Pierre Havaux, 1963-2023 : tu vas nous manquer

Douloureuse, brutale, inacceptable. La disparition de notre collègue Pierre Havaux laisse une tristesse immense. Qui ne devient supportable qu’à l’évocation des souvenirs qu’il nous a laissés. Car ils sont beaux, lumineux. A son image.

Ces souvenirs évoquent d’abord Pierre, le collègue, unanimement apprécié. Pour son autodérision, son humour, ses joutes verbales. Pierre qui préférait le bon mot d’esprit, glissé à l’oreille d’un(e) collègue, aux slogans urbi et orbi. Qui n’était pas le plus bruyant de la rédaction, mais qui « en était » quand le plaisir était à l’ordre du jour. Comme au carnaval, du côté de Stavelot, aux matchs de foot, à Cologne, son club de cœur, autour d’un pot.

Pierre aimait les débats d’idées, préférait le contenu à la technologie, décelait le diable dans un détail d’un document officiel, avait ses sources tant en Wallonie qu’à Bruxelles et en Flandre. Il avait rédigé une biographie incroyable de Paul Vanden Boeynants (Sur la piste du crocodile, éd. Mols, 1994, avec Pierre Marlet) et avait été le premier à alerter (Le Vif, 2013) sur l’omnipotence de Frank Robben, le patron de la Smals, en charge de la quasi-totalité des traitements informatiques de l’Etat.

Polyvalent, intéressé par mille et un sujets, la passion de Pierre pour l’histoire et le temps qui défile a progressivement et irrémédiablement pris le dessus sur le tout-venant de la politique. Comme foncièrement conscient de faire partie d’un tout collectif et que notre temps sur Terre est compté.

Pierre, le sportif

Les exploits sportifs de Pierre étaient l’occasion de débriefings passionnés à la machine à café. Car Pierre abordait la course à pied comme il abordait la vie : avec humilité et simplicité. Et des chronos plus qu’honorables ! Comme ce 2 avril 2023, quand il s’est confronté à la reine de toutes les courses. Dossard 63133. Pour célébrer ses 60 ans, Pierre s’était lancé un défi. De taille. Courir le marathon de Paris. 42,195 kilomètres. Son premier, et ultime. Il s’était préparé. Mais à bientôt 60 ans, on n’est pas à l’abri d’un bobo. Alors, pour éviter le « mur » du 30e kilomètre, et les douleurs articulaires, les Dafalgan étaient de la partie. « Et ça a vraiment bien marché ! », riait-il quelques jours plus tard. C’était déconseillé, mais qu’importe, ce marathon, c’était son défi, sa journée. Quelques jours avant le départ, il avait aussi bu une (ou deux) bonne bière, même si en prépa marathon, on conseille de ne pas boire d’alcool. « Bah, je ne comptais pas battre le record du monde… » Finalement, il aurait eu tort de s’en priver. Son marathon, il l’a bouclé en 4 h 38’ 18’’, soit une moyenne de 9,1 km/h avec une pointe à 10 km/h pour boucler les deux derniers kilomètres.

Pierre, le diplomate

Il paraît que pour les intimes, on dit “ Diplo ”, pour le jeu de plateau “ Diplomatie ” autour duquel Pierre et sa bande de copains enchaînaient les parties chez l’un ou chez l’autre. Et Pierre, malicieux, stratège, négociait, persuadait, forgeait ou brisait des alliances dans ce jeu où chaque participant contrôle les forces militaires de l’une des sept grandes puissances européennes du début du XXe siècle. Le lundi matin, il racontait, hilare, les heures passées, ses bons coups, les prises de bec, les victoires, le trop de vin. La rédaction du Vif présente ses plus sincères condoléances à son épouse Eliane, à ses enfants Sylvie et Grégory, ainsi qu’à tous ses proches et espère que l’évocation de ces moments partagés contribuera à combler l’immense vide. Car Pierre, tu vas nous manquer. Tu nous manques déjà, d’ailleurs.

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