Pourquoi les Belges n’ont pas encore accès à Threads (et comment certains en profitent)
Le nouveau réseau social lancé par Meta pour concurrencer Twitter enregistre un excellent démarrage avec 100 millions d’utilisateurs déjà inscrits. En Europe, Threads se fait attendre. Son mode de fonctionnement n’est pas conforme aux réglementations européennes. En attendant, de fausses applis sévissent.
Disponible depuis le 5 juillet dernier, Threads affiche déjà 100 millions d’utilisateurs aux compteurs. Dans les premières 24 heures, le nouveau réseau social développé par Meta (maison-mère de Facebook, Instagram et WhatsApp) et disponible sur iOS et Android, avait déjà conquis 30 millions d’usagers.
Quelques jours plus tôt, son plus grand concurrent, Twitter, avait annoncé qu’il restreignait temporairement la lecture des tweets (6000 messages par jour pour les comptes vérifiés, 600 pour les utilisateurs non vérifiés et 300 pour les nouveaux comptes non vérifiés) pour contenir l’utilisation massive de données par des tiers, notamment afin d’alimenter les modèles d’intelligence artificielle. Une annonce qui n’a peut-être pas plu aux utilisateurs de la plateforme…
Pour l’heure, Threads n’est accessible que dans une centaine de pays, dont les Etats-Unis, mais aucun faisant partie de l’Union européenne. Le mode de fonctionnement du réseau social se heurte en effet à la législation applicable à tous les Etats membres. Si le groupe américain a pu bénéficier de millions d’inscriptions en seulement quelques heures, c’est parce qu’il a alimenté Threads avec les données des comptes Instagram déjà actifs. Cette pratique, qui consiste donc à transposer une base de clientèle d’une application à une autre, est contraire au règlement des marchés numériques (DMA pour Digital Market Act), voté en septembre 2022 et progressivement mis en application depuis mai 2023.
Le DMA est l’un des deux textes législatifs adoptés par le Parlement européen afin de créer un environnement en ligne « plus sûr, plus équitable et plus transparent ». L’autre texte est le règlement sur les services numériques (DSA pour Digital Services Act).
« Au cours des deux dernières décennies, les plateformes numériques sont devenues partie intégrante de nos vies – il est difficile d’imaginer faire quoi que ce soit en ligne sans Amazon, Google ou Facebook« , expose un communiqué du Parlement européen.
« Si les avantages de cette transformation sont évidents, la position dominante acquise par certaines de ces plateformes leur confère des avantages significatifs sur leurs concurrents, mais aussi une influence indue sur la démocratie, les droits fondamentaux, les sociétés et l’économie. Elles déterminent souvent les innovations futures ou le choix des consommateurs et servent de « gardiens » entre les entreprises et les utilisateurs de l’internet « .
Ce que cherche surtout à faire l’Union européenne, c’est lutter contre les pratiques anti-concurrentielles des géants du web et de corriger les éventuels déséquilibres sur le marché européen. « Le modèle économique de ces acteurs, en particulier des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), repose sur la combinaison de masses de données sur leurs utilisateurs et d’algorithmes puissants et opaques. Grâce aux forts effets de réseau et à leurs écosystèmes enfermant les internautes-consommateurs, ces grands acteurs ont acquis une position de quasi-monopole sur le marché européen, laissant peu de place à la concurrence. À eux seuls, les GAFAM représentent un chiffre d’affaires comparable aux recettes fiscales de la France« , rappelle le site d’information consacré aux politiques publiques Vie Publique.fr.
Selon la Commission européenne, plus de 10 000 plateformes en ligne – dont 90% sont des petites et moyennes entreprises – opèrent en Europe, mais seules les plus grandes plateformes dites « systémiques » captent l’essentiel de la valeur du marché numérique européen.
Une contrainte de taille, mais qui ne devrait pas empêcher Meta d’avoir accès au marché européen et de glaner des millions d’utilisateurs supplémentaires. Son arrivée est juste « une question de temps », estime Alexandre de Streel, directeur académique du Center on Regulation in Europe (CERRE). Le patron d’Instagram, Adam Mosseri, a lui-même confirmé que l’intention était bien de lancer Threads en Europe à l’avenir.
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Profitant de ce contretemps, des développeurs ont mis en ligne une application baptisée Threads, ressemblant au nouveau réseau social du groupe Meta, met en garde BFM. Sur l’App Store, « Threads for Insta » est déjà numéro 5 du classement des applications « gratuites » et même numéro 1 dans la catégorie « Réseaux sociaux ». C’est une entreprise nommée SocialKit LTD qui se cache derrière cette application trompeuse. Le logo semble inspiré de celui de la plateforme officielle de Threads mais il reprend les couleurs de l’application Instagram, l’officiel étant quant à lui blanc sur fond noir. De quoi embrouiller les utilisateurs les moins aguerris.
Les utilisateurs bénéficient dans un premier temps d’une période d’essai gratuite mais s’ils ne désinstallent pas l’application au moins 24 heures avant la date de renouvellement, l’accès leur sera facturé sans discontinuer. L’abonnement pour un an, censé donner accès à toutes les fonctionnalités, est par exemple facturé 89,99€. Mieux vaut donc y regarder à deux fois.
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