Juliette Debruxelles

Les joies des ébats à la campagne

Restés dans les pratiques d’autrefois, les ébats à la campagne ont du bon, eux aussi.

L’odeur lourde, dense et tiède de la campagne vous enveloppe depuis que vous avez décidé de poser vos bagages dans cette charmante bâtisse ardennaise. Entre randonnées et visites à la ferme pour vous approvisionner en lait et œufs frais, vos vacances se passent à merveille et votre corps n’a jamais été en meilleure santé. Ce retour à la terre fait renaître votre envie d’être au monde et de libérer vos instincts. C’est là, au détour d’une clairière, que vous repérez les ballots de paille fraîchement pressés et que d’un œil coquin, vous proposez à votre partenaire un quickie (ou rapport sexuel bref et spontané) champêtre.

Vous finirez les fesses griffées, les genoux labourés, la dermatite enflammée… mais quel souvenir!

A la faveur de matelas douillets et d’endroits insolites plus aseptisés, les ébats dans la paille ont perdu de leur attrait. Les granges à foin furent pourtant le lieu de rendez-vous privilégié des amants d’autres temps, jusqu’à ce qu’allergies et crainte des mulots fassent tomber la pratique en désuétude. Oui, la paille pique et le foin fouette. Oui, les acariens et parasites vont adorer les endroits humides de votre intimité. Et oui, vous finirez les fesses griffées, les genoux labourés et la dermatite enflammée… mais quel souvenir! Si d’aventure une bonne drache venait à vous surprendre, c’est tout en vêtements trempés et halètements bestiaux que vous poursuivriez votre élan. Quid de la chèvre qui vous surprend? Ignorez-la. Depuis 2007, la loi belge interdit expressément la zoophilie en vertu de la protection des animaux, quels qu’ils soient. Et ce n’est pas parce que certains biais inconscients demeurent à propos des campagnes – portés par un imaginaire ou une littérature dépassés et insultants – qu’il faut se laisser troubler. Considéré comme un pionnier de la sexologie, Alfred Charles Kinsey rapportait ceci dans les années 1950: «Dans maints cas, le jeune campagnard s’initie aux rapports animaux parce qu’il sait que ses compagnons se livrent à une activité semblable. Ceci est particulièrement vrai dans les régions de l’ouest des Etats-Unis où les adultes, aussi bien que les adolescents, pratiquent assez souvent (fréquence d’environ 40% des hommes) de tels rapports sexuels qui peuvent être le sujet de conversations fréquentes.» Une insulte faite aux agriculteurs d’ici et d’aujourd’hui, aux héros qui tiennent à bout de bras et de passion de lourdes exploitations et qui ont autre chose à faire que d’enfiler des poules…

Vous voilà distrait! Concentrez-vous sur votre partenaire et chassez ces pensées impures pour les remplacer par des scènes inspirantes tirées des meilleurs films traitant de la vie rurale et des plaisirs de la chair (Alexandre le bienheureux, La Fille de Ryan, La Veuve Couderc, Lady Chatterley, Les Moissons du ciel…). Vous voilà reparti telle une moissonneuse décidée à labourer le terrain offert, au rythme des bêlements. Fourbu, les ongles terreux et le cheveu en épis, il vous restera à traverser le champ à la manière d’un conquérant. La nature vous a rendu à vous. Besoin d’inspiration pour parfaire votre nouvelle identité de farmer au sang chaud? Connectez-vous aux comptes Instagram @cowboyconnection présentant un catalogue de mâles tout en chapeau et en abdos. Rencontrez @roblangphotography dont la plupart des œuvres présentent des types à moitié nus accrochés à leur lasso. Souvenez-vous tout de même que les chaps (ces drôles de «pantalons» en cuir tenus par une ceinture et protégeant les jambes et les hanches… mais pas la zone génitale) sont réservés aux cowboys dans la vraie vie au quotidien et importables dans les transports en commun.

Juliette Debruxelles est éditorialiste et raconteuse d’histoires du temps présent.

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