exemple, parmi d’autres, du drame qu’engendre l’évitement.

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Prétendre avoir le libre choix de la conduite de sa vie est-il un leurre, parce qu’on ne peut pas se défaire du poids du passé?

Le leurre, c’est la liberté totale. Mais la liberté, une fois qu’on l’a redéfinie, n’est pas un leurre. Je m’explique. On n’est pas totalement libre. On porte avec soi un passé, social, génétique, inconscient… qui limite notre liberté. Toutes les mises en situation historiques de notre individualité restreignent notre liberté. J’ai 50 ans. Je joue au tennis. Je ne peux pas gagner le tournoi de Roland-Garros. Cela limite ma liberté. Je suis l’enfant d’une certaine classe sociale. Cela me conditionne. J’ai des prédispositions pour certaines maladies, pas pour d’autres, cela limite ma liberté. En réalité, la question est: comment arrive-t-on à être libre avec ce bagage? Ma réponse est que plus on comprend la façon dont on est influencé par le passé, plus on agrandit l’espace de la liberté possible, et donc plus on est libre. Plus on sait ce dont on hérite, plus on peut fonder son avenir librement. La liberté, ainsi entendue, n’est pas un leurre. Mais elle est restreinte. Autant avoir une liberté restreinte mais réelle plutôt qu’une liberté totale et illusoire.

Est-ce de cette manière que l’on arrive à faire en sorte que «nos actions nous ressemblent»?

C’est la définition de Bergson: «La liberté, c’est se ressembler et se rassembler.» Or, comment savoir si la manière dont j’aime, je vis en couple ou je fais mon métier me ressemble? En me retournant sur mon passé. En repérant les indices de ce qui m’a rendu heureux et en essayant de tirer les leçons de mes échecs. Si je suis amnésique, je ne sais pas ce qui compte pour moi, ce qui m’a mis en joie. Si je suis dans le déni ou l’évitement de mon passé, je ne me souviens pas de ce qui m’a déplu. Dès lors, je manque d’indicateurs sur ce qui pourrait me rendre heureux demain. Il faut savoir se retourner sur son passé pour avancer. Un peu comme un joueur de rugby qui va de l’avant en n’ayant le droit que de faire des passes vers l’arrière.

Comme exemple d’action qui ressemble à son auteur, vous citez un but du joueur de football Zlatan Ibrahimović lors du match PSG-Bastia, le 19 octobre 2013…

Ce but rassemble toute sa vie. Tout son passé est ramassé dans ce geste qui tient autant de l’art martial que du foot, une aile de pigeon retournée entre plusieurs défenseurs et le but. On y retrouve la mémoire procédurale (NDLR: la mémoire de nos habitudes et de nos réflexes, celle qui nous permet de conduire une voiture, de faire du vélo, etc. sans même être vraiment conscient de l’ensemble des gestes et facultés que nous mobilisons): les milliers d’heures d’entraînement de foot et d’arts martiaux. La mémoire épisodique: tous les épisodes qu’il a réalisés pour réussir à effectuer ce genre de geste. La mémoire sémantique: les valeurs que ce geste traduit puisqu’il est non conformiste. Tous ces éléments de son passé sont présents dans cette action, et pourtant, il crée quelque chose de nouveau. C’est cela, la récapitulation créatrice. Ce geste est une image pour signifier que nous aussi, à notre échelle, on peut, comme Zlatan Ibrahimović, récapituler notre histoire en réalisant quelque chose de neuf, qui nous ressemble et qui nous rassemble. Rassembler les différents âges de notre histoire dans une étonnante simultanéité qui s’appelle être soi, tout simplement. On ne peut pas devenir soi dans le déni du passé.

(1) Vivre avec son passé. Une philosophie pour aller de l’avant, par Charles Pépin, Allary, 304 p.
(1) Vivre avec son passé. Une philosophie pour aller de l’avant, par Charles Pépin, Allary, 304 p. © National

Même dans le cas où l’on rejette une part de cet héritage?

