Nicolas De Decker

La certaine idée de Nicolas De Decker: sont-ils les politiques les plus ridicules de l’histoire?

Nicolas De Decker Journaliste au Vif

Entartage, pipigate et autres « colle ton zizi à la barre »: la politique belge a-t-elle déjà été plus ridicule?

Toutes les rentrées politiques ont le goût du neuf. Celle-ci amène en plus une puissante odeur de ridicule qui pourrait donner à l’époque une saveur d’inédit.

Cette semaine, en Belgique, un ministre en exercice est convoqué au Parlement pour démontrer qu’il ignorait, alors qu’il était filmé ivre, qu’un de ses invités avait fait pipi dehors, et sa démission est exigée.

Et un ancien secrétaire d’Etat a été filmé ivre, en train de faire pipi dehors, et son parti exige la démission du ministre qui ignorait qu’un de ses invités avait fait pipi dehors mais soutient son ancien secrétaire d’Etat qui a été filmé alors qu’il faisait pipi dehors.

Et un président de parti qui a fait rédiger une biographie absurdement élogieuse a été entarté par un conseiller CPAS qui s’est fait immobiliser par plusieurs personnes. Puis pour se venger, le président de parti a entarté avec ce qui restait de la croûte de la tarte le conseiller CPAS immobilisé, et puis le président de parti a invoqué la légitime défense.

Si bien qu’il est tentant, non mais vraiment, de se dire qu’on n’a jamais vu ça, des politiciens aussi ridicules, qu’ils n’ont jamais eu l’air aussi bêtes, aussi hors sol, que cette génération politique est la dernière avant une extinction que ses propres tares auront bien méritée, et cette impression est rassurante, parce que quand on se dit ça, on se sent mieux qu’eux, donc on se sent mieux pour soi-même, mais c’est une erreur.

C’est une erreur, une illusion de la cognition, qui nous fait souvent croire que ce qu’on a sous les yeux n’est pas comparable avec ce qui se passait avant, et qu’on n’a jamais vu ça. C’est une erreur, parce que si cette rentrée a ce goût de nouveau, la dilection des hommes et des femmes politiques pour le ridicule est aussi vieille qu’une humanité qui, à cette exception qu’elle passe autant de temps qu’elle le peut à s’en moquer alors qu’eux passent le leur à la cacher, n’a rien d’intrinsèquement différent des hommes et des femmes politiques.

Les hommes et les femmes politiques ne sont pas plus ridicules aujourd’hui qu’hier. Ils ont toujours eu ces comportements douteux, ces poses humiliantes, ces attitudes mesquines, ils se sont toujours adonnés à ces provocations vulgaires et des ripostes débiles, des algarades violentes et des mictions déodorantes. Et on a toujours publié des apologies dégoulinantes d’apprêt.

Il suffit de puiser dans ses propres souvenirs, d’exhumer ceux des anciens, de récupérer de vieilles biographies, gourmées ou pas, pour retrouver des traces d’un ridicule, d’un pathétique, d’une indignité, sans doute encore plus dégoûtants que chez leurs successeurs. Les avanies des anciens étaient bien pires que celles de nos modernes, y compris celles de ceux qui collent leur zizi à la barre. Simplement ces avanies étaient-elles moins exposées.

Les contemporaines turpitudes, elles, sont systématiquement filmées, partagées, commentées, diffusées, détournées, et donc impossibles à cacher.

Ce n’est pas la laideur de la Lune qui est neuve, c’est qu’elle n’a jamais été aussi montrée par autant de doigts.

Souvent des doigts d’idiots qui se prennent pour des sages.

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