Gérald Papy

Trump choisit la dictature contre les démocraties, les Européens au pied du mur russe

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

En trois ans, la nation ukrainienne a perdu plus de 480.000 âmes, des soldats, des civils, des enfants, sous les bombardements et les tirs d’artillerie de l’armée russe. A Boutcha, au nord de Kiev, 500 habitants ont été massacrés aveuglément le 31 mars 2022 par la soldatesque déployée par le Kremlin. Depuis les territoires occupés dans le sud de l’Ukraine, 20.000 enfants et jeunes ont été transférés de force vers la Russie. Cette déportation a conduit la Cour pénale internationale à délivrer, le 17 mars 2023, des mandats d’arrêt pour crime de guerre contre la commissaire russe aux droits de l’enfant, Maria Lvova-Belova, et contre le président Vladimir Poutine. Depuis plus de 1.100 jours et nuits, l’invasion de l’Ukraine par la Russie provoque d’indicibles souffrances.

Le 20 janvier 2025, Donald Trump redevient président des Etats-Unis. En quelques semaines, il renoue avec la Russie, ouvre des négociations, ignore les Ukrainiens et les Européens, élabore un «plan de paix» qui rencontre les principales exigences de Moscou, humilie le président Volodymyr Zelensky qui rechigne à accéder à ses demandes, et suspend l’aide à l’Ukraine. On oublie tout? On pardonne tout? Et on relance le cycle des affaires avec les Russes?

Que sont devenues les valeurs de la démocratie américaine? A partir de février 2022, Amérique et Europe se sont mobilisées derrière les Ukrainiens face aux Russes pas seulement pour la protection d’une nation, pas seulement au nom du respect des frontières et de la souveraineté nationale, pas seulement pour s’opposer à une dictature sanguinaire au passif déjà lourd, mais aussi et surtout pour défendre, aux yeux du monde, la démocratie, ses valeurs de liberté, de tolérance, d’égalité, l’Etat de droit qui la fonde…

Aujourd’hui, pas un de ses arguments n’est évoqué, ne fût-ce que suggéré pour guider les initiatives de l’administration américaine. Il ne s’agit, pour les Donald Trump, J.D. Vance et autres Marco Rubio, que de conclure le plus vite possible un deal, aux perspectives économiques prometteuses, permettant de se débarrasser d’un fardeau financier et de passer à un autre deal, tout en donnant l’apparence d’une paix. Qui, à Washington, peut sérieusement penser qu’un cessez-le-feu, exclusivement soumis aux attentes russes, sans garanties de sécurité solides pour les Ukrainiens, actant la perte de 20% de leurs terres, absolvant les crimes de l’agresseur, puisse constituer la base d’une pacification durable?

Le dommage causé par cette politique est considérable pour l’image des Etats-Unis. Il l’est d’autant plus que l’abandon des Ukrainiens se conjugue à une attaque des Européens. Certes, ils ont fauté en se reposant paresseusement sur leur partenariat avec les Etats-Unis et en refusant de se doter des moyens de leur propre défense. Cette responsabilité ne justifie pas le mépris exprimé par les dirigeants américains, le diktat qu’ils imposent sur le dossier ukrainien. Le sursaut que les Européens manifestent est salutaire, même s’il n’est pas encore suffisant. Ils doivent avoir le courage de le traduire en actes concrets. Avec ou malgré les Américains. Pour les Ukrainiens.

Le dommage causé par cette politique est considérable pour l’image des Etats-Unis.

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