Dans ce cas-là, on en hérite encore. On n’est pas obligé de consentir à son héritage. Mais il est là. Même si je le refuse, je suis encore héritier puisque je me positionne par rapport à lui. C’est bien mon histoire qui me permet de devenir la personne que je suis. Pour avancer, il faut ressaisir cette histoire. Ressaisir, cela peut vouloir dire aller dans le sens d’un héritage parental professionnel, reprendre la boulangerie de son père, être avocat comme sa mère… Mais cela peut aussi se faire en faisant un grand pas de côté, en refusant les valeurs de son milieu… L’écrivaine française Laure Murat, aristocrate de la famille de Napoléon et des Murat, qui vit aux Etats-Unis, est féministe et lesbienne. Elle a rompu avec son milieu. Pour autant, elle a ressaisi son histoire. Elle vient d’écrire Proust, roman familial (Robert Laffont, 256 p.) dans lequel on voit qu’elle va de l’avant avec son passé. Dans le «avec», il peut y avoir une rupture, mais c’est quand même «avec».

Le pardon pour une souffrance endurée est-il toujours possible?

Non, il est une possibilité offerte à la subjectivité humaine. Lorsqu’il est possible, il résume parfaitement l’objet de mon livre. Quand je suis capable de pardonner, je me tourne vers le passé. En pardonnant, je rends de nouveau l’avenir possible. Mais ce n’est pas toujours envisageable. Parfois même, la colère permet mieux d’aller de l’avant que le pardon. Virginie Despentes, Christine Angot l’écrivent très bien. Elles disent que, vu ce qu’on leur a fait subir – des viols – pour tenir et pour aller de l’avant, il faut la colère, la rage, l’agressivité… Je ne dis surtout pas qu’il faut pardonner. Je pose juste la question de la possibilité du pardon. Et, autre interrogation, pour des événements graves, si on ne croit pas en Dieu, le pardon est-il possible? La prière du Notre Père dit: «Pardonne-nous, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés.» Sous-entendu: puisque nous sommes enfants de Dieu, parce que nous avons un peu de cet amour infini, nous pouvons pardonner. Si on y croit, c’est très bien. Cela me paraît assez beau. Mais si on n’y croit pas, est-on est capable de pardonner? La question reste en suspens.

L’alternative est-elle l’oubli?

C’est l’oubli à condition que cet oubli nous soit offert par la vie et qu’il ne soit pas une décision personnelle. Si c’est un oubli volontaire, cela risque de ressembler à de l’évitement. En revanche, parfois, la vie nous offre la possibilité de l’oubli parce que des rencontres nouvelles nous font rebondir, parce qu’une activité nous met en joie. Alors, les mauvais souvenirs sont oubliés. A mon avis, d’ailleurs, oubli n’est pas le bon mot. Je pense que ces souvenirs ne sont pas oubliés pour toujours, ils sont relégués en arrière-fond de la conscience. Ils sont mis en sourdine, à l’écart, mais ils sont encore là. Ils nous constituent toujours, mais en nous entravant moins. Dans la mesure où, grâce à de nouvelles expériences heureuses, nous prenons de la place à ces mauvais souvenirs afin de les diluer dans une mémoire épisodique infinie, nous laissons plus de place à un bonheur possible.

Ce cheminement peut-il être illustré par le parcours, que vous évoquez, de Simone Veil, rescapée du camp d’extermination d’Auschwitz devenue ministre de la Santé, à l’origine de la loi dépénalisant l’avortement en France?

Ne pas se réduire à la victime qu’elle a été et à cette jeune fille qui a perdu ses parents et son frère, c’est un moteur. Ne pas se réduire, cela ne signifie pas être dans le déni. Je sais que j’ai vécu ce que j’ai vécu. Cela m’a traversé, travaillé. J’en hérite, j’en parle, j’écris dessus. Mais je ne suis pas simplement cela. Je ne me réduis pas à ce que mon passé a fait de moi. C’est la thèse centrale de mon livre. Je suis ce que mon passé a fait de moi, mais je ne suis pas simplement cela.

Bio express

1973

Naissance, à Saint-Cloud, à l’ouest de Paris, le 8 mai.

1999

Publication du roman Descente (Flammarion).

2013

Quand la beauté nous sauve (Robert Laffont).

2015

La Joie (Allary).

2016

Les Vertus de l’échec (Allary).

2018

La Confiance en soi. Une philosophie (Allary).

2020

Lancement du podcast «Charles Pépin, une philosophie pratique».

2021

La Rencontre (Allary).

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