Guillaume Gautier
La chronique de Guillaume Gautier | Le foot belge a-t-il été aussi fort depuis 30 ans?
Avec ses cinq engagés européens encore en course, la Jupiler Pro League semble réussir son coup: elle se rapproche du statut de meilleur tremplin vers les grands championnats.
Le football a changé. C’est Kylian Mbappé qui le dit, et le buteur français du Real Madrid n’était pourtant pas encore né quand le ballon rond a changé de sens de rotation. C’était en 1995, quand le Belge Jean-Marc Bosman s’est retrouvé face à la Cour de justice des Communautés européennes (la CJCE) suite au refus de son club du RFC Liège de le laisser franchir la frontière pour porter les couleurs de Dunkerque. Les quotas qui limitent le nombre de joueurs étrangers dans les clubs de football disparaissent, et le marché des transferts explose.
Sans s’en rendre compte, Jean-Marc Bosman vide alors un chargeur entier dans le pied du foot belge, puisque la Belgique se muera progressivement en championnat dans lequel personne ne veut rester, les rêves de poursuivre le jeu à l’étranger devenant bien plus palpables pour l’immense majorité des professionnels du sport roi. Le foot belge s’affaiblit, quelques années à peine après avoir enchaîné les finales européennes (la dernière étant jouée par l’Antwerp en 1993). Sur la scène continentale, les représentants du plat pays deviennent alors des faire-valoir, pour lesquels franchir le cap de l’an neuf en étant encore engagé en Coupe d’Europe devient le principal objectif au-delà des frontières.
Apparemment, le foot belge a rechangé.
Alors que 2025 vit ses premières rencontres européennes, les cinq clubs belges engagés ont obtenu la garantie de poursuivre l’aventure au-delà de la «phase de la ligue», nouvelle formule adoptée dans les trois compétitions organisées par l’UEFA (Ligue des champions, Europa League et Conference League). Loin d’être anecdotique, puisque seule la surpuissante Premier League anglaise accompagne la Pro League belge au rang des championnats qui ont vu tous leurs représentants en lice franchir ce premier écueil. Si le tirage au sort a réservé des duels coriaces à Bruges, Anderlecht, l’Union et Gand, la saison continentale des clubs belges est déjà une réussite, à l’image des deux précédentes. Invitée de plus en plus régulière en quarts de finale, présente en demi l’an dernier grâce au Club de Bruges en Conference League, la Jupiler Pro League retrouve un statut dans la hiérarchie européenne qu’elle n’avait jamais connu depuis l’arrêt Bosman.
Certes, la création de cette fameuse Conference League permet de rêver plus loin que la très sélective Ligue des Champions, là où passer l’hiver reste toujours un exploit. Il n’empêche que pour la troisième année consécutive, la Belgique fait office de référence dans le sillage des plus grands championnats. Si le serpent de mer d’une BeNeLigue, fusion maintes fois envisagée mais jamais réalisée entre les élites belge et néerlandaise, n’est plus revenu à la surface depuis plusieurs années, c’est certainement parce que la Belgique, instigatrice historique de ces rapprochements, a de moins en moins besoin de ses voisins du nord pour devenir le tremplin de référence des joueurs qui veulent s’imposer dans les championnats du «Big Five». Même le Portugal et ses ténors peinent à suivre le rythme, les seconds couteaux belges étant bien plus compétitifs que le quatrième ou le cinquième meilleur Portugais.
Le football a changé et, pour une fois, la Jupiler Pro League semble l’avoir compris plus vite que ses concurrents.
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