Anne-Sophie Bailly

Distribution de la presse | Le gouvernement De Croo s’apprête à léser les lecteurs du Vif

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

Le gouvernement De Croo s’apprête à créer une distorsion de concurrence entre la presse quotidienne et magazine. Et de léser les lecteurs du Vif.

Imaginons une table de jeu autour de laquelle les parties s’enchaîneraient. Chacun développerait sa stratégie, offrant une diversité d’approches aux observateurs. Un distributeur s’occuperait d’acheminer les résultats. Un organisateur veillerait au grain. Le système serait bien rodé. Il fonctionnerait sans heurts. Jusqu’au jour où des soupçons d’entente illicite entre un joueur et le distributeur seraient dévoilés au grand jour. Il s’en suivrait un audit, une enquête. Tout serait passé au crible afin de voir qui savait, qui en profitait, qui avait initié la collusion.

L’affaire ferait grand bruit. Au point que le distributeur perdrait sa concession. Que le système jugé obsolète et peu efficient économiquement, serait remplacé par un autre. Plus moderne, mais qui grèverait lourdement un des joueurs de la table, au profit des autres. Le tollé serait immédiat.

C’est pourtant exactement ce que le gouvernement d’Alexander De Croo s’apprête à faire aujourd’hui avec le dossier de la distribution des journaux et des magazines. Depuis les soupçons d’entente illicite entre DPG, éditeur, entre autres, de De Morgen et Het Laatste Nieuws, et bpost le dossier revient sans cesse sur la table du gouvernement qui, en décembre dernier, a finalement décidé de mettre un terme à la concession de 125 millions d’euros de bpost pour assurer la distribution de la presse écrite. Une période de six mois était prévue pour assurer la transition, histoire de laisser le temps aux éditeurs de trouver une alternative. Un crédit d’impôts de 50 millions d’euros devait enfin être dégagé pour compenser le surcoût engendré par ce nouveau système, notamment pour acheminer les magazines et les quotidiens dans les zones les moins densément peuplées.

L’accord était pratiquement signé, jusqu’à ce que poussé dans le dos par les éditeurs de journaux, le gouvernement n’envisage de revoir sa copie. Et de n’accorder ce crédit d’impôts qu’aux journaux, en excluant de cette aide fiscale la presse magazine. Aucune raison objective à cette proposition, puisque depuis des années les offres de la presse quotidienne et périodique se rapprochent au point d’en gommer les usages parmi les lecteurs: une offre digitale au jour le jour et une proposition de contenus magazine en fin de semaine.

Ce sur quoi le gouvernement belge s’apprête à se pencher ce mercredi en kern, ce n’est rien de moins que léser un joueur de la table au détriment des autres. De miner la diversité de la presse. De créer une distorsion de concurrence. Ce qui est de nature à se régler devant la justice.

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