Nicolas De Decker

La certaine idée de Nicolas De Decker: Maxime Prévot et sa verticale sur le vide des Engagé.e.s

Nicolas De Decker Journaliste au Vif

Les Engagé.e.s se décrivent comme un mouvement participatif. Mais le président Maxime Prévot recrute des personnalités parce qu’il a concentré tout le pouvoir chez les Engagé.e.s.

Maxime Prévot s’était donné pour objectif d’en finir avec les slogans creux, il a baptisé l’opération «Il fera beau demain», et c’est là tout le secret de la rentrée réussie de son parti: Maxime Prévot fait parfaitement bien ce qu’il présente comme le mal absolu.

Il est un excellent politique qui sans cesse répète qu’il ne fait pas de politique, un politicien calculateur qui dégobille les calculs politiciens, un brillant particrate qui ne se lasse jamais d’honnir la particratie, un malin stratège qui vomit les malignités stratégiques et un tacticien subtil qui tempête contre les tactiques grossières.

Le président des tout nouveaux Engagés dit mener un mouvement horizontal, participatif et ouvert alors que ses concurrents dirigent des partis verticaux, directifs et fermés. Eux seraient nimbés d’une transcendance, lui serait porté par une immanence, et, du coup, il dit qu’aucun parti n’avait eu plus d’audace et de courage que le sien. Mais on n’a vraiment pas d’audace quand on n’a plus rien à perdre, et on n’a pas besoin de courage quand on n’a plus d’adversaire. Ceux de Maxime Prévot, qui étaient déjà peu nombreux au CDH, sont partis des Engagés parce qu’ils n’avaient plus rien à gagner. Et un président de parti n’a jamais tant de pouvoir que quand ses rivaux sont partis puisque presque tout a été perdu. Cela lui ramène des moyens pour recruter comme il le veut. Jean-Luc Crucke est arrivé du MR dans le Hainaut et Catherine Fonck l’a quitté. Olivier de Wasseige vient à Liège de l’Union wallonne des entreprises parce qu’Alda Greoli ne reste pas. Elisabeth Degryse est conviée à Bruxelles depuis les Mutualités chrétiennes parce que Georges Dallemagne ne se présente plus. Jean-Jacques Cloquet atterrit à Charleroi via l’aéroport et parce que Julien Matagne ne pèse pas. Yves Coppieters est invité depuis son Université libre dans le Brabant wallon au fédéral parce qu’il n’y avait là personne, et Vincent Blondel est intronisé dans le Brabant wallon après son Université catholique à la Région parce qu’André Antoine n’y est plus.

Ce recrutement favorisé par le vide concerne des personnalités de la société civile, mais il n’a pas été accompli par la société civile. Il est la consécution de coups de fil discrets et de rencontres dînatoires, d’arrangements et de promesses. Cette offre politique du futur s’est composée avec les moyens du passé. Maxime Prévot n’a pas consulté la société civile avant d’appeler Armelle Gysen, il n’a pas averti ses membres quand il a fait venir Lyseline Louvigny, il n’a pas associé ses cadres quand il négociait avec Yvan Verougstraete.

Il n’a pas été horizontal, pas participatif et pas ouvert quand il a posé les fondements de sa rentrée très réussie. Il a fait ça comme un président de parti qui aurait tous les pouvoirs sur le sien.

Il n’a rien fait là qui fît reculer la particratie, il l’a portée à un point d’excellence, traçant sa verticale présidentielle sur le vide partisan pour embaucher des vedettes vues à la télévision, si bien qu’il est sans doute aujourd’hui le président de parti le plus doué de Wallonie. Pas parce qu’il réinvente la fonction, mais parce qu’il la perfectionne tout en parvenant à faire croire qu’il s’y oppose.

Nicolas De Decker est journaliste au Vif.

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