Benjamin Hermann

Formation du gouvernement: ces petits grains de sable qu’on n’avait pas vu venir

Benjamin Hermann Journaliste au Vif

Tout semblait pourtant si bien parti, pour la formation du gouvernement fédéral avec rapidité et efficacité. C’était sans compter sur ces innombrables petits grains de sable.

Il y a des petits jeux qui, de prime abord, semblent tellement évidents. Ces casse-tête chinois qui, d’apparence simple, se transforment en cauchemars à l’épreuve du réel. Ou cet exercice qui consiste à dessiner une maison d’un seul trait, sans lever le crayon. Plusieurs combinaisons existent. Ce n’est pas bien compliqué, il n’y a plus qu’à s’exécuter. Puis la mécanique se grippe et on se retrouve, longtemps après, à s’arracher les cheveux.

L’alignement de planètes qui découlait des élections fédérales de juin dernier laissait apparaitre, lui aussi, un puzzle a priori guère difficile à assembler. Cinq pièces, deux qui décidèrent rapidement de s’unir au sud, trois qui décidèrent finalement de s’assembler au nord. Il suffisait de faire coïncider les deux ensembles, a priori sans trop de difficultés.

Puis vinrent les vacances, puis les «supernotas» du formateur, puis le mécontentement de Vooruit, puis celui du MR, puis l’abandon du formateur, puis l’intervention d’un médiateur, puis le retour des «supernotas», puis les élections communales et provinciales. Celles-ci n’ont jamais fait que confirmer les grandes tendances qui avaient pu émerger quatre mois plus tôt. Le petit jeu ne pouvait que s’en trouver facilité. D’autant plus que le temps pressait, qu’il fallait boucler l’exercice budgétaire avant la fin de l’année, que tout le monde s’accordait sur ce point, qu’il allait falloir prendre ses responsabilités, et vite. Il en allait de la crédibilité des décideurs politiques sortis vainqueurs des urnes.

C’était sans compter sur de nouvelles difficultés, autant de petits grains de sable qui rendent cette équation d’apparence fort simple bien compliquée, en définitive.

Les deux pièces du puzzle qui, même avant les élections de juin, semblaient les plus faciles à réunir sont à présent celles qui se disjoignent. Et provoqueront potentiellement, à court terme, un peu de trichotillomanie (de l’arrachage de cheveux).

C’est Conner Rousseau, président de Vooruit, figure de l’homme providentiel il n’y a pas si longtemps, qui semble prendre ses distances avec Bart De Wever, président de la N-VA sorti des urnes encore plus conquérant qu’il ne l’était. Le premier a désapprouvé la méthode de travail du second, il réclame une note socioéconomique et budgétaire avant de poursuivre le travail. Ses exigences ont mis un coup d’arrêt aux négociations, en fin de semaine dernière, et n’ont pas particulièrement rapproché les protagonistes, cette semaine.

Par-dessus le marché, les militants de Vooruit ont recalé la coalition qui se dessinait avec la N-VA, à la Ville de Gand. Et voilà un grain de sable supplémentaire.

Les pièces du puzzle, toujours au nombre de cinq, sont là, couchées sur la table. Mathématiquement parlant, il n’y a pas de composition aussi robuste que celle-là. Politiquement, toute autre option apparaîtrait sans doute comme moins légitime.

Les cinq peuvent encore répéter qu’ils n’ont pas le luxe d’attendre ni d’échouer, le seul constat que l’on peut établir est qu’ils n’y sont pas encore parvenus. Pas grand monde ne l’avait prédit, après les élections de juin et celles d’octobre, face à l’apparente simplicité du casse-tête.

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