Benjamin Hermann
Le lieu commun de Benjamin Hermann | De l’extrême droite au MR: changer d’avis si rapidement, c’est épastrouillant
L’arrivée d’anciens militants d’extrême droite au MR a suscité quelques remous. Il faut reconnaitre que leur conversion aux valeurs démocratiques fut pour le moins rapide.
Cela aura donc été l’affaire par laquelle l’éclat du président du MR aura quelque peu pâli. Du moins, elle aura fait naître quelques expressions contradictoires en interne, depuis la très populaire Sophie Wilmès jusqu’à la cheffe de file des libéraux liégeois, Diana Nikolic, en passant par la fédération liégeoise des étudiants libéraux. Sans oublier la fille de Jean Gol, qui a prié Georges-Louis Bouchez de cesser de convoquer la mémoire de son père pour justifier sa décision.
A l’origine de la polémique, l’arrivée au MR de jeunes hommes issus de l’extrême droite, présents aux vœux du parti. Le premier fut militant d’extrême droite du côté de Mouscron. Le deuxième, qui a bien confirmé son allégeance au parti libéral, était candidat suppléant Chez nous aux élections régionales de juin, dans la circonscription de Verviers. Le troisième n’était pas un second couteau: il occupait la tête de liste aux dernières élections fédérales, dans la circonscription de Liège.
L’argumentaire de Georges-Louis Bouchez, largement partagé, est le suivant: chacun a droit à une seconde chance, après s’être égaré. Pour peu qu’elles embrassent pleinement les valeurs du MR, ces recrues doivent pouvoir y militer. C’est essentiellement sur la méthode que le Montois a subi des critiques, à savoir un manque de concertation au sein du parti, singulièrement de ses instances locales, à propos de transfuges au profil aussi «délicat».
Tout démocrate préférera voir un jeune adulte opter pour la militance dans un parti démocratique plutôt qu’au sein de l’extrême droite. Mais feindre qu’une reconversion pleine et entière de ces trois personnes puisse avoir eu lieu en quelques mois à peine confine soit à une forme de cynisme, soit à un brin de crédulité. A moins que l’hypothèse suivante, qui n’est pas à exclure intellectuellement, se confirme: elles sont toutes dotées d’une capacité de remise en question épastrouillante.
Un autre candidat avait spectaculairement viré sa cuti, en mars 2024: un ancien élu PTB bruxellois rejoignait le MR, lavant désormais plus bleu que bleu. Trois mois plus tard, ce transfuge s’est révélé être un flop dans les urnes.
Cette fois, il semble bien difficile de comprendre, au-delà du geste de pure magnanimité, ce que le MR peut bien y gagner. Il n’y a pas d’élections à l’horizon, ni a priori de possibilité pour eux d’exister politiquement. Ils ne représentent qu’une part infime des suffrages exprimés dans leurs circonscriptions respectives. La disparition de quelques listes de droite radicale, de type Listes Destexhe ou Parti populaire, a probablement contribué aux succès récents du MR. Il n’empêche que l’extrême droite (structurée politiquement) est pratiquement inexistante en Belgique francophone, pour une série de raisons qui échappent grandement au seul parti libéral. Il est donc matériellement bien difficile de la «siphonner».
On se rabattra alors sur l’idée que quelques imbéciles ont changé d’avis. Ce qui, selon l’adage, implique qu’ils ne sont plus censés en être, des imbéciles. A moins que leur arrivée dans le champ démocratique n’en dise autant sur eux que sur les dispositions de leur hôte à les accueillir aussi prestement.
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