Juliette Debruxelles

L’anarchie relationnelle, une conception «libertaire» des relations amoureuses et sexuelles

Dans les modèles en constante évolution des relations amoureuses et sexuelles, l’anarchie relationnelle vient exploser les dictatures. Ni dieu, ni maître, ni hiérarchie. Ici, pas de distinction formelle entre partenaires sexuels, romantiques, intimes ou platoniques. Si le polyamour implique plusieurs relations amoureuses simultanées, mais distinctes, l’anarchie relationnelle, elle, prône l’égalité absolue entre tous les types de connexions. Une définition confirmée par la sociologue Elisabeth Sheff dans The Polyamorists Next Door. Chaque lien profond est donc unique et évolue sans contrainte sociale normée ni étiquette. Amoureux, amireux, en relation libre ou exclusive, les «AR» (comme on les appelle dans le game) s’en fichent.
Respect mutuel, communication ouverte et refus de sentiment de «possession» de l’autre font la révolution dans la connectivité émotionnelle et sexuelle.


Parfait pour les personnes qui se sentent limitées par le modèle hétéropatriarcal qui régit encore la vision du couple, de l’acte sexuel, de la monogamie… Auréolées de liberté, les relations AR se veulent des espaces de réelle authenticité et de déconstruction des notions de jalousie, de compromis et de possessivité, en mettant l’accent sur la communication et le consentement.
Dans la brochure «Le Petit Manuel d’éducation à l’anarchie relationnelle» d’Andie Nordgren (à l’origine du «mouvement»), on peut lire: «L’amour est abondant et chaque relation est unique. L’anarchie relationnelle questionne l’idée que l’amour est une ressource limitée qui ne peut être réel que s’il est réduit à un couple. Tu as la capacité d’aimer plus d’une personne. […] Une personne qui fait partie de ta vie n’a pas besoin d’être désignée « partenaire principal » pour que la relation soit réelle.» Ou encore: «L’anarchie relationnelle, ce n’est pas ne jamais s’engager, c’est créer tes propres engagements avec les personnes autour de toi, et les libérer de normes […] comme élever des enfants ou emménager ensemble…»


Des normes qu’il n’est pas nouveau de secouer, il faut l’avouer. Les philosophes de l’Antiquité, comme les cyniques et les stoïciens, les remettaient déjà en question. Les communautés utopiques du XIXe siècle (comme l’association Oneida), elles, expérimentaient des formes de vie communautaire et de relations amoureuses qui défiaient les conventions de l’époque. La différence, c’est qu’aujourd’hui, dans une société où les structures traditionnelles sont de plus en plus contestées et où un basculement social semble gronder, l’anarchie relationnelle apparaît comme une réponse possiblement collective, accessible, cohérente et raisonnable à l’état du monde. Il s’agirait d’un refuge où l’amour inconditionnel et multiple saurait rassurer celles et ceux qui ne peuvent plus se contenter d’une source unique – et donc fragile – d’affection.
Alors que la confusion règne dans les esprits, l’anarchie relationnelle pourrait être une perspective rafraîchissante et libératrice pour les phobiques de l’engagement et les traumatisés de l’abandon. Comme sa grande sœur, l’anarchie tout court, elle ne viserait pas le chaos, mais une harmonie résultant de l’abolition de toutes les formes de l’exploitation de l’humain par l’humain. «L’ordre moins le pouvoir», qu’ils disaient…

Chaque lien évolue sans contrainte sociale normée ni étiquette.

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