Pierre Havaux
Vent du Nord de Pierre Havaux : comment l’école flamande est en train de sombrer (chronique)
Pénurie dramatique d’enseignants, performances scolaires des élèves en recul constant, examens supprimés faute de profs: l’enseignement flamand est en crise. Face à la débâcle, le ministre Ben Weyts (N-VA) appelle à revenir aux fondamentaux: l’apprentissage des maths et du néerlandais.
Franchement pas brillant, le bilan. Sondés sur leurs performances en maths, 6 163 Flamands de sixième primaire – moment charnière dans le cursus scolaire – issus de 230 écoles ont étalé leurs lacunes. Multiplications, calcul de superficie ou de pourcentage et autres délices de la discipline: les écoliers ont tout sauf convaincu. Septante-cinq pour cent d’entre eux ont décroché le minimum requis dans à peine cinq épreuves sur vingt-et-une, la moitié seulement y est parvenue dans six tests.
Ce n’est plus mauvais, cela devient très mauvais. 2009, 2016, 2022, le niveau des performances scolaires résiste de plus en plus mal aux évaluations successives. Le recul est jugé affolant. «Alarmant», admet le ministre de l’Enseignement, Ben Weyts (N-VA), convoqué au tableau noir par les parlementaires et prié de présenter les doigts pour le coup de règle réglementaire.
Que les écoles du primaire se reconcentrent sur leur cœur de métier qui est de donner cours!
Et dire que l’enseignement a fait longtemps la fierté de la Flandre. Il pouvait s’enorgueillir de figurer parmi les très bons élèves de la classe internationale régulièrement cotée par le programme de mesure des systèmes éducatifs Pisa, toujours loin devant son alter ego francophone à la peine en lecture, en maths, en sciences. Du passé tout cela: l’école flamande file du mauvais coton, les compétences en sciences, en lecture ou en mathématiques de celles et ceux qui passent entre ses mains fléchissent dangereusement.
Le corona est passé par là mais il n’excuse pas tout, convient Ben Weyts. Le déclin qualitatif est plus ancien et ses causes multiples. «Et le fond n’est pas encore atteint», prédit un expert.
Les forces vives au nord du pays appellent à siffler la fin de la récré. Accusé de passivité, Ben Weyts se défend de ne pas avoir de plan: que les écoles du primaire se reconcentrent donc sur leur cœur de métier qui est, après tout, de donner cours. On lui jette à la figure le phénomène inquiétant de ces mioches toujours plus nombreux à se rendre en classe, la boîte à tartines désespérément vide ou chichement garnie? Sans le nier, le ministre considère que cette source de tracas ne doit pas relever du core business de l’école, laquelle ne peut accueillir toute la misère du monde et encore moins la gérer. Son boulot, c’est d’en revenir à l’apprentissage des fondamentaux que sont les mathématiques et le néerlandais, les deux mamelles d’une jeunesse à remettre sur la voie de la réussite.
Encore faut-il trouver les bras qui manquent cruellement en classe pour leur donner le plein rendement. La pénurie de profs est si criante qu’elle inspire les tableaux apocalyptiques de «ces enfants privés depuis septembre de professeur de mathématiques ou de néerlandais, qui végètent par centaines au réfectoire ou peuvent rentrer chez eux dès deux heures et demie parce qu’il n’y a personne en classe», rappelle Hannelore Goeman, députée Vooruit dans l’opposition. Cette élue n’apprend rien au ministre occupé à multiplier les solutions de fortune dans l’espoir de rendre le métier de prof plus attractif et d’enrayer l’hémorragie sans précédent d’enseignants.
Mais Ben Weyts ne veut oublier personne dans le difficile combat pour redresser la pente. Avis aux parents qui ne s’en font toujours pas une religion: l’avenir appartient aux jeunes qui parleront le néerlandais, y compris à la maison.
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