Anne-Sophie Bailly
Face à l’épidémie de burnout, l’urgence est de dépasser les constats
La fulgurance de l’épidémie de burnout oblige au constat de la relative inefficacité des systèmes de prévention.
L’économie du burn out. C’est avec ce titre pour le moins interpellant et un contenu qui l’est tout autant qu’Olivier De Schutter, rapporteur spécial de l’ONU sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté, a mis une nouvelle fois en lumière la propagation fulgurante des problèmes de santé mentale et leur impact sur l’économie. Et de pointer en particulier le cercle vicieux entre pauvreté et burnout ou dépression.
C’est un fait. Cette épidémie silencieuse ne cesse de gagner du terrain et aucune catégorie de travailleurs n’y échappe. Salariés ou indépendants, jeunes diplômés ou quinquas, hommes ou femmes, enseignants, personnel soignant, managers, le burnout frappe toutes les catégories professionnelles au point qu’il tutoie désormais les facteurs physiques dans les causes d’arrêts maladie. Et ce rapport de recommander d’«accorder une plus grande place au bien-être» et de «lutter contre les inégalités». Mais aussi de mieux prendre en compte les risques psychosociaux au travail, pour «dépasser le simple soutien médical à ceux qui font face à la dépression, à l’anxiété».
De fait, l’urgence est réelle. D’ailleurs à côté des contrôles et des sanctions, les entreprises et les pouvoirs publics multiplient les systèmes de prévention et recommandent largement d’identifier les signes avant-coureurs de la maladie, d’apprendre à gérer le stress, de réussir à poser des limites… Mais la fulgurance de l’épidémie oblige au constat de leur relative inefficacité. Notamment parce que ces plans se concentrent essentiellement sur le quoi et la reconnaissance des symptômes, alors que le pourquoi devrait être central dans l’approche. Pourquoi une telle déconnexion entre le travail et son sens?
La réponse à ces questions serait à trouver, selon le rapporteur auprès de l’ONU, dans l’obsession de notre système économique pour la croissance. Ce «climat de compétition et de course à la performance» entraînerait un tel sentiment d’anxiété qu’il expliquerait qu’un nombre croissant de travailleurs ne parviennent plus à répondre à des attentes qu’ils jugent hors de portée ou qu’ils estiment dénuées de sens. D’ailleurs, le recours au PIB comme étalon de la croissance est régulièrement mis en cause, notamment parce qu’il ne prendrait en compte ni des facteurs de cohésion sociale, ni d’impact environnemental. Mais le constat demeure: jusqu’ici, il reste l’alpha et l’omega de toutes les économies, le graal des bilans nationaux, la boussole des orientations politiques.
La publication de ce rapport à ceci de salutaire: il va falloir dépasser les constats. Ceux de l’explosion des cas. Ceux de la limite des systèmes de prévention. Ceux de l’inefficience d’une remise hâtive au travail .
Car une économie du burnout n’est ni souhaitable pour l’humain, ni tenable pour les entreprises ou les pouvoirs publics.
La fulgurance de l’épidémie de burnout oblige au constat de la relative inefficacité des systèmes de prévention.
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