Les plans B des adolescents transgenres (chronique)
Transcending Self, de l’Américaine Annie Tritt, met en lumière les parcours d’enfants et adolescents transgenres.
Colette, 12 ans, d’Oakland, dit qu’avec son frère, «quand on s’amusait aux châteaux et aux Tortues Ninja, j’étais toujours la fille. Je me disais que j’étais juste moi.» Parmi ses plus grands défis, il y a «les leggings», «ne pas pouvoir faire partie de l’équipe de natation parce que les maillots sont trop serrés» et «vouloir un corps qui me fasse me sentir belle». Elle espère «recevoir des œstrogènes, devenir une fille à part entière, puis une artiste célèbre».
Zak, même âge, de l’île de Wight, a «eu envie d’être un garçon dès 5 ou 6 ans. Je me sentais piégé dans les vêtements de fille». Il estime «injuste de nous demander de vivre dans le mauvais corps. Je le masque.» En fait, «comme une faute d’orthographe qui change totalement le sens d’un mot, j’ai un cerveau de garçon dans un corps de fille».
Quand Azaj, 17 ans, d’Oakland, a découvert «le mot « transgenre »», elle a «enfin eu l’impression de savoir qui j’étais. Je me suis sentie complète, la confusion a disparu.» Pour parvenir au coming out, ça «a été dur, mais mes amis m’ont donné du courage, et plus rien ne m’a arrêtée». Maintenant, «je me réveille avec le sourire. Pas parce que ma vie est géniale, mais parce que j’aime qui je suis.»
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Un jour, la mère de JJ, 19 ans, de Dublin, «avait acheté des magazines. Je suis tombé sur un article où il y avait la photo d’un homme avec d’autres images de lui en fille lorsqu’il était bébé. C’est là que j’ai compris. Je me suis dit: « OK, il y a un moyen de sortir de ce que je traverse. » Je me suis senti plein d’espoir: il y avait un plan B, je pourrais grandir et ressembler à mon père, à mes oncles. A la remise de diplôme au lycée, j’ai mis des vêtements d’homme. Je me suis senti bien. Les gens m’ont dit: « Tu es magnifique. Ouais, c’est tout toi, tu ne pouvais pas porter autre chose. » Le lendemain, j’ai fait mon vrai coming out, ça semblait si naturel. Des gens pleuraient, tendaient la main pour me serrer le bras.»
Je me suis dit: « OK, il y a un moyen de sortir de ce que je traverse. »
Dans Transcending Self, le prodigieux travail de l’ Américaine Annie Tritt, consacré aux enfants et ados transgenres et que 6 mois. La revue du photojournalisme met en avant dans son numéro automne 2022-hiver 2023, il y a encore les témoignages de Rebekah (11 ans, New Jersey), Noah (8 ans, New York), Ollie (18 ans, Liverpool), Lilly (12 ans, Californie), Sky (15 ans, Allemagne) et bien d’autres. Leur récit de ce qui est déjà plus qu’une seule vie, et leur photo. Dans 6 mois, la sociologue Yaëlle Amsellem-Mainguy évoque «une génération de transition». Qui «devient porte-parole d’une cause, d’une légitimité à ne pas se retrouver dans des cases attendues». Qui s’engage, au nom du «il faut que je dise aux autres que c’est possible pour eux» ou pour elles. Qui «se donne les moyens de bousculer les choses».
Avec une force, des actes et des mots éblouissants. Faisant des plans B, traditionnels champs de repli, celui de toutes les victoires.
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