Carte blanche
Territoire occupé, blocus israélien: des mots utilisés de façon si automatique que leur aspect trompeur ou déformant n’est plus envisagé (carte blanche)
Territoire occupé, blocus israélien, bombardements indiscriminés, Gaza surpeuplé et miséreux… Autant de termes ou concepts utilisés de façon tellement automatique que leur aspect mensonger, trompeur ou déformant n’est plus envisagé, dénonce Daniel Rodenstein.
Le texte ci-dessous est peut-être inutile. Car tout le monde a déjà son opinion bien tranchée sur la question, qu’il n’est pas question de changer. Malgré tout, il m’a semblé utile d’apporter des précisions sur des termes ou concepts utilisés de façon tellement automatique que leur aspect mensonger, trompeur ou déformant n’est plus envisagé. Comme Territoire occupé, Blocus israélien, Bombardements indiscriminés, Gaza surpeuplé et miséreux…
Non, Israël n’occupe plus physiquement la bande de Gaza depuis 2005. Après avoir fait partie de l’Empire ottoman depuis 1517, puis inclus dans le mandat attribué aux Britanniques par la Société des Nations en 1922, la bande de Gaza s’est retrouvée sous tutelle égyptienne en 1948. L’Egypte, tout comme la Jordanie qui annexa la Cisjordanie, ne firent rien pour favoriser la création d’un Etat palestinien. Contrairement à Israël qui avait accepté en 1947 la création conjointe des deux Etats, Israël et Palestine. En 1967, à la suite de la guerre des 6 jours, Israël occupa effectivement Gaza et ce jusqu’à son retrait en 2005. Depuis cette date Gaza est quasi-autonome. Sa population put voter en 2005 et 2006 et le Hamas devint de fait l’autorité gouvernante, sans qu’aucune autre élection ne fut organisée depuis lors. Ce qui signifie que Gaza est librement administré par le Hamas depuis 18 ans. Tout ce qui advint à Gaza pendant ce temps est de la responsabilité exclusive du Hamas.
Non, Gaza n’est pas soumis au seul blocus israélien. La frange de Gaza est délimitée au nord par la mer Méditerranée, au sud et à l’est par Israël, et à l’ouest par l’Egypte. Quand on parle de blocus israélien on occulte la réalité, on la déforme, on tord les faits. Gaza est autant sous blocus égyptien qu’israélien. Chaque fois qu’on parle de blocus, il faudrait mentionner « égyptien et israélien ». Mais seul le dernier terme est employé. Par toute la presse, écrite, par radio ou TV. Surtout, ce soi-disant blocus n’a pas empêché le Hamas de s’équiper de missiles, de s’armer, de construire quelques centaines de kilomètres de tunnels.
Non, Gaza n’est pas un territoire surpeuplé, miséreux et dépourvu de tout. La densité de population de Gaza est comparable à celle de Singapour. Singapour est un Etat moderne, son éducation est parmi les meilleures, sa situation économique est aussi parmi les meilleures. Gaza est pauvre en beaucoup de choses (infrastructure, travail, aide sociale) mais est très riche en armements, missiles et autres tunnels. Si cet argent avait été investi en éducation, promotion de la santé et de l’économie, Gaza pourrait ne rien envier à Singapour ou Israël. C’est le Hamas qui a dirigé Gaza depuis 2005 qui en est responsable. Il ne faut pas oublier que le but premier du Hamas est, aussi bien que la création d’une terre d’Islam, la destruction d’Israël.
Non, ce n’est pas Israël qui confond population civile et Hamas, et qui bombarde de façon indiscriminée les deux. C’est le Hamas qui est établi parmi les civils palestiniens. C’est le Hamas qui est installé dans les sous-sols des écoles, des hôpitaux, des immeubles civils. C’est le Hamas qui lance ses missiles depuis les abords immédiats des écoles, hôpitaux et immeubles. Me dira-t-on qu’ils n’ont pas d’autre choix ? Alors on soutiendra que c’est le Hamas qui a décidé que les civils subissent les dégâts de la guerre. C’est le Hamas qui a choisi d’être responsable de la tragédie de la population civile de Gaza. Israël a exigé le déplacement de la population du Nord de Gaza au Sud pour deux raisons évidentes : protéger autant que faire se peut la vie de ses soldats lors des opérations terrestres à Gaza d’une part, et éviter autant que possible la mort des civils lors de ces combats. Ce dernier motif n’est nulle part évoqué.
