Marathon Man
Courir à trente ans, un âge où les cours flanchent. Mais le talent de Nicolas Rey, lui, ne s’essouffle pas
Courir à trente ans, par Nicolas Rey. Au diable Vauvert, 164 p.
Marion Mazauric, la jeune patronne d’Au diable Vauvert, est aux anges. Nicolas Rey, avec lequel elle avait inauguré, il y a quatre ans, sa maison d’édition, a plus que rattrapé le succès. Courir à trente ans, le quatrième roman de son poulain, a déjà franchi la haie des 30 000 exemplaires. Une belle confirmation, fruit d’un sérieux échauffement, après les 6 000 exemplaires vendus de Treize Minutes, les 14 000 de Mémoire courte (prix de Flore 2000) et les 20 000, en 2003, d’Un début prometteur.
Il faudra bien s’y faire : le chroniqueur de Culture et dépendances (France 3), 30 ans tout rond, n’est pas de ces étoiles d’un jour sacralisées par un petit écran qui expulse aussi vite qu’il propulse. Incontestablement, le plaisant journaliste et écrivain, au style diablement aiguisé, séduit largement au-delà du petit cercle des agités de la jet-set parisienne.
Franck, Vincent, Jean, Marc et Louis. Ils sont cinq, cinq trentenaires, meurtris avant l’âge, qui ne se connaissent pas, mais qui pourraient former un club, empêtrés qu’ils sont dans leurs déboires amoureux. Déjà nostalgiques de leurs vertes années, ils courent après des rêves à jamais disparus, le souvenir d’une révolte, les folies d’antan, les accès de générosité et de passion. » Salariés en couple » ou célibataires, les héros malmenés de Rey ne cessent de s’interroger sur leur conjointe, sur la fidélité û » Une vertu qui s’exerce par défaut » û les enfants, l’amitié ; tout en tentant d’échapper définitivement à l’alcool et à la drogue. Tout est allé très vite, trop vite, pour Franck et les autres.
La femme, elle, symbolisée par Bénédicte û qui apparaît, astucieusement, dans chacune des saynètes û étonnante de détermination, a su se fixer un but, qu’elle atteindra, malgré les embûches et les zigzags. Et c’est elle qui viendra sauver û provisoirement û Franck, échoué, tout comme ses congénères, dans une drôle de clinique où toute référence à l’amour est bannie.
Car, nous voilà rassurés, c’est bien l’amour qui, finalement, gouverne nos trentenaires, et non pas l’appât du gain ou les honneurs. Grâce soit rendue à notre jeune géographe des émotions, qui réconcilie toutes les générations autour d’une même course. D’une même utopie.
Marianne Payot
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