
13 millions de Belges en 2070, surtout des retraités: «Travailler jusqu’à 67 ans, c’est déjà bien assez tard»
La population vieillit. Un problème déjà bien connu des démographes, qui se fera de plus en plus prégnant à mesure que les années passeront. En 2070, la Belgique comptera 12,9 millions d’habitants, dont une part importante de retraités. Comment y faire face?
La population belge compte aujourd’hui très exactement 11.763.650 personnes, selon Statbel. En 2070, ce chiffre grimpera à 12,9 millions d’habitants, ressort-il, mardi, des perspectives démographiques réalisées par le Bureau fédéral du Plan en collaboration avec l’institut national de statistique. Cela signifie que dans les quatre prochaines décennies, la population augmentera de 30.000 têtes annuellement.
Selon les prévisions, l’espérance de vie moyenne des Belges en 2070 sera de 89,8 ans pour les femmes et de 88,1 ans pour les hommes. A titre de comparaison, les chiffres de 2023 font eux état d’une espérance moyenne de vie de 84,1 ans pour les unes et de 80,2 ans pour les autres.
Cette amélioration de la longévité signifie que la population belge va indéniablement vieillir. En effet, le nombre de personnes de 67 ans et plus va croître «plus rapidement», soulignent le Bureau fédéral du Plan et Statbel. Les populations plus jeunes, de 0 à 17 ans et de 18 à 66 ans, elles, seront stables. «Si en 2024, il y avait 28 personnes de 67 ans et plus pour 100 personnes de 18 à 66 ans (NDLR: population d’âge actif), ce nombre passe à 37 en 2040 et à 43 en 2070», commentent les deux organismes. Les personnes actives resteront toutefois largement majoritaires.
Population vieillissante, quid des pensions?
Pour David de la Croix, chercheur au FNRS et professeur à l’Institut de recherches économiques et sociales de l’UCLouvain, ces chiffres soulèvent deux inquiétudes. La première, la plus importante selon lui: celle des soins de santé. Plus la population vieillira, plus ses besoins se feront sentir et plus la nécessité de financements se fera pressante. «Dans une société qui devient de plus en plus riche, ça ne me semble pas irréaliste de penser que l’on peut augmenter le financement des soins de santé, et ainsi répondre à une demande de la population», estime le chercheur.
La seconde inquiétude est sur toutes les lèvres depuis le début de l’année, et plus encore depuis la mise en place du gouvernement de Bart De Wever: les pensions. «Notre système actuel a été pensé à une époque où la part de retraités était bien plus faible qu’elle ne l’est aujourd’hui», insiste David de la Croix. Maintenant que la population vieillit – ce qui avait déjà été constaté il y a une vingtaine d’années -, ce système montre ses limites.
En 2025, l’âge légal de la pension est passé de 65 à 66 ans, et est de 67 ans pour les personnes nées à partir du 1er janvier 1964. «Enfin, c’est théorique…», souligne le professeur d’économie. «L’âge effectif moyen du départ à la retraite est bien plus bas. Il y a quelques années, il était sous les 60 ans, grâce aux régimes de préretraite et de pension anticipée. S’il atteint désormais 61 ou 62 ans, on doit s’estimer heureux.»
Mais dans 45 ans, quand la population belge aura atteint près de 13 millions d’individus et que la part des retraités aura augmenté, il faudra trouver des solutions pour financer les pensions. Augmenter encore l’âge, et peut-être un jour dépasser les 70 ans? David de la Croix balaie cette hypothèse. «67 ans, c’est déjà bien assez tard.» Même en admettant que les travailleurs garderaient une bonne forme physique plus longtemps, «ils n’auront plus la force de travailler». Pour lui, l’une des solutions au problème de vieillissement est d’homogénéiser le niveau des pensions. «C’est d’ailleurs ce qu’il se passe actuellement avec la diminution progressive des pensions dans le secteur public. D’ici une quarantaine d’années, elles s’aligneront à celles du secteur privé.»
Une population en baisse à Bruxelles
Si la population va augmenter dans les 45 années à venir, cela ne se produira pas de manière uniforme sur l’ensemble du territoire belge. C’est en Flandre que la croissance devrait être la plus forte, avec 8,013 millions d’habitants en 2070, contre 6,822 millions en 2024. Soit une croissance de 1,191 million de personnes.
En Wallonie, la croissance diminuera progressivement jusqu’à devenir négative à partir de 2074. En cause, la hausse des décès jusqu’en 2057 liée au vieillissement de la population, mais également la baisse des naissances à partir de 2038. En 2070, la Wallonie comptera 3,740 millions d’habitants. En 2024, elle en dénombre 3,692. Soit une hausse d’à peine 48.000 personnes.
C’est dans la région bruxelloise que la baisse de la croissance sera la plus importante. «Bien que le solde migratoire international et le solde naturel soient positifs, ils ne suffisent pas à compenser les départs vers les deux autres régions», indiquent le Bureau du Plan et Statbel. En 2070, le nombre d’habitants résidant dans la région de Bruxelles-Capitale s’élèvera à 1,198 million, contre 1,250 million en 2024. Soit une diminution de 52.000 Bruxellois.
L’immigration, seul moteur de croissance
En parlant de migration, elle devrait rester le principal moteur de la croissance démographique dans le pays dans les années à venir, voire le seul moteur à partir de la fin des années 2030, puisque le solde naturel (naissances moins décès) deviendrait négatif à partir de 2038. L’immigration devrait alors concerner 165.000 personnes par an, qui devraient principalement venir des pays hors-UE. L’immigration intra-européenne devrait rester stable pour ce qui concerne les anciens pays de l’UE et diminuer pour les nouveaux adhérents à l’Union européenne.
La question migratoire est dans la bouche de nombreux politiques à travers l’Europe, certains s’y opposant farouchement. Elle reste cependant une bonne chose, selon David de la Croix. «Les questions autour de l’immigration soulevées actuellement tiennent plus de considérations culturelles qu’économiques. Elle est pourtant un moyen de rajeunir la population. La Belgique a besoin de profils qualifiés et non qualifiés en capacité de travailler, surtout lorsque les actifs d’aujourd’hui ne le seront plus», conclut-il.
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