Les Belges au Liban : positif

Après les mises au point nécessaires, les Européens ont répondu présent à la demande que leur adressait la communauté internationale. Ils fourniront donc la colonne vertébrale de la force d’interposition appelée à se déployer au Sud-Liban pour y conforter le fragile cessez-le-feu intervenu entre Israël et le Hezbollah, trente-quatre jours après le début de l’offensive de l’Etat hébreu. Près de 400 des militaires belges coiffés du casque bleu prendront part à cette force, aux côtés de plusieurs milliers de soldats italiens, français, espagnols, scandinaves, turcs et asiatiques (voir l’infographie p. 10).

Le déploiement de cette force, qui pourrait compter jusqu’à 15 000 hommes, a été décidé par la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies, adoptée le 11 août dernier. Il est destiné à renforcer considérablement la Finul (Force intérimaire des Nations unies au Liban), installée au sud du pays depuis 1978, mais dont le faible effectif (2 000 hommes) excluait toute efficacité réelle sur le terrain.

Mais les Européens ne se sont vraiment engagés dans la nouvelle Finul qu’après avoir obtenu des éclaircissements quant à sa mission et des garanties quant aux règles d’engagement. Les négociations à cet effet ont été principalement menées par la diplomatie française (lire l’article de Dominique Lagarde, p. 62). Paris voulait s’assurer que les soldats qu’on lui demandait ne seraient pas condamnés à se laisser tirer comme des lapins au moindre incident, et qu’en cas de besoin ils pourraient faire usage de la force pour se défendre. Inutile de dire que ce souci était partagé par les Belges, qui n’ont pas oublié le massacre de leurs paras désarmés au Rwanda, en 1994. Ces préoccupations de sécurité semblent avoir été rencontrées, comme le montre l’armement lourd que les premiers renforts français ont débarqué au Liban, ces derniers jours. Les Belges aussi emporteront de quoi se défendre.

La Finul renforcée devra, en premier lieu, aider l’armée libanaise à poursuivre son redéploiement dans le sud du pays, où elle occupe peu à peu les positions qu’abandonnent les Israéliens et le Hezbollah. Plus largement, elle s’efforcera d’installer une zone  » sans activité militaire  » dans le Sud-Liban, entre le fleuve Litani et la frontière israélienne.

En revanche, la résolution 1701 n’exige pas qu’elle se déploie sur la frontière syro-libanaise. C’est par cet espace long de 300 kilomètres, montagneux et difficilement contrôlable, que transite habituellement l’armement iranien destiné au Hezbollah. De même, la Finul n’aura pas pour mission de procéder au désarmement de la milice chiite, pourtant prévu par la résolution 1559 de l’ONU. Il est en effet convenu qu’une telle opération devra faire l’objet d’un accord interlibanais, débouchant peut-être sur une intégration de la milice à l’armée nationale.

Dans de telles conditions, le Hezbollah semble désireux de ne pas gêner l’action de la Finul.

L’opération n’est cependant pas sans risques, comme l’a reconnu le gouvernement belge. Mais le  » c£ur de mission  » de nos soldats sera, en principe, de contribuer au déminage de cette région truffée de projectiles non éclatés et d’engins explosifs placés par l’armée israélienne. Indispensable à la remise en état d’un pays dévasté et dangereux, le patient travail qui attend les soldats belges devrait être apprécié par la population locale.

Notre armée participe déjà à des missions de paix en Bosnie, au Kosovo, en Afghanistan et au Congo. Il est cependant très positif qu’elle s’investisse à présent au Liban, dans une mission à forte ossature européenne. Cet engagement réparateur sur les ruines de la sixième guerre israélo-arabe aidera en effet l’Union européenne à s’imposer plus concrètement au Proche-Orient. Et à faire valoir fermement ses idées, le jour où la diplomatie reprendra enfin ses droits pour imposer un remède à la cause des autres conflits : le mortel face- à-face israélo-palestinien ( lire aussi la chronique de Bernard Guetta, p. 65).

de Jacques Gevers

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