Anne-Sophie Bailly

Le gouvernement De Wever Ier prouve qu’on en est toujours là: à devoir légiférer pour valoriser l’égalité. C’est désespérant

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

Dans la sphère politique comme dans le monde économique, on en est toujours là. A laisser planer sur les épaules d’une femme qui endosse des responsabilités le doute qu’elle ait été choisie pour remplir un quota davantage que parce qu’elle était la meilleure personne au meilleur endroit.

Elle faisait partie des notes de travail qui avaient fuité pendant les négociations pour la formation de la coalition Arizona, elle concernait le volet égalité des genres du projet d’accord gouvernemental et elle prônait «la suppression des quotas introduits dans les entreprises publiques et cotées en Bourse, dans les conseils d’administration, les comités exécutifs et les postes fédéraux de haut niveau». L’argument sous-tendant ce chapitre s’apparentait à un plaidoyer pour un retour en force de la méritocratie. Après tout, en 2025, le pli devait être pris. Toutes les études publiées sur le sujet avaient convergé vers la même conclusion: la diversité de genres imposée dans les conseils d’administration influençait positivement la performance des organisations concernées. Les quotas, un système temporaire destiné à faire progresser l’égalité homme-femme, avaient fait leur œuvre. Le principe de «la meilleure personne au meilleur endroit» serait le meilleur garant contre toute forme de discrimination.

Mais la proposition déposée par Bart De Wever, alors formateur, n’avait pas passé la rampe des négociations.

Et pourtant, on en est toujours là. A devoir légiférer pour valoriser l’égalité. C’est désespérant.

Et puis, la composition women unfriendly de l’équipe gouvernementale a été dévoilée, prouvant que ce qui devrait être une évidence n’était clairement pas encore ancré à suffisance. Au point qu’au lieu de mettre fin aux quotas, on débat désormais de l’opportunité de les introduire également à l’échelon du conseil des ministres.

Une étude réalisée par l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes vient opportunément apporter un éclairage sur la sous-représentation des premières dans les assemblées électives. Pointant que le plafond de verre auquel se heurtent les candidates à une carrière politique n’est trop souvent abordé que sous le prisme des quotas, alors que d’autres facteurs affectent tout autant leur parcours. Et de citer le manque de soutien des partis politiques à leurs candidates, la persistance de l’entre-soi masculin dans les cercles du pouvoir qui plomberait de facto toute velléité de faire primer la méritocratie dans les choix posés, la répartition des tâches domestiques et parentales encore trop souvent majoritairement à charge des femmes. Et plus globalement un environnement politique et médiatique sexiste, exacerbé par les réseaux sociaux.

Ces constats ne sont pas neufs, ils sont même très régulièrement posés. Dans la sphère politique comme dans le monde économique. Et pourtant, on en est toujours là. A laisser planer sur les épaules d’une femme qui endosse des responsabilités professionnelles ou politiques le doute qu’elle ait été choisie pour remplir un quota davantage que parce qu’elle était la meilleure personne au meilleur endroit. A devoir légiférer pour valoriser l’égalité. C’est désespérant.

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