Mélanie Geelkens
La sacrée paire de Mélanie Geelkens | Affaire Depardieu: « Il suffirait de reconnaître que ça pue, Gégé »
L’affaire Depardieu agite la France, depuis plusieurs semaines. L’acteur, accusé de viols et agressions sexuelles, a été défendu à la télévision par Emmanuel Macron. Signe que l’opinion publique se fiche des violences faites aux femmes ?
Il a de bons conseillers, Manu. Qui peut croire qu’un président de la République se pointe dans un talkshow – qui sera regardé par plus de 3,3 millions de téléspectateurs – sans avoir abondamment préparé l’émission avec une horde de spin doctors, qui plus est concernant un sujet qu’il a lui-même voulu aborder (à en croire les coulisses racontées par Le Monde) ? Il n’a pas dérapé, le Manu. Il l’a sciemment défendu, Gégé. Un « immense acteur », pas de chasse aux sorcières, pas touche à sa Légion, gare aux images truquées, « il rend fière la France », blablabla. (Etonnant qu’un homme visiblement porté sur la bouteille, exilé fiscal, ami de dictateurs et dont le dernier fait cinématographique majeur soit d’avoir incarné Obélix puisse à ce point enorgueillir une nation).
Mais les conseillers de Manu, ou lui, ou les deux, ont évidemment pigé que tout le monde s’en cale, des violences sexuelles, hormis quelques harpies féministes qui, de toute façon, ne votent plus pour lui depuis qu’elles ont compris que « le droit des femmes grande cause du quinquennat » n’était qu’un creux slogan. Contrairement aux anciens. Ceux qui ont adoré Les Valseuses, Cyrano, Mon père ce héros et qui – sociétés vieillissantes obligent – constituent le gros du corps électoral (remember le Brexit).
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Ceux-là, il faut politiquement les caresser dans le sens du poil en clamant que c’est pas grave si Gégé, lui, aime peut-être caresser des culs sans y avoir été invité. Car ceux-là n’aiment pas les « wokistes », les temps qui changent. Peut-être ont-ils dû aussi, fut un temps, laisser dégueulassement traîner quelques mains ou à tout le moins trouver la « blague » du clito contre la selle désopilante.
Leur donner de l’ « immense acteur », donc. Comme si c’était ça qui lui était reproché, au Gégé ! Avis à tous ceux qui volent à son secours à coups de « c’est un monument » et de « quel incroyable artiste » : personne ne l’accuse d’avoir foiré son dernier long-métrage, hein. Mais de viol et agression sexuelle (deux plaintes ont été déposées, l’une d’entre elle a engendré sa mise en examen).
Ah mais il faudrait « distinguer l’homme de son œuvre » ! Ok, mais ça s’applique à tout le monde, alors. Ne blâmons pas cet enseignant qui a tripoté des gamins, parce que les taux de réussite de ses classes sont tellement élevés ! Séparer l’homme de ses cours. Pareil pour le curé, ses prêches sont si fédérateurs !
Non. Bien sûr que non. Ce truc de « distinguer l’homme de l’œuvre », ça ne vaut apparemment que lorsque les victimes sont des femmes. Des victimes négligeables. Et négligées.
Gégé, peut-être qu’il a violé, peut-être pas, il y a des juges qui devront trancher. Mais son casier sexiste est, sans conteste, déjà fort fort chargé. Avant Complément d’enquête, des investigations de Mediapart, du Monde (certes sans le son et l’image, ça percute moins) avaient déjà révélé un comportement « problématique » – doux euphémisme – à l’égard de le gente féminine.
Il est resté bloqué, Gégé. A l’époque des blagues grasses, des mains aux fesses, des commentaires graveleux. Il s’est pas rendu compte qu’il pouvait plus continuer. Pas parce que le monde a changé (pas encore, sinon Manu l’aurait pas défendu), mais parce qu’il y a désormais des harpies pour lui mettre le nez dans son sexisme. Il suffirait de reconnaître que ça pue, Gégé. Entendre, réfléchir, admettre que ça sent bien mauvais. Et, plutôt que de toujours nier relativiser réfuter, juste s’excuser. « Pardon. J’ai été un gros con ».
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