Saint André des Arts
Le second album du groupe liégeois au vocaliste et leader corse justifie-t-il son titre Mon jour de chance ?
Lors de la parution du premier album de Saint André, il y a presque trois ans, un petit béguin nous avait saisi pour la voix d’artichaut au vinaigre du chanteur et les mélodies malicieuses. La chose fit son effet sur un label indépendant belge mais le fantasme de séduire la France, premier marché de la chanson, ne se réalisa pas. Entre-temps, l’ancien étudiant en kiné à Liège, le Corse Jean-Charles Santini, se relocalisait définitivement à Paris avec femme (et nouvel) enfant : après une quête digne de la conquête du Graal, il signait avec la puissante major Universal-France. Ce qui reportait l’album prévu en fin de printemps au début de l’automne, avec la garantie que, de Marseille au Havre, l’Hexagone serait bel et bien approvisionné en saintandréeries. Leur jour de chance ? Contrairement au premier album, celui-ci ne surprend pas et séduit un peu moins à la première écoute. Pourtant, en embauchant Jean-Louis Piérot – producteur du carton Renan Luce – Santini a » davantage travaillé, notamment la voix et les tendances à la surinterprétation « . L’ouverture du disque est assez typique de son contenu : Bleu de toi est une jolie métaphore sur la perte de contrôle de soi – via une allusion automobile – mais on n’est pas sûr que les » pam-pam-pam » aient l’intérêt radiophonique souhaité.
Ego fort
Heureusement tout n’est pas là. » Pendant dix-huit mois, de Paris à Montréal, en passant par Bastia et Lisbonne, je me suis éloigné pour mieux me rapprocher, s’explique Jean-Charles par une après-midi ensoleillée. Je voulais garder le côté romanesque sans tomber dans l’abstrait, travaillant en format poétique des histoires concrètes. » Ainsi vont les 11 chansons soignées : issues de la biographie de leur auteur tout en évitant l’exposition frontale.
Né il y a un peu plus de trente et un ans dans un village corse – qui a donné son nom au groupe – ce garçon articulé d’allure méditerranéenne a grandi sous la houlette d’un père exigeant. Pour ne pas en dire plus. » Mon orgueil vient de là : j’avais 10 ans et je devais raconter l’histoire des Capétiens, si je ne le faisais pas bien, cela tournait mal. Aujourd’hui, je suis l’idole de mon père. » D’où ce fort ego qui le pousse à être seul en pochette et en photo promo, ignorant les trois autres musiciens du groupe, Thomas, Cyrille et Jeronimo. Le poussant aussi à sortir de lui des chansons » chevaleresques nourries de drames à la Verdi « . Pas de façon aussi talentueuse qu’un Raphael, même si son usage de la mélancolie provoque quelques résultats scintillants : Le Roi des infidèles, Le monde ne tourne pas, 17 appels en absence trouvent ainsi la distance idéale entre spleen et tension organique, apte à laisser des traces. C’est d’ailleurs dans une veine intimiste que Saint André confesse le mieux, à l’exception peut-être du très rythmique Est-ce que ? joliment emballé en compagnie de la Canadienne Andrea Lindsay.
CD Mon jour de chance, distribué par Pias. Concert le 7 décembre au Cirque royal à Bruxelles, www.cirque-royal.org
PHILIPPE CORNET
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici