Le Vif
«80 ans après Auschwitz, la mémoire reste notre meilleure arme contre la haine et l’ignorance»
Alors que l’on vient de commémorer les 80 ans de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau, Richard Laub, Vice-président de l’Institut Jonathas, et Viviane Teitelbaum, Secrétaire générale et sénatrice, nous envoient une réflexion, sous forme de carte blanche, sur les accusations de génocide contre Israël.
Le 27 janvier 2025 a marqué le 80e anniversaire de la libération d’Auschwitz, un moment tragique de l’histoire de l’humanité. Ce jour nous rappelle non seulement les horreurs de la Shoah, mais aussi la lutte constante contre l’antisémitisme et la désinformation. Dans ce contexte, il est important de faire un parallèle entre les accusations absurdes portées contre les Juifs tout au long de l’histoire et celles contemporaines formulées contre l’État d’Israël. Ces accusations ne sont pas seulement des mensonges; elles portent un poids lourd d’idéologie et de manipulation; la compréhension de ce phénomène est essentielle pour éviter la répétition des erreurs du passé.
L’histoire des Juifs a été marquée par des siècles de persécution. Parmi les accusations les plus abjectes figurent les soi-disant «crimes rituels». Au Moyen Âge, les Juifs étaient accusés de faire usage de sang chrétien pour la confection de pains azymes lors de la Pâque juive. Une autre accusation récurrente était celle de la profanation de l’hostie, prétendant que les Juifs utilisaient le pain consacré dans des rites diaboliques. En 1349, les dirigeants de la communauté juive de Tournai furent brulés vifs. A Bruxelles , la cathédrale Saint-Michel-et-Gudule commémore l’exécution publique près de la porte de Hal de Juifs en 1370 qui subirent le même sort que ceux de Tournai. Jonathas dont notre institut porte le nom, fut un de ces Juifs victimes de cette accusation aussi infamante qu’absurde. L’ogre des contes pour enfants, figure de cauchemar vivant en marge de la cité chrétienne, n’était autre que l’incarnation du Juif dans l’imaginaire médiéval. Les Juifs étaient aussi régulièrement accusés de causer des épidémies, notamment la peste noire du XIVe siècle. Ces accusations ont favorisé l’isolement, la persécution et le massacre de communautés juives entières en Europe, jusqu’aux tragédies de la Seconde Guerre mondiale.
Aujourd’hui, ces accusations historiques de crimes rituels et de complots occultes ont pris le visage de l’antisionisme radical. L’État d’Israël est régulièrement accusé d’être un état colonial et d’apartheid commettant un génocide contre les Palestiniens. Ces dérives sémantiques sont aujourd’hui une manière détournée de discréditer Israël et de justifier une haine à peine voilée des Juifs. Difficile aujourd’hui de nier qu’Israël est devenu le « Juif des Nations ».
Ces accusations ont favorisé l’isolement, la persécution et le massacre de communautés juives entières en Europe, jusqu’aux tragédies de la Seconde Guerre mondiale.
Ceux qui propagent ces accusations peuvent être classés en deux grandes catégories: les «cyniques» et les «crédules».
Les «cyniques» sont ceux qui, bien que conscients de l’inexactitude et de l’absurdité de leurs propos, les tiennent pour des raisons idéologiques ou personnelles :
– Certains, comme de nombreux dirigeants LFI en France ou PTB en Belgique, utilisent ces accusations pour séduire une part de l’électorat qui nourrit des préjugés ou des frustrations contre Israël. Manipulant les faits à des fins politiques, ils espèrent récolter les fruits d’une rhétorique populiste et antisémite qui trouve un écho chez une partie de la population.
– D’autres, en diabolisant Israël, poursuivent une longue tradition antisémite qui ne s’est jamais vraiment éteinte. Ce sont des personnes qui, tout en clamant ne pas être antisémites, véhiculent en réalité une forme nouvelle d’antisémitisme en dénigrant l’État juif de manière obsessionnelle et en feignant une indignation toute sélective qui ne se manifeste que contre le seul état juif du monde
– Finalement, Il existe aussi ceux qui, non remis de l’énormité du crime que fut la Shoah, cherchent à inverser les rôles et à accuser les Juifs des crimes que les nazis ont perpétrés à leur encontre. Selon la formule du philosophe Vladimir Jankélévitch , le monde ne pardonnera jamais Auschwitz aux Juifs
Les «crédules» sont ceux qui, par manque d’information et/ou par paresse intellectuelle, finissent par accepter tous les discours diffamatoires sur Israël. Ils ne cherchent pas à comprendre les faits, mais se contentent des récits biaisés véhiculés par de nombreux médias souvent complices de ce processus de délégitimation. Ces accusations se propagent facilement grâce aux réseaux sociaux où la désinformation circule sans frein.
Les «crédules» sont ceux qui finissent par accepter tous les discours diffamatoires sur Israël.
Alors que nous commémorons le 80e anniversaire de la libération d’Auschwitz, nous devons nous rappeler que les attaques contre les Juifs, qu’elles soient anciennes ou modernes, ont toujours pour but de diviser, de stigmatiser et de nourrir la haine. Les accusations absurdes portées contre Israël, qui relèvent de la même logique que les accusations de crimes rituels au Moyen Âge, ne doivent pas être ignorées. Nous avons la responsabilité collective de défendre la vérité, de dénoncer l’antisémitisme sous toutes ses formes et de lutter contre la désinformation et le dévoiement du langage. Car si nous ne nous élevons pas contre ces mensonges, nous risquons de permettre à l’histoire de se répéter. 80 ans après Auschwitz, la mémoire reste notre meilleure arme contre la haine et l’ignorance.
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