Les écrans peuvent vite devenir problématiques. Comment reprendre le contrôle? © Getty Images/Tetra images RF

Pourquoi nous sommes accros aux écrans: voici quelques clés pour reprendre le contrôle

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Smartphone, tablette, ordinateur… Les écrans sont omniprésents dans le quotidien et leur utilisation peut vite devenir problématique. Comment reprendre le contrôle? Voici quelques conseils.

A l’arrêt de bus, devant la télévision et parfois même lors d’une discussion: sortir son smartphone tient souvent plus du réflexe que de l’utilité. Les écrans sont partout, et sont devenus pour beaucoup indispensables. Au niveau mondial, un individu passe en moyenne six heures et 57 minutes par jour devant un écran, hors activité professionnelle. Et la moitié de ce temps a lieu sur mobile. Une statistique qui ne fait qu’augmenter et qui concerne quasi tous les âges.

La technologie offre, évidemment, de nombreux bienfaits: aspect pratique, communication facilitée, accès à l’information et élargissement des possibilités d’apprentissage. Mais une consommation excessive d’écrans peut pourrir la vie, avec des conséquences négatives, notamment sur la vie sociale et la santé mentale. Il est toutefois possible de reprendre le contrôle, promet la psychiatre belge Caroline Depuydt dans son ouvrage «Je me libère des écrans» (éditions Racine), disponible depuis le 10 septembre. Elle y prône la «juste déconnexion» à travers un guide pour reprendre sa consommation digitale en main et sortir de ce qu’elle appelle «la tyrannie des écrans».

Cercle vicieux

Pour le Dr Caroline Depuydt, la principale clé pour se libérer de cette addiction aux écrans, c’est la compréhension. Pourquoi sont-ils devenus indispensables? L’addiction aux écrans est «souvent motivée par la recherche d’une évasion ou d’une gratification instantanée, mais elle risque d’aboutir à un isolement, une détérioration de la santé mentale et physique et une diminution de la qualité de vie». Une dépendance qu’elle juge «insidieuse», tant les écrans sont ancrés dans le quotidien et parfois nécessaires à la réalisation d’autres tâches. Avec un cercle vicieux à la clé: se connecter pour une raison précise et finir par perdre son temps. «Sortir du cercle vicieux ne signifie pas se débarrasser de tous ses appareils, mais plutôt les utiliser quand on en a besoin, puis les éteindre sans stress», nuance-t-elle.

Les like sur les réseaux sociaux ou les jeux en ligne, par exemple, viennent activer le circuit du plaisir et de la récompense. «D’abord, on consomme un produit ou adopte un comportement censé nous procurer du plaisir. Le principe de ce genre de produits est qu’ils agissent sur le circuit de la récompense et déclenchent la sécrétion de dopamine. Une fois le cerveau habitué et désensibilisé, il développe une tendance compulsive à rechercher le produit, et ce, même s’il expérimente les conséquences négatives de cette consommation.» On finit par consommer non plus par besoin ou envie, mais par habitude.

Interférence dans le quotidien

Si l’addiction aux écrans n’est pas officiellement reconnue comme telle, Caroline Depuydt la définit comme «un trouble caractérisé par le besoin excessif et obsessionnel d’utiliser un ordinateur (ou tout autre écran) pour se connecter à Internet, à des applications en ligne, à des jeux vidéo, à des plateformes de streaming; pour vérifier ses e-mails, téléphoner, texter, s’orienter, checker ses notifications ou les informations.»

Avec un impact, bien réel, sur la vie quotidienne. Car la frontière est mince entre un usage intensif mais fonctionnel, ou pathologique et problématique et est fonction de l’interférence provoquée sur les activités du quotidien, de la capacité de contrôle ou encore de l’état émotionnel qu’il procure.

Mécanique bien rodée

L’utilisateur n’est pas le seul fautif. Les industries mettent en place une mécanique bien rodée pour rendre accros. Et instaurent un sentiment de peur, celle de ne pas pouvoir accéder à cette technologie. Cela porte même un nom: la nomophobie (pour no mobile-phone phobia). Ou encore la peur de «rater quelque chose». C’est le syndrome FOMO (pour Fear of missing out) qui pousse à se connecter et s’informer à l’excès et peut engendrer une fatigue informationnelle.

«On peut éprouver des diffucltés à mettre des limites à l’infobésité parce que c’est plaisant et facile, toutes ces « news » qui s’affichent sur notre écran grâce aux notifications. Tout nous y ramène, écrit le Dr Caroline Depuydt. Et puis nous craignons de rater une information importante ou une vidéo marrante.» Une stratégie des concepteurs pour capter l’attention et ensuite soumettre l’utilisateur aux publicités et autres incitations à la consommation. A la clé: anxiété, fatigue et insomnie.

Quatre étapes pour se libérer

Bonne nouvelle: il est possible de reprendre le contrôle. «Les écrans redeviennent alors ce à quoi ils sont destinés: des ressources utiles mais que l’on peut débrancher quand nous n’en avons plus besoin.» Le Dr Caroline Depuyt suggère quatre étapes:

1. La prise de conscience: suis-je sous l’emprise des écrans? A quel degré? Avec quel impact sur mon quotidien? Sans culpabilité: «Vous êtes, vous aussi, peut-être devenu dépendant aux écrans. Et c’est parfaitement OK!» Elle conseille, entre autres, de tenir un journal pour évaluer sa consommation.

2. Réveiller le cortex préfrontal: c’est le lieu des prises de décision, mais aussi du contrôle des impulsions et des émotions. Mais son bon fonctionnement peut être entravé par les activités automatiques. Elle recommande de se mettre des objectifs clairs. «Soyez réaliste et progressif, mettez en place des objectifs que vous pensez pouvoir tenir.»

3. Resensibiliser le système dopaminergique: cela passe par une réduction de l’exposition aux écrans, en utilisant par exemple des outils qui permettent de limiter le temps passé sur le smartphone ou certaines applications. Ou désactiver les notifications. Objectif: retrouver des activités plaisir en dehors des écrans.

4. Booster naturellement sa dopamine: grâce à toute activité susceptible, hors écran, de susciter des émotions positives. Cela peut se faire via le sport, l’échange, la méditation ou déguster son plat favori.

Autrement dit: trouver un juste milieu.

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