Mélanie Geelkens

La sacrée paire de Mélanie Geelkens | « Beaucoup d’hommes n’aiment pas leur femme, ils aiment juste le sexe gratuit »

Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

C’est l’histoire d’un homme qui va chez son généraliste. Pour se plaindre. «Vous vous rendez compte? Elle n’a plus envie. J’ai même plus droit à des caresses de dépannage.» Une chimiothérapie pour un cancer du sein, accompagnée d’une ménopause précoce, c’est sûr que ça doit laisser peu d’énergie pour polir le chinois, même du bout des doigts.

C’est une histoire vraie, racontée sur son compte Instagram par le docteur français et romancier Baptiste Beaulieu. «Après dix ans de médecine générale, des milliers de consultations, après avoir été au cœur de milliers de familles, je crois profondément que beaucoup d’hommes n’aiment pas leur femme», écrit-il (pour une fois que ce n’est pas une meuf qui l’affirme). «Ils aiment le sexe gratuit qu’une vie à deux procure, poursuit-il. Ils aiment avoir quelqu’un qui gère les lessives, le linge, la vaisselle, qui fait les courses, à manger, baigne le petit, s’occupe des devoirs et des activités parascolaires. Surtout, ils s’illusionnent que tout cela s’appelle l’amour parce que ça les arrange bien au quotidien.» Pour info, plus de 225 990 personnes ont liké son post ; signe que ça doit pas mal résonner.

Une femme a six fois plus de risque qu’un homme d’être quittée après la découverte d’un cancer.

Or, il arrive parfois que cet «amour» soit perturbé pour raison de santé. «Moi, ce que je veux savoir, c’est pourquoi, si les hommes aiment vraiment leur femme, ils la quittent quand elle tombe malade, c’est-à-dire quand ils ne peuvent plus avoir le sexe gratuit? Le ménage gratuit? Les lessives gratuites?» Baptiste Beaulieu ne sort pas ça «from his ass», comme il dit. Quelques études ont documenté le phénomène: quand la maladie arrive, souvent les mecs se barrent.

Ainsi, cette analyse de la Haute autorité de santé, en France, sur «Les femmes et la santé des autres» (2013) souligne que «les chances d’avoir un conjoint auprès de soi lorsqu’on a 75 ans ou plus et qu’on est en situation d’incapacité sont bien plus élevées pour les hommes que pour les femmes: 60% contre 20%». Une autre étude, américaine cette fois, publiée en 2017 dans la revue Cancer et menée durant deux ans, révèle qu’une femme a six fois plus de risque qu’un homme d’être quittée après la découverte d’un cancer ou d’une sclérose en plaques. Le taux de séparation ou de divorce s’élevait à 20,8% lorsque la maladie touchait la femme, contre… 2,9% lorsqu’elle concernait l’homme.

Selon les auteures de l’étude, la baisse de la libido et l’appauvrissement de la vie sexuelle étaient des motifs régulièrement évoqués. «La seule chose qui l’obsédait, c’était [de savoir] si, après ma mastectomie du sein droit, j’allais rapidement me faire opérer pour retrouver une poitrine normale», racontait Alyssa dans Le Parisien, en 2022. «“Tu me fais la gueule? Pourquoi tu ne veux plus rien faire avec moi?” Il ne comprenait pas: j’étais fatiguée. Evidemment, ma libido était comme mon moral: au fond des chaussettes», ajoutait Gwenaëlle. Myriam, elle, raconte comment son époux a pris une maîtresse pour l’aider à oublier qu’elle luttait contre son cancer du sein. «Il avait besoin d’un peu de frivolité dans cette “ambiance de mort” pour me revenir plus combattant. Je n’invente rien. J’ai failli m’étrangler.»

«Je promets de t’aimer pour le meilleur, pour le pire, en état de maladie ou en bonne santé, jusqu’à ce que la mort nous sépare», stipule le sacrement du mariage. Apparemment, faudrait y ajouter un addendum: «… en état de maladie (à condition qu’elle continue à baiser gratuit)».

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