Mélanie Geelkens
La sacrée paire de Mélanie Geelkens | Mythes et autres idées reçues sur le vieillissement du vagin
Le vagin vieillit-il mal ? Pas plus qu’un pénis. Pourtant, les idées reçues à son égard sont nombreuses.
C’est un vieux meme (datant de la présidentielle de 2016!) qui circule toujours sur le World Wide Web: une photo d’Hillary Clinton et de l’actrice américaine Chloë Grace Moretz tenant chacune un donut. Celui de la jeune femme s’avère tout à fait classique – un petit trou au milieu – tandis que celui de l’ex-rivale électorale de Donald Trump affiche une percée tellement large qu’on dirait un bracelet.
Une image, en son temps, trafiquée (les deux cercles étaient parfaitement similaires lorsque la comédienne l’avait publiée sur son compte Instagram) mais puisqu’il ne faut jamais laisser la vérité gâcher un bon cliché, elle poursuit son petit bonhomme de chemin virtuel, agrémentée de légendes diverses tournant toutes autour de la taille desdits trous. Sous-entendu: le vagin de la jeune est lisse et étroit, celui de la vieille est béant et flétri.
Ainsi vieillirait donc le sexe féminin, selon certaines croyances: mal. D’autant plus si la détentrice a multiplié les partenaires sexuels ; autre cliché abondamment partagé en commentaire de ce meme. Tout cela est bien évidemment grotesque: le vagin d’une femme ayant couché une seule fois avec cent hommes n’est, en bout de course, absolument pas différent de celui de celle ayant copulé cent fois avec un seul homme.
Le vagin d’une femme ayant couché une seule fois avec cent hommes n’est, en bout de course, absolument pas différent de celui de celle ayant copulé cent fois avec un seul homme.
Où est-il, le meme présentant deux mecs d’âges différents arborant chacun, disons un chicon, l’un flétri à force d’avoir trempé dans trop de sauces, l’autre encore parfaitement alléchant et consommable? Les donuts Clinton-Moretz, cette énième illustration d’une tenace idée reçue: l’homme qui multiplie les partenaires sexuels, un Casanova ; la femme qui fait de même, une salope. Avachie, en plus.
Même au temps de Tinder et autres applications de rencontre, censées avoir libéré les mœurs. «Les rencontres en ligne ont rendu le sexe beaucoup plus accessible», affirmait récemment la psychologue allemande Johanna Degen dans Der Spiegel. Ajoutant que le cercle des connaissances possibles s’était aussi géographiquement élargi. Au bénéfice de celles qui voudraient s’envoyer en l’air en toute discrétion, sans craindre que les voisins ne remarquent chaque week-end une voiture différente garée devant la maison.
Copuler, oui, mais ne surtout pas l’afficher. Sous peine d’être déclassée sur le «marché de la baisabilité» (copyright la réalisatrice Ovidie). Comme ce type soudainement moins emballé à l’idée de dîner avec une fille après avoir appris qu’elle avait déjà eu un sexfriend (pour les boomers: une amitié basée sur le cul, sans engagement amoureux). Ou cet autre à la recherche de relations charnelles uniquement, mais avec une partenaire exclusive, alors que lui-même en culbute déjà trois simultanément.
Le célèbre mythe de la madone et de la putain qui, dans ce domaine comme dans tant d’autres, contraint les femmes à être à la fois tout et son contraire. Prudes mais désirables, inaccessibles mais disponibles, fraîches mais expérimentées. Défoncées mais bien serrées. En témoignent tous ces nouveaux outils censés les aider à (re)muscler leur périnée, ces sports à la mode – yoga, pilates… – qui promettent de travailler cette zone, ou cette crainte courante de devenir trop lâches après un accouchement par voie basse, quitte à demander une césarienne de confort. Le donut trop large, cette nouvelle infamie à laquelle il faudrait à tout prix remédier. Mais, au fond: si le problème, c’était surtout le chicon?
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