Thierry Fiorilli

C’est beau comme les amours d’été

Thierry Fiorilli Journaliste

Il y a ce côté phénix, parce que ce qu’on croyait mort peut y retrouver vie. Cigale aussi, évidemment, puisqu’on verra plus tard, allez, enjoy now.

Un peu paon, avec ces splendeurs qui se révèlent et ces enclumes qui se font plumes. Ou lézard, rapport aux canicules. Ou poisson, vu qu’on barbote pas mal. Ou chamois, même si on a grimpé paisiblement. Batracien (toute cette pluie), luciole (toutes ces nuits bleues), chat (toutes ces siestes volets ouverts), mouton (tous ces troupeaux autour) ou koala (toute cette solitude choisie). Le bestiaire est très vaste et adapté à chaque cas de figure. Mais si l’été n’était qu’un animal, un seul, et si tout s’y déroule bien, le papillon aurait ses chances: battements d’ailes enjoués, mille teintes différentes, yo-yo hyperactivité/longues pauses, délicieux points de chute, ça butine léger et allègre, c’est si joli qu’on le voudrait pour toujours mais c’est déjà presque fini et on n’y peut rien, c’est écrit.

La clarté de leurs sentiments reste aussi éternelle que leur théâtre de vie est éphémère.

Peut-être que c’est pour ça que c’est si beau. Que si ça durait, ça s’affadirait. On le sait, mais on se surprend toujours à croire le contraire, au détour d’un ciel d’étoiles, d’une orée turquoise ou d’un panier de groseilles. Avant que le calendrier, la comptabilité, la vraie vie nous rappellent à l’ordre. On reprend notre place. On écoutera encore quelques jours cette chanson aérienne – c’est fou comme on la mettait à fond, on chantait dessus en chœur, elle avait le goût du bonheur – et puis on arrêtera, on la coupera après quatre notes, on baissera le volume – c’est dingue comme elle nous agace ici, elle est nulle au fond, on dirait un emballage vide. On enfilera une fois cette chemise blanche éclatante, en lin et sans col – elle était irrésistible sur ce petit marché, avec la fraîcheur des platanes pas loin, et le soir, avec, on avait fière allure – et puis elle restera au fond de la penderie, avec le pantalon chamarré (difficile pour aller bosser, elle a jauni en plus, et elle gratte). On refera le cocktail comme là-bas mais on oubliera vite, parce que c’était mieux sous la canopée de l’hôtel, que c’est bof indiqué l’hiver et puis on nous le servait tout prêt.

Comme on restera en contact avec lui, ou avec elle, facile maintenant, le smartphone, Insta, WhatsApp, qu’importent les océans. Qu’est-ce que c’était bien! Coup de foudre. Alignement de planètes. L’espace, peu de contraintes, pas d’horaires. Juste ce décompte des jours mais on le chassait, d’une étreinte, d’un plongeon, d’une gloriette, d’un Venise en ombres chinoises. Ou peut-être que c’est possible toujours, ici, ou je la rejoins là, où elle viendra, elle. Jusqu’à ce taxi, ce train ou cet avion. Cœurs en miettes, torrents qui jaillissent. Et puis, petit à petit, presque toujours, tout qui reprend sa place.

Sauf que les romances d’été, même Souchon sait qu’elles n’ont pas à être passées à la machine, ou mises à bouillir, pour voir si les couleurs d’origine peuvent revenir: pas le temps de pâlir. Sans eau de Javel, la clarté de leurs sentiments reste aussi éternelle que leur théâtre de vie est éphémère. Sûr que c’est pour ça qu’elles sont si belles. Papillons des amours.

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