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Une sacrée paire de pionnières : Maud Stevens, première tatoueuse professionnelle

Mélanie Geelkens
Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

Retour sur l’incroyable histoire de Maud Stevens, première tatoueuse professionnelle, qui a travaillé sous un nom sobre et asexué « M. Stevens Wagner ».

Gus Wagner s’était autoproclamé « l’homme le plus artistiquement tatoué au monde ». Modeste, le gars. 264 motifs, tout de même (et environ 800 à sa mort). Mais, surtout, un slogan très efficace pour attirer les foules, dans les villes et villages où il s’exhibait, aux côtés de femmes à barbe, d’hommes-troncs et de frères siamois.

Ah ! le cirque au début du XXe siècle… Au printemps 1904, ce hipster cent ans avant l’heure était l’une des attractions de l’Exposition universelle de Saint-Louis, dans le Missouri. Comme Maud Stevens, contorsionniste et trapéziste de 27 ans, fille de fermiers du Kansas, qui avait préféré une vie d’itinérance plutôt que de tâches ménagères.

Son corps, à elle, était parfaitement vierge de tout dessin mais n’allait pas le rester longtemps. La légende veut que Gus lui ait proposé un premier rencard, et qu’elle ait accepté à condition qu’il la tatoue, mais aussi qu’il lui apprenne son art. Un art à l’ancienne : bien que la machine existe déjà à l’époque, l’ancien marin lui préfère l’aiguille non mécanique, appelée technique du hand poke, apprise au fil de ses débarquements dans les ports de Java et de Bornéo.

Le premier motif de Maud Stevens sera sur son bras gauche. Son prénom. Bientôt complété par un papillon sur l’épaule, un aigle surmontant un drapeau américain sur le biceps, une femme chevauchant un lion parmi les palmiers sur le torse… Et ainsi de suite, jusqu’à recouvrir son corps de la nuque aux pieds.

Dans les cirques et les foires où elle s’affiche, elle fait sensation. Parce qu’elle est passablement dénudée, à une époque où dévoiler ne fût-ce qu’un bout de cheville était considéré comme une atteinte aux bonnes moeurs. Et parce qu’être ainsi recouvert était plutôt une curiosité masculine, associée à la criminalité. Nullement aux femmes…

Sa fresque corporelle, elle la doit en partie à celui qui, trois ans après leur rencontre, est devenu son mari.

Mais Maud Stevens s’est aussi beaucoup piquée elle-même. Et a développé un talent certain pour le hand poke, au point d’en faire son métier. Première tatoueuse professionnelle. C’était pas gagné : pour nombre de gros durs désireux de se faire orner, cet art restait mâle. Question de confiance.

Une nénette maniant l’aiguille ? Mouahah-ahah. Puis touchant la peau de ses clients ? Un peu de décence, tout de même. Pour se faire connaître, elle était dès lors contrainte de ne mentionner qu’un sobre et asexué « M. Stevens Wagner » sur les prospectus qu’elle diffusait. Son talent et, sans doute, la renommée de son époux, firent le reste.

Un cliché de la tatoueuse incompétente a eu la peau dure : les femmes restent, toujours actuellement, moins nombreuses que les hommes dans le métier, certains clients craignant de passer entre leurs mains. Ces dernières années toutefois, leur présence augmente, aidée par les réseaux sociaux qui leur ont permis de faire connaître leur travail, peu importe leur genre. Les femmes seraient, en revanche, désormais plus tatouées que les hommes : 16 % (contre 10), selon des statistiques du Syndicat français des artistes tatoueurs (2018).

Quand Gus décéda, en 1941, frappé par la foudre, Maud continua à exercer. Avec leur fille, Lotteva, qui avait réalisé son premier motif à l’âge de 9 ans, puis qui devint professionnelle à son tour. Et qui garda, elle, la peau parfaitement immaculée jusqu’à sa mort, Gus ayant reçu l’interdiction formelle de tatouer leur enfant. Alors, puisque même son père ne pouvait pas la piquer, Lotteva décida que, jamais, personne d’autre ne le pourrait.

Elle l’avait dit

Pourquoi le féminisme aujourd’hui ? Justement pour réussir là où l’égalité économique a échoué. Là où la culture patriarcale résiste. Le féminisme vient seulement de commencer sa longue marche. Dans vingt ans, dans cent ans, il aura changé la vie.

Ainsi parlait Gisèle Halimi, avocate féministe française ayant lutté pour l’avortement et la reconnaissance du viol comme crime, décédée le 28 juillet dernier à l’âge de 93 ans. Une citation tirée de son livre La Cause des Femmes, publié chez Gallimard en 1992. Qui n’a pas pris une ride…

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Sept femmes françaises ont déposé, fin juillet, leur candidature à des postes d’évêque, prêtre, diacre… Des fonctions qui leur restent interdites par l’Eglise catholique. Un « acte salutaire de désobéissance à la doxa ecclésiale », ont justifié celles qui se sont réunies au sein du collectif Toutes apôtres !

« L’absence de femmes en situation de responsabilité […] constitue un scandale autant qu’un contre-témoignage de l’Eglise. » Alors que l’une d’entre elles a, dans la foulée, reçu des menaces de mort, elles devraient être reçues, en septembre prochain, en audience par un ambassadeur du Vatican en France.

Barbecue saveur sexiste

« Pour que la grille reste propre, nous conseillons de la huiler avant de griller au barbecue. L’huile de tournesol ou l’huile d’olive. Peu importe, ce que bobonne a dans la cuisine. » Le manuel d’utilisation des barbecues BarrelQ se voulait « gai et humoristique, et peut-être un peu masculin ». Mais, en fait, surtout misogyne ? Pépite sexiste, l’association française de sensibilisation aux stéréotypes diffusés par le marketing, a interpellé, début août, la marque néerlandaise… qui, en retour, a promis de modifier le manuel (rédigé en 2013) lors de sa réédition.

Promis, sans bobonne, la viande grillera tout aussi bien.

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