Benjamin Hermann

Le lieu commun de Benjamin Hermann | Le temps presse-t-il vraiment, au fédéral?

Benjamin Hermann Journaliste au Vif

Bart De Wever (N-VA), le formateur, n’a cessé d’insister sur sa volonté d’avancer prestement dans les négociations au fédéral. Il n’a peut-être pas tort, ce qui ne signifie pas qu’il faille aboutir à tout prix dans un mois.

Tempus fugit, hora volant. Le temps passe, les heures s’envolent. Bart De Wever n’est jamais avare d’une formule en latin. Celle-ci a peut-être occupé son esprit, ces derniers jours, pressé qu’il était d’obtenir un assentiment des quatre autres formations de l’hypothétique coalition Arizona.

Le temps presse, parce qu’il a lui-même fixé l’échéance du 20 septembre pour aboutir. Tout le monde a noté cette date et estime, à raison peut-être, qu’il serait convenable de disposer d’un gouvernement fédéral à ce moment, pas tout à fait choisi au hasard. La Belgique sera alors tenue d’envoyer son plan budgétaire à la Commission européenne, alors qu’une procédure de déficit excessif a été ouverte à son encontre. Techniquement, rien n’oblige le fédéral à disposer d’un gouvernement de plein exercice pour remettre sa copie. Politiquement, c’est une autre histoire.

L’impression d’urgence est renforcée par une autre échéance, celle des élections communales du 13 octobre. A peu près tous les intervenants prennent part à ce scrutin, avec des ambitions tant pour leur parti que personnelles. Est-il préférable de se hâter ou de jouer la montre? Les cinq partis, victorieux lors du dernier scrutin, cherchent-ils plutôt à prolonger cette séquence positive ou craignent-ils de devoir avaler quelques couleuvres? Attendent-ils d’en savoir plus sur leur sort électoral ou préfèrent-ils se targuer d’un dénouement au fédéral devant l’électeur local?

La sensation menaçante est accentuée, encore, par cette idée d’un alignement de planètes. Jamais, dans l’histoire politique récente, une configuration aussi simple n’est sortie des urnes. Cinq partis, une coalition miroir, point barre. En Wallonie et en Fédération Wallonie-Bruxelles, tout fut d’ailleurs plié en un mois.

Le récit est donc celui d’un monde politique qui doit agir avec diligence, parce que le scénario est limpide et le casting, implacable. L’idée est tellement réconfortante que le moindre grain de sable devient source d’anxiété. Tempus fugit, bon sang.

Pour apaiser ce tourment, on cherchera à se souvenir qu’en Belgique, la durée acceptable pour la formation d’un gouvernement fédéral est une notion très élastique. Et qu’on est encore loin des records autrefois établis.

«Une coalition PS–N-VA reste la piste privilégiée au fédéral», titrait un quotidien de référence le 22 août 2019, quelques semaines après les élections. Tous les regards se tournaient vers le PS d’Elio Di Rupo. Il lui était instamment suggéré d’envisager de s’allier aux nationalistes. Didier Reynders et Johan Vande Lanotte étaient informateurs royaux, Charles Michel était Premier ministre et président du MR, les écologistes n’étaient même pas évoqués.

Quelques jours plus tôt, un autre quotidien de référence titrait «Une solution en Flandre, une impasse au fédéral», faisant état du spectre d’élections anticipées qui se profilait. Il allait encore falloir attendre presque quatorze mois pour que la Vivaldi voie le jour, après l’arrivée d’une Première ministre, quelques changements de présidents et la survenance d’une pandémie.

De ce point de vue, quelle que soit la tournure des discussions d’ici au 20 septembre, chacun pourra trouver un peu de consolation dans ce coup d’œil dans le rétroviseur.

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