Anne-Sophie Bailly
Policier tué à Schaerbeek: poser les bonnes questions
Surfer sur l’émotion suscitée par la mort du jeune policier à Schaerbeek, Thomas Monjoie, est indigne. Ce sont les questions de fond, celles des moyens, du partage d’information, de l’adéquation des procédures qu’il faut examiner.
Digne. La minute de silence rendue lundi matin devant le palais de justice de Bruxelles l’était. Comme l’était la haie d’honneur qui a accompagné Jason P. à sa sortie d’hôpital. Comme l’était également la lettre écrite par Fadoua à son collègue. Comme l’était la demande de la famille de consacrer les jours à venir à honorer la mémoire de leur proche. Comme le seront les funérailles et les hommages multiples.
Depuis le décès de Thomas Monjoie, ce jeune policier poignardé le 10 novembre à Schaerbeek, une émotion intense a envahi sa famille, ses collègues, ses proches, l’opinion publique. Comment, en effet, ne pas être submergé de tristesse, de douleur, de colère ou d’incompréhension quand un jeune homme ne revient pas de sa journée de travail, fauché par la violence du geste d’un homme. Cette émotion se comprend, se ressent. Elle est digne.
Ce qui l’est moins, c’est l’empressement avec lequel certains ont surfé sur la mort du jeune Thomas pour avancer leurs pions ou sortir de vieilles revendications, comme obtenir la démission du ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne, ou la revalorisation des barèmes des policiers.
Ce qui ne l’est pas du tout, c’est se retrancher derrière une affirmation que l’on espère sans appel: toutes les procédures ont été respectées.
Aujourd’hui, plus d’une semaine après le drame, ce sont des questions de fond qu’il convient de poser. Si les procédures ont bel et bien été respectées, comme chacun l’affirme, sont-elles adéquates? Ce drame met-il en lumière des lacunes dans notre système de sécurité? Le partage d’informations a-t-il été suffisant et correctement effectué? Existe-t-il des dysfonctionnements dans le suivi d’une personne fichée par l’Ocam? Comment conserver l’équilibre entre l’appréhension d’un comportement potentiellement dangereux et la privation de liberté d’un individu a priori? La question de l’absence de moyens – de la police, de la justice, des services hospitaliers, des unités psychiatriques – est-elle effectivement centrale? Et s’il apparaît qu’elle l’est, quelles priorités voulons-nous établir en tant que société? La sécurité? La santé? L’ accueil de première ligne? Des questions à aborder sans éluder l’aspect «financement» de ces besoins.
Après le drame qui a coûté la vie à un policier, des questions doivent être posées. Si les procédures ont été respectées, sont-elles adéquates?
C’est ce qui doit faire l’objet d’un débat de fond. Le reste n’est que surfer sur une émotion collective. C’est trop facile et indigne.
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