Le retour de la performance

Michel Verlinden Journaliste

Pratique insaisissable par essence, la performance fait son come-back dans le giron de l’art contemporain.

La performance, au sens large du terme, réinvestit le champ de l’art contemporain. Elle reprend corps. A dire vrai, c’est aujourd’hui généralement sous une forme atténuée qu’elle se produit, tributaire qu’elle est du grand règne de l’accumulation effrénée. Animée par une radicalité impressionnante au début de son histoire, elle a longtemps cherché à faire sens plutôt qu’à laisser des traces. Lorsqu’on sonde ses origines de façon historique, on trouve le constat d’une étroitesse: l’ambition est d’échapper au cadre de l' » art formaliste et spatialement limité« . Les lettres de noblesse du mouvement remontent à 1962, même si cette forme artistique chemine avec l’humanité depuis ses origines. Dès le début des années 60, Günter Brus, Otto Muehl, Hermann Nitsch et Rudolf Schwarzkogler passent à l’action. Ce qui sera identifié plus tard sous le label actionnisme viennois constitue les prémices d’un courant qui se diffusera largement à travers le monde, notamment via l’avatar body art. Au centre du modus operandi viennois, le corps perçu comme le dernier espace de liberté. Celui-ci est mis à rude épreuve, scatologie, pulsions sexuelles, auto-agression, mutilations… Ainsi, en 1975, de la performance phare de Marina Abramovic, Thomas Lips. A la Krinzinger Gallery d’Innsbruck, la Serbe se grave une étoile à cinq branches sur le ventre à l’aide d’une lame de rasoir. But de la man£uvre ? Chercher à se purifier de l’histoire de son pays. Aujourd’hui, la performance est globalement entrée dans une phase plus pacifique. En Belgique, c’est incontestablement la performance de Wang Du à la galerie Baronian Francey qui a retenu l’attention. Le concept ? Transformer la galerie en atelier le temps d’y produire plusieurs sculptures autour d’un fait divers qui a défrayé la chronique cet été lorsqu’un commissaire de police philippin a pris un bus de touristes en otage. Ce work in progress pendant lequel il était possible de voir le Chinois en plein travail synthétise à merveille une perception de la performance à cheval sur la réflexion critique – en l’occurrence, la machine médiatique – et sur la production d’une £uvre concrète laissant au marché de l’art la possibilité de la phagocyter.

MICHEL VERLINDEN

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