Nicolas De Decker

La certaine idée de Nicolas De Decker: pourquoi il faut marcher contre l’antisémitisme

Nicolas De Decker Journaliste au Vif

Il y a une manifestation contre l’antisémitisme, dimanche 10 décembre, à Bruxelles. Malgré les tentatives d’instrumentalisations de certains, et aussi pour les contrer, il faut y aller. La cause est trop importante.

Il y aura une manifestation contre l’antisémitisme le 10 décembre, à 14 heures, place de la Chapelle, à Bruxelles, et il faudra y aller. En Belgique, des Juifs se font aujourd’hui plus qu’hier insulter et violenter parce qu’ils sont juifs. Depuis les attentats terroristes du Hamas, Unia, qui lutte contre les discriminations, a reçu près de quatre-vingts signalements pour antisémitisme. Il y aura du monde, et on y sera. Mais y aller demandera à certains de se faire violence.

En effet, le tragique danger dans lequel vit aujourd’hui la communauté juive de Belgique est instrumentalisé de toutes parts. Et le débat public francophone ne traverse pas ces temps difficiles dans la sérénité. On pourrait même dire qu’on y a encore plus renoncé à la logique formelle censée fonder toute conversation civilisée. Ainsi, un des organisateurs de cette nécessaire marche combat la banalisation des crimes du nazisme, en taxant de nazisme toute personne ne pensant pas comme lui. Dans une de ses sorties les plus «likées» sur les réseaux sociaux, il a comparé la présidente de la Chambre, Eliane Tillieux (PS), à Hermann Göring. Lorsque le jeune parti d’extrême droite Chez Nous a annoncé qu’il participerait à la marche, cet organisateur a immédiatement manifesté sa désapprobation et a élargi sa volonté de bannissement au PS et à Ecolo, mis sur le même pied que l’extrême droite. Il a, plus tard, en s’en excusant vaguement, dit s’être mal fait comprendre. Cet organisateur n’est pas le seul briseur de logique formelle à appeler à cette marche de salubrité publique.

Car il y aura aussi, dimanche, ceux qui reprochent à leurs adversaires de donner des leçons de morale et de ne faire que du virtue signalling (vertu ostentatoire) et qui ne font que donner des leçons de morale et faire du virtue signalling en traitant de terroriste toute opinion différente de la leur sur le conflit au Proche-Orient.

Il y aura aussi de ces free riders de l’intersectionnalité qui passent leur vie à insulter les féministes intersectionnelles mais qui font de l’intersectionnalité sans le savoir lorsqu’ils accusent (à tort, en plus) les féministes intersectionnelles d’ignorer les violences sexuelles commises, le 7 octobre, sur des femmes juives par des hommes islamistes.

Il y aura aussi de ces faussaires de la cancel culture, qui accusent les wokes qui les contrediraient de totalitarisme, mais qui veulent censurer une artiste noire qui pasticherait saint Nicolas.

Il y aura aussi de ces whistleblowers de l’extrémisme, qui s’opposent au cordon sanitaire quand il s’applique à une extrême droite raciste, mais qui voudraient l’appliquer à l’extrême gauche qui ne l’est normalement pas.

Il y aura aussi de ces lâches de l’électoralisme, qui se servent d’une minorité en danger pour mettre en danger une moins petite minorité qui ne vote pas pour eux et dont une majorité se méfie.

Il y aura même de ces cherry pickers de la discrimination qui mettent l’existence même d’Unia en cause, sauf lorsque l’institution met en évidence une discrimination qui les arrange.

Tous ceux-là seront là, c’est heureux pour les Juifs de Belgique, c’est déjà ça. Mais cela serait malheureux pour tout le monde que tous ceux-là soient les seuls à leurs côtés: ils méritent mieux.

Voilà pourquoi il est du devoir de chacun de se trouver, le 10 décembre, à Bruxelles.

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