Carte blanche

Enseignants en immersion: le nouveau calendrier scolaire, cette goutte de trop (carte blanche)

La réforme du calendrier scolaire risque de faire fuir bon nombre de profs flamands qui enseignent en immersion en Fédération Wallonie-Bruxelles, prévient l’Union des parents des écoles d’immersion en néerlandais. Qui attend un geste fort de la part de la ministre Désir.

L’été 2022 restera dans les annales comme « un été à méduses », en raison de la canicule qui a frappé tous les continents.

Pour les écoles en immersion linguistique, en particulier en néerlandais, c’est plutôt la rentrée 2022-2023 qui est celle de tous les dangers ! Le ‘coup de chaud’ exceptionnel, pour ces établissements, c’est l’effet de la mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaire, votée au printemps 2022. Désormais, les congés des élèves et des enseignants des trois Communautés de notre petit pays ne coïncideront plus systématiquement, la Fédération Wallonie-Bruxelles ayant décidé de remanier en profondeur, pour le bien allégué des élèves, le rythme d’une année scolaire. Une décision unilatérale, car malgré de grands espoirs, les deux autres Communautés n’ont pas emboîté le pas de la réforme.

Pour les enseignants néerlandophones exerçant leur métier dans l’enseignement en immersion en Fédération Wallonie-Bruxelles, cette décision a fait l’effet d’une bombe… ou de la goutte d’eau qui fait déborder un vase déjà trop plein.

Très souvent, ils sont eux-mêmes parents, et leurs enfants sont scolarisés dans l’enseignement flamand, près de leur domicile ou à tout le moins dans la langue parlée à la maison. Or, par l’effet de cette réforme : finis, les congés en même temps que leurs enfants ! On a beau minimiser les périodes d’écart – « 3-4 semaines, selon les années » -, pour ces enseignants, c’est le coup de grâce. Salaire inférieur à celui de leurs collègues qui pratiquent en Flandre, coût des trajets – et avec la hausse des prix du carburant, qui plus est ! -, environnement de travail qui laisse à désirer, retard technologique des écoles francophones au regard de leurs homologues flamandes, absence totale de soutien pédagogique et de reconnaissance de la spécificité du travail en immersion linguistique, et maintenant, casse-tête pour l’organisation familiale ? Beaucoup ont déjà dit « STOP », de nombreux autres se laissent une année de réflexion, histoire de voir s’ils s’y retrouvent et, surtout, si quelque chose évolue pour l’immersion en Fédération Wallonie-Bruxelles.

C’est que, comme dans la chanson, « il suffira d’un signe ». L’enseignement en immersion – l’enseignement, tout court, d’ailleurs – c’est avant tout une affaire de passion. Ces enseignants quittent à contre-cœur, la mort dans l’âme, un projet immersif qu’ils ont souvent contribué à construire de toutes pièces, dans lequel ils se sont investis corps et âme pour pallier les lacunes criantes du soutien et de l’accompagnement didactique de ces projets. Pour citer une enseignante, « leur bébé, leur immersion ». Continuons à fredonner : « Leur fils, leur bataille… mais il faut bien qu’ils s’en aillent » …

A moins que. A moins que le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, sa Ministre de l’éducation en tête, envoie un signal fort, qui traduise une réelle volonté de reconnaître à l’enseignement en immersion linguistique toute sa spécificité et son importance.

Dans le contexte belge, ce petit pays où se côtoient trois langues nationales, l’enseignement en immersion linguistique permet de transcender les vieux clichés et les a priori linguistiques, trop souvent encore source de crispations entre les communautés.

La question du bilinguisme et de l’apprentissage du néerlandais en Fédération Wallonie-Bruxelles ont marqué ces derniers mois l’actualité belge, et transcendent même désormais les cadres institutionnels et les frontières communautaires pour devenir un véritable enjeu de la Belgique fédérale de demain. Dans le contexte belge, ce petit pays où se côtoient trois langues nationales, l’enseignement en immersion linguistique permet de transcender les vieux clichés et les a priori linguistiques, trop souvent encore source de crispations entre les communautés. Ce ne sont pas les quelques heures de seconde langue en plus, qui plus est au choix du néerlandais ou de l’anglais en Wallonie, à la rentrée 2023, qui vont assurer le succès du slogan bien connu « tous bilingues en… » !

Et d’ailleurs, avec quels profs ? Faire fuir ceux en place ne va pas arranger la situation alors que la Ministre annonce qu’il faudra engager déjà d’ici un an 343 équivalents temps plein d’enseignants de seconde langue pour rencontrer les objectifs du « plan bilinguisme » du gouvernement. Manque de cohérence, schizophrénie législative ? « Gouverner, c’est prévoir », dit-on : manifestement, les instances de la Fédération Wallonie-Bruxelles n’avaient pas prévu cet exode massif d’enseignants néerlandophones…

Si la situation est grave, elle n’est pas – encore – désespérée. Beaucoup d’enseignants néerlandophones ne demandent pas mieux que de continuer à enseigner dans leurs écoles francophones. Ils attendent, ils espèrent, être entendus, être reconnus. A la fin de l’année parlementaire, aux députés de la Fédération, la Ministre a annoncé la tenue, tout au long de l’année scolaire 2022-2023, d’Etats généraux de l’immersion pour faire le point de la situation, sans tabou. Gageons que la concrétisation de cette annonce constituera, pour de nombreux enseignants d’immersion, un premier geste, un pas dans la bonne direction.

2022-2023 devra donc être celle de l’enseignement en immersion linguistique… ou l’immersion ne sera plus !

L’Union des parents des écoles d’immersion en néerlandais (U.P.I.N.)

Le titre est de la rédaction. Titre original: 2022-2023 : l’année des méduses pour l’enseignement en immersion linguistique en Fédération Wallonie-Bruxelles.

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