Anne-Sophie Bailly

Make Europe Great Again? On n’y est pas encore

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

Make America Great Again pourrait-il se transformer en Make Europe Great Again? Les marchés financiers se laissent porter par cette perspective.

Baisses d’impôts, dérégulation maximale, relèvement des droits de douane. Euphoriques à la perspective de ce menu trois services, les marchés économiques et financiers avaient sabré le champagne au lendemain de la victoire de Donald Trump. Quatre mois plus tard, Wall Street et les cercles d’affaires américains ont la gueule de bois. C’est qu’ils commencent à se méfier des décisions à l’emporte-pièce de leur meneur de revue. La saga autour des droits de douane a posé les bases d’une guerre commerciale de nature à handicaper les exportations de l’Oncle Sam. Les incertitudes ne cessent de grandir autour des perspectives de croissance économique, la consommation intérieure est en souffrance et l’inflation poursuit sa trajectoire haussière.

Au premier rang de ceux qui déchantent: les «Magnificent Seven» –Tesla, Google, Microsoft, Nvidia, Apple, Amazon et Meta– qui avaient pourtant versé une confortable obole pour participer à la fête. Leur capitalisation boursière fond comme neige au soleil, car oui les bénéfices attendus de l’intelligence artificielle ont été réévalués de manière plus rationnelle, et oui Tesla souffre de la fin de sa love story avec les consommateurs européens. Mais surtout l’imprévisibilité actuelle pousse les investisseurs à délaisser les valeurs américaines pour se tourner vers des titres européens ou chinois. Au point que le Nasdaq est déjà entré en zone de correction et que les prévisionnistes avancent qu’en cas de récession américaine –une perspective niée par Donald Trump–, le S&P500 pourrait perdre 20% de sa valeur. Avec des conséquences notables sur le pouvoir d’achat de consommateurs US à la confiance déjà en berne.

Make America Great Again pourrait-il se transformer en Make Europe Great Again?

Penser que cette digue boursière, même aujourd’hui ébranlée, constitue le dernier rempart contre le comportement erratique du président Trump serait tentant. Que son passé de businessman devrait l’inciter à cadrer ses propos pour limiter le chaos qui s’annonce sur l’économie américaine. Ce serait faire fi des croyances de cet homme comme de sa vision simpliste des principes économiques. La casse est inévitable.

Programme Rearm Europe de 800 milliards d’euros, plan d’investissement allemand XXL, retour d’une dynamique économique. Euphoriques à la perspective de ce menu trois services, les marchés européens sabrent aujourd’hui le champagne. Les Bourses du Vieux Continent creusent l’écart avec celles d’outre-Atlantique, les industriels se mettent en ordre de bataille. C’est qu’ils commencent à penser que les ratés du Make America Great Again pourraient transformer le slogan en Make Europe Great Again. Le sursaut européen a, de fait, posé les bases ténues d’une Défense commune et offert à chaque Etat davantage de latitude pour investir dans les projets d’armement les plus urgents. Mais les incertitudes sur la concrétisation, le calendrier et les effets retour de ce plan de relance, comme les conséquences d’une récession américaine sur des économies ouvertes telles celles d’Europe demeurent. Les ignorer, c’est la gueule de bois assurée…

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