«L’atmosphère est angoissante et pessimiste»: les grands changements au sein de la RTBF se précisent

Le Conseil d’Administration de la RTBF se réunissait ce vendredi. Composé des plus gros partis politiques francophones, une réduction de 12% du budget est attendue.

Voilà plusieurs mois que la RTBF constitue l’une des cibles principales de la guerre culturelle qu’a lancée le MR, et le conseil d’administration du média public tenu ce vendredi constituait une bataille charnière. Parce que sur les treize administrateurs envoyés par les partis francophones suite aux résultats du 9 juin en Fédération Wallonie-Bruxelles, cinq viennent du MR (trois des Engagés, trois du PS, un d’Ecolo et un du PTB).

Les grandes lignes étaient déjà connues, la dotation annuelle de 350 millions d’euros sera gelée (alors qu’elle est habituellement augmentée de 2% chaque année). Sur le plan comptable, le développement de nouvelles recettes devrait rapporter 4,1 millions d’euros. Les économies sur l’optimisation, l’efficience et les ajustements éditoriaux se chiffreront à 22 millions, le non remplacement des départs devrait rapporter la même somme. Enfin, le report sélectif de certains investissements permettra d’épargner 5,5 millions. Cumulées, toutes ces mesures amputeront le budget actuel de la RTBF de 12% à l’horizon 2028.

«Ajustements éditoriaux»: les grands évènements sportifs bientôt commentés depuis la RTBF ?

Une source interne au sein du Boulevard Reyers estime qu’en cinq ans, le média de service public accusera entre 100 et 150 départs, soit 10% de chaque service. «Cela fait déjà des années que l’on fait des économies. Ce qui est le plus dur, c’est de devoir mettre à l’arrêt des programmes à cause de ces économies.» La ligne sur «les ajustements éditoriaux» pourrait donc indiquer la fin de certaines émissions. Georges-Louis Bouchez a déjà dit tout le mal qu’il pensait de la retransmission gratuite des évènements sportifs majeurs en football ou en F1.

Certes, ni le président du MR, ni ses missionnaires au CA (qui ne composent pas une majorité à eux seuls, de surcroit) n’ont la possibilité de dicter sur quel programme mettre le holà, mais les attaques ciblées (notamment dans le magazine Wilfried) à l’encontre des programmes sportifs et de The Voice inquiètent. «The Voice nous permet de rajeunir notre audience et d’atteindre notre objectif de toucher 90% des Belges. Le sport, c’est ce qui fait la plus grande différence chez nous, et le foot belge en particulier. C’est aussi un gros moteur d’emplois, la RTBF envoie chaque week-end une équipe par terrain en Pro League pour faire des commentaires et résumés.» Le plan budgétaire 2025-2028 de la RTBF ne permettra donc peut-être plus d’envoyer ces équipes, et moins encore pour les compétitions à l’étranger, que certains s’attendent à devoir commenter depuis Bruxelles. Une bonne source illustre une situation possible. «Pour The Voice, il n’est pas vraiment question d’arrêter le programme, mais de réduire le nombre d’épisodes. Pour le Tour de France, la somme proposée à l’organisateur et diffuseur de la compétition, ASO, sera peut-être diminuée. Rien n’empêche ASO de refuser l’offre et de se tourner vers RTL, mais rien n’assure non plus que RTL fasse une offre suffisante. En fait, il n’y aura pas spécialement moins de droits télés, mais certainement moins de budget pour ces droits télés.»

Ces dernières semaines, il a été demandé à chaque manager et responsable de service quelles économies étaient envisageables. «L’atmosphère est angoissante et pessimiste, beaucoup ne croient pas au fait qu’il n’y aura pas de licenciement économique, assure une autre source du Boulevard Reyers. Il y a probablement des assistants dont le poste sera modifié. En fait, on sait qu’on devra faire plus avec les moyens qu’on a, voire moins.» Les équipes devraient être informées d’ici le mois de juin. Une note de réorientation stratégique devrait également être soumise dans les prochains mois.