Non, Israël n’est pas un territoire occupé comme le Hamas le proclame et la presse a tendance à le répéter. Israël est né du droit international. L’unique Etat juif de la planète est né de la volonté des Nations Unies de donner un Etat aux juifs comme d’ailleurs aux arabes de Palestine. Ce plan de partage proposé en novembre 1947 par les Nations Unies, fut accepté par les Juifs palestiniens, pas par les Arabes palestiniens. Ce sont les Juifs de Palestine qui ont accepté la création de l’Etat de Palestine (à côté de l’Etat d’Israël), ce sont les Arabes palestiniens qui ont refusé la création de l’Etat de Palestine. Si Israël s’agrandit et occupa des terres que le plan de partage avait attribué au futur Etat palestinien, ce fût après une guerre que les Arabes de Palestine et 5 pays arabes alentour menèrent contre le nouvel Etat israélien de 1947 à 1949. Ces terres n’ont pas été occupées, elles ont été conquises, et incorporées, lors d’une guerre imposée à Israël. Par ses voisins.
Non, ce qui se passe n’est pas un génocide. Ce nouvel épisode d’une guerre qui dure depuis plus de 100 ans n’a pas été déclenché par Israël mais bien par le Hamas. Qui a choisi comme cible des civils. Les civils qui meurent sous les bombes israéliennes ne sont pas les cibles de l’armée israélienne, mais des victimes innocentes des choix du Hamas d’installer ses armes et ses armées parmi eux. Ces civils innocents ne sont pas moins des victimes et leur mort n’est pas moins atroce que celle des civils israéliens. Mais si on continue à abuser du mot génocide, on finira par le vider de sa substance. Il faudra rappeler encore une fois quels sont les termes de comparaison : les Hereros et Namas en Namibie ; les Arméniens en Turquie ; les Juifs européens dans le troisième Reich ; les Tutsis au Rwanda. Vouloir comparer cette tragédie avec ces génocides c’est mal nommer les choses et ajouter au malheur du monde.
Non, Israël n’est pas un Etat « blanc et colonial ». La majorité de la population actuelle d’Israël provient des pays arabes, d’où elle a été expulsée, dépouillée de tout le plus souvent, après 1947. La population juive d’Israël est aussi « blanche » que les populations arabes d’Israël et des pays alentour.
Oui, la Cisjordanie est un territoire occupé. Depuis la guerre des 6 jours en 1967, Israël a conquis et occupe les terres qui avaient jusque-là été occupées par la Jordanie. Car il n’y avait pas d’Etat palestinien sur ces territoires avant, comme il n’y en a pas eu après. Mais l’embryon d’une administration, d’une représentation palestinienne avait émergé depuis ce moment, avec laquelle Israël a négocié dans le passé et devra négocier à l’avenir pour qu’il y soit créé un Etat de Palestine.
Oui, je crois que le futur Etat palestinien devra garantir la sécurité d’Israël pour que les deux vivent en paix.
Oui, je crois que les colonies israéliennes en Cisjordanie devront être démantelées. En grande partie tout au moins, pour permettre la constitution d’un territoire d’un tenant, cohérent et suffisant pour un Etat de Palestine.
Oui, je crois qu’Israël devra intégrer en son sein un demi-million de colons de ces colonies qui devront les abandonner.
Oui, je crois que Benjamin Netanyahou est une menace pour un Israël démocratique et un Israël Etat de droit. Mais je ne vote pas en Israël. Ce sont les Israéliens qui devront décider.
Oui, je crois que le fanatisme religieux est aussi toxique d’un côté comme de l’autre.
Oui, je crois que la confusion entre Israël et les juifs aura des conséquences délétères pour les juifs.
Oui, l’antisémitisme est bien vivant. Et bien alimenté.
Par Daniel Rodenstein
Le titre est de la rédaction. Titre original: Des précisions nécessaires, et quelques questions évidentes
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