Anne-Sophie Bailly
#MeTooPolitique: il y a encore trop de mains, trop haut, sur trop de cuisses
Plus de 120 femmes belges actives dans le monde politique ont publié une carte blanche, premier pas vers un #MeTooPolitique. Concrétiser les demandes sera la deuxième étape. Plus compliquée.
Voici un peu plus de cinq ans, la vague MeToo déferlait depuis les Etats-Unis. L’enquête du New York Times qui révélait au grand jour les abus, les agressions et les viols du producteur Harvey Weinstein avait été suivie d’une vague de libération de la parole de femmes victimes de violences sexuelles dont on connaît aujourd’hui l’ampleur. Dans la foulée, sont apparus les Balancetonporc, Balancetonbar, Balancetonfolklore, Musicforbelgium… Le sport, les médias, la culture, la société du spectacle et, plus récemment, le monde académique ont progressivement brisé la loi du silence. Un vaste mouvement qui a rendu visibles des pratiques tues jusque-là. Qui a induit une évolution dans les mentalités et les comportements. Parfois même des avancées législatives.
Chaque fois qu’une remarque graveleuse est formulée sur la taille d’une poitrine, qu’une photo intime non sollicitée est envoyée est une fois de trop.
Pas d’évangélisme ici, le chemin reste long, mais MeToo a mis en lumière l’ampleur d’un phénomène qui, au-delà des cas individuels, constitue un problème structurel de société. Pourtant, malgré cette prise de conscience collective, plus de 120 femmes politiques belges ont ressenti le besoin, l’urgence, de lancer un Metoopolitique. Pourquoi maintenant? Pourquoi seulement maintenant? Pourquoi spécifiquement sur la politique?
L’affaire Michel De Herde (DéFI), inculpé pour atteinte à l’intégrité sexuelle, qui secoue la majorité schaerbeekoise depuis quelques mois, a certainement fait office de déclencheur. Mais les signataires de cette carte blanche pointent surtout la spécificité de leur fonction, de leur statut particulier de mandataire public qui conditionne la prise en considération de leur parole à l’appréciation d’un conseil communal, d’un bourgmestre, aux procédures d’un parti. Alors, elles exigent l’instauration des outils adéquats qui font défaut à l’heure actuelle.
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Cette carte blanche est présentée comme un premier pas vers un Metoopolitique. Le deuxième sera de concrétiser les demandes. Ce qui requerra – au vu des réticences exprimées sur le texte, de la sous-représentation de certains partis parmi les signataires, de la charge N-VA qui a suivi sa publication – de la pugnacité et de la volonté pour que cette tribune ne soit pas une occasion manquée de lutter contre le sexisme en politique. Car chaque main placée trop haut sur une cuisse, chaque remarque graveleuse formulée sur la taille d’une poitrine, chaque photo intime non sollicitée envoyée est une de trop.
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