Mélanie Geelkens
La sacrée paire de Mélanie Geelkens: faites comme Eddy Demarez, reconnaissez vos erreurs sexistes (chronique)
Eddy Demarez, le journaliste sportif qui avait insulté les Belgian Cats en pensant que son micro était éteint, est revenu à l’écran. Tout repentant. Il semble avoir appris de son erreur sexiste. Pour du vrai ?
«Comment était-ce, de discuter avec les Cats les yeux dans les yeux, juste après?» Eddy Demarez répond d’un bref «émouvant». Face à lui, la journaliste insiste: «Personnellement, qu’est-ce que ça vous a apporté?» Et là, il pleure. Presque. A l’intérieur, comme quand les sanglots voudraient se déverser mais ne se trahissent que par un tremblement de voix et des yeux humides. Le Flamand a soit raté sa vocation de comédien, soit trouvé le chemin de la repentance.
Sans doute que le commentateur sportif de la chaîne Sporza n’y serait jamais parvenu s’il n’avait pas oublié d’éteindre son micro, le 7 août 2021. Il pensait déconner entre potes. Ah! ah! ah! , regarde cette joueuse qui ressemble «à une montagne», oh! oh! oh! et celle-là, «on dirait un homme», «toutes des lesbiennes de toute façon». Les Belgian Cats, les joueuses de l’équipe nationale de basket, venaient juste d’être médaillées olympiques, mais bon, leurs physiques étaient apparemment plus intéressants que leur exploit sportif.
Sauf que tout le monde l’avait entendu. Sauf que les réseaux sociaux y avaient déniché leur indignation du moment. Sauf qu’il avait finalement été suspendu. Mais après dix mois de placard, le journaliste est revenu à l’antenne, le 6 mai. La VRT, son employeur, y avait mis les formes: interview d’excuses, création d’un groupe de travail «Femmes et diversité dans le sport». «Je ne suis pas naïf, a-t-il commenté. Je sais que certains diront toujours: “Vous avez dit ça à l’époque et je ne change pas d’avis sur vous.” C’est dommage. Je ne peux que faire de mon mieux pour créer quelque chose de bon à partir de mon erreur.»
Pas d’angoisse, Eddy. Tout est pardonné. Reconnaître sa misogynie est un phénomène tellement rare qu’il ne peut être, ici, que positivement souligné. En réalité, l’idée de cette présente chronique sur les repentants traînait dans un tiroir mental depuis de nombreux mois. Amis, amant, parents, connaissances, followers avaient ainsi été questionnés: «Avez-vous eu, un jour, un comportement sexiste que vous regrettez, à bien y réfléchir?»
Et il n’y avait eu que cet (excellent) collègue pour répondre: «En fait, oui.» Un billet d’humeur, rédigé fort lointainement sur la première page d’un quotidien, dans lequel il s’extasiait quant à la bouche d’une autrice récompensée par un prestigieux prix littéraire. Des corps avant d’être des cerveaux, épisode 164 212. Rien que d’y repenser le remplissait d’une patriarcale honte.
Mais tous les autres? «Non, rien», «je ne vois pas». Mais si, mais si, enfin. Il y en a forcément plein. Des commentaires peu reluisants sur le physique d’unetelle… Des comportements peu glorieux envers une autre. Des discriminations (salariales, ménagères, sociales…) finalement confortables pour ceux qui en bénéficient. Tout cela s’appelle «la vie». Inégale, patriarcale, sexiste. La vie quotidienne, tout simplement.
Mais il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. «Les inégalités de genre, c’est comme un iceberg, a dit un jour une professeure de l’ULiège. Une fois qu’on les a aperçues, on ne peut plus en détourner le regard.» C’est la fameuse parabole des pilules bleue et rouge, chère aux féministes. Dans Matrix, Neo se voit offrir le choix entre deux comprimés: s’il avale le rouge, il sera plongé dans la réalité et ne verra plus jamais le monde comme avant. Mais s’il opte pour le bleu, il restera plongé dans un monde aussi illusoire que confortable. Neo choisit finalement le rouge et son combat dans la matrice commence, sans qu’il ne puisse jamais revenir en arrière. Comme Eddy Demarez?
Welcome, Karine Jean-Pierre
La Maison-Blanche accueille, ce 13 mai, sa première porte-parole noire et ouvertement homosexuelle: Karine Jean-Pierre (par ailleurs chargée de cours à l’université de Columbia). Une nomination qualifiée de «symbolique», elle qui déclarait, en 2018, être «tout ce que Donald Trump déteste». Selon le président américain, Joe Biden, qui l’a nommée pour succéder à Jen Psaki, elle se démarque par son expérience, son talent et son honnêteté.
La phrase
«Quand j’y repense, je suis mort de honte.»
Dans une émission télévisée néerlandaise, fin avril, le journaliste sportif Johan Derksen, 73 ans, a raconté – face à des interlocuteurs hilares – un soir de sortie dans son jeune temps avec un joueur de foot et deux femmes. Ivres, l’une d’elles s’était endormie sur un canapé. «Il y avait une grosse bougie. Nous l’avons introduite, précise-t-il en mimant avec sa main avoir placé l’objet dans le sexe de la femme, et nous sommes partis […] Aujourd’hui, cela serait passible d’une peine de prison.» Sans blague. Ça s’appelle un viol, non?
L’Espagne cesse de jouer aux stéréotypes
Plus question de présenter des dînettes utilisées par des filles et des camions de pompiers par des garçons. En Espagne, les stéréotypes de genre seront interdits dans les publicités pour jouets à partir du 1er décembre prochain. Ce «code d’autorégulation» comprendra 64 normes éthiques afin d’éviter d’attribuer systématiquement un jouet à un genre (et les rôles sexistes qui y sont liés), mais aussi de diversifier les couleurs afin d’en finir avec le rose versus le bleu.
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