Peter Gabrielise
De son nouvel album orchestral, New Blood, Peter Gabriel multiplie les versions : studio, live, pur instrumental, CD, DVD, Blu-ray, 2D, 3D. Sans pour autant convaincre totalement.
Le 10 octobre, EMI sort un double CD titré New Blood qui consiste en quatorze titres de son propre répertoire réenregistrés et chantés par Peter Gabriel en compagnie d’un ensemble philharmonique de 46 musiciens. Ni guitare ni batterie. En bonus, un autre CD présente treize versions exclusivement instrumentales. Le travail se situe dans la lignée de l’album paru en février 2010, Scratch My Back, où l’artiste anglais utilisait le même principe orchestral pour interpréter douze auteurs tels que Bowie, Paul Simon ou Arcade Fire. Point commun aux deux entreprises, selon les mots de Gabriel : » Se débarrasser du rock . » Pratiquement, on est davantage dans la gravité emphatique d’un Stravinsky ou la pompe de John Williams que dans la légèreté lumineuse de Mozart. Le répertoire oubliant certains standards gabriéliens ( Biko, Games Without Frontiers, Here Comes the Flood) est arrangé par John Metcalfe, qui a déjà travaillé avec Blur ou The Cranberries. Dans les meilleurs moments ( The Rhythm of the Heat, Intruder) la tension induite évoque un film hollywoodien déchiré par le suspense, la voix de Gabriel s’immiscant dans les volutes de cuivres ou de cordes : certains instants sont bluffants de beauté ( The Nest That Sailed the Sky) mais on ne peut s’empêcher de ressentir une forme de lassitude au fil de l’écoute. Les violons ont beau simuler le coup de rein, l’ensemble est en déficit de beat jouissif ! Peut-être aussi de simplicité : quand surgit, en toute fin de partie, une version enlevée de Solsbury Hill, où Gabriel semble – enfin – se laisser aller, le pari est gagné. Mais un peu tard.
2 ou 3D ?
Curieusement, c’est un autre label, Eagle Rock – distribué par Pias – qui propose diverses versions autour d’un double concert de Peter et de l’orchestre filmé en mars 2011 à Londres. Ainsi, la Deluxe Edition, parue fin octobre, contient pas moins de quatre disques, le CD audio sorti par EMI trois semaines plus tôt, une version live du disque – avec cette fois-ci Biko – et le film des performances de mars, en DVD et Blu-ray. Ceux-ci mélangent les titres de New Blood et quelques reprises, comme The Boy in the Bubble de Paul Simon : on y voit un Gabriel à l’allure de moine bedonnant engoncé dans une curieuse veste-chemise, dissipant le charisme scénique qui a fait sa réputation. Redisons-le : certains moments sont d’une singulière volupté ( Signal to Noise) mais l’ensemble laisse néanmoins perplexe, le mariage semblant à moitié consommé. Et la 3D là-dedans ? Après une furtive sortie belge en salle – une seule séance le 20 octobre dans quatre Kinepolis – le film est distribué par Pias qui nous envoie l’affaire en… 2D, alors que le format du futur est l’argument marketing de l’objet ! Ce qui pourrait confirmer que le film musical en 3D est, jusqu’ici tout au moins, une niche commercialement négligeable.
Double CD New Blood chez EMI, New Blood Deluxe Edition chez Pias qui distribue également une version 3D et Blu-ray de New Blood – Live in London.
PHILIPPE CORNET
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