Juliette Debruxelles
Footjob, trampling, fétichisme: quand les pieds virent à l’obsession sexuelle
L’excitation provoquée par les pieds est considérée comme le fétichisme sexuel le plus répandu au monde. Pourquoi cette obsession ?
Le sable fin glisse entre vos orteils et fait crisser vos pas, tandis que vous avancez nonchalamment dans le décor de rêve de cette plage paradisiaque. Les vagues lèchent vos chevilles, vous ressentez les caresses de la mer qui enveloppent vos pieds. De retour de cette balade vivifiante, vous enfilez votre sandale jusqu’à atteindre la résistance de la bride en V entre l’hallux et le secundus. Si vous êtes fétichiste des pieds, cette courte description vous aura sans doute conduit à ressentir un émoi.
Considérée comme le fétichisme sexuel le plus répandu au monde, cette paraphilie devenue banale n’en reste pas moins surprenante pour certains. Ongles courts, vernis ou non, hygiène irréprochable ou déplorable, fin ou boudiné, doux ou crevassé, orné de bijoux ou d’ampoules, harmonieux ou tordu, voûte plantaire marquée ou plate… à chaque pied son «obsédé». Et vous voilà regardant autour de vous et comptant, dans un mélange d’effroi et d’empathie, le nombre de stimulations ressenties par les personnes concernées durant les mois d’été, lorsque le pied nu devient la norme. Détrompez-vous, il ne s’agit pas ici de se jeter sur chaque orteil exposé comme un déchaîné.
Un massage de la voûte plantaire qui dérape en orgasme n’étonne plus personne.
Les fétichistes se déclinent, incluent parfois des chaussures, chaussettes ou collants, cherchent le contact ou l’évitent, aiment lécher, respirer ou masser ou au contraire se tenir à distance, préférant les photos ou écrans. Tout comme il n’y a pas une seule forme de pratique sexuelle cadrée chez les personnes cisgenres hétéronormées (cliché: monsieur ou madame pratiquant le coït en position dite de «missionnaire» chaque jeudi à 20 heures), il n’y a pas de règles chez les fétichistes, hormis celles imposées par la loi.
Un petit massage consenti de la voûte plantaire qui dérape en orgasme n’étonne plus personne. Un footjob (masturbation à l’aide des pieds), en revanche, peut étonner. Tout comme le trampling, soit l’écrasement du visage de l’un avec le pied de l’autre, dont le nom est tiré de l’action de «piétiner». On frôle alors le BDSM, la soumission, la maltraitance sollicitée, et ce sont deux fétichismes qui se croisent et s’interpénètrent.
Hors de l’intimité et de l’imagination, ces pratiques font du clic et forcément du fric. Si l’on se fie au simple principe de l’offre et de la demande pour quantifier le nombre d’adeptes, on peut se référer aux déclarations des influenceuses qui déclarent massivement recevoir quotidiennement des demandes de photos de leurs pieds sur les réseaux. Car oui, après le business de vente des culottes portées, c’est au tour des images et vidéos de pieds de générer un petit commerce. Rémunérateur il y a encore quelques mois, only. Concurrence féroce, «bon plan» plébiscité par les étudiantes, émergence de stars sur Mym ou OnlyFans ont créé l’overdose. La toile ne cache plus rien, on le sait bien.
Une lueur de glamour, de fuchsia et de propreté plastique dans cet univers aux semelles épaisses? Le challenge «Barbie feet» qui affole TikTok. Inspiré d’une scène du film dans lequel Margot Robbie — qui incarne la célèbre poupée — se déchausse et se tient sur la pointe des pieds parfaitement cambrés sur le sol, le défi encourage les Tiktokeurs à reproduire l’action, inondant la toile de petons de toutes formes, pour le plus grand bonheur des amoureux de la chausse…
Juliette Debruxelles est éditorialiste et raconteuse d’histoires du temps présent.
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