Le Congo dans le miroir
Les études politiques sur les relations belgo-congolaises sont nombreuses. Mais il suffit parfois d’un roman tout simple, à l’écriture limpide et au déroulé passionnant, pour en saisir toute la complexité. C’est le cas de Amsoria (autoédition, 333 p.), écrit par Lilia Bongi à partir de sa propre histoire. Au lendemain de l’indépendance, monsieur Blackson, un Congolais connu pour avoir imposé ses enfants aux côtés des Blancs à l’école coloniale, envoie en Belgique sa fille Lily, 10 ans à peine, afin qu’elle bénéficie d’une bonne éducation. Elle est prise en charge par un couple de Flamands mal intégrés en Wallonie, ensuite par un autre couple dont l’unique motivation semble être de percevoir l’argent de la pension. Déconnectée du Congo, mais gardée à distance en Belgique, la jeune fille ouvre des yeux ébahis sur le mode de vie des Belges, qu’elle dissèque avec une précision d’ethnologue. A l’école, les poncifs et fantasmes ne sont jamais loin: « Ce qui m’est montré du Congo me rend gênée d’être originaire de l’Afrique. » Si elle est rarement confrontée à un racisme ouvert, il reste toutefois ancré dans le subconscient, et cela fait tout aussi mal. Mais la force du livre est de ne pas tomber dans le piège de la dénonciation à sens unique. Sur sa route, Lily rencontre de belles personnes, une institutrice qui la prend sous son aile, un directeur qui l’engage, un employé de l’Office des étrangers qui empêchera son expulsion… Au-delà de sa couleur de peau, chacun est porteur de ses affects, de ses faiblesses et de ses rêves. Belgique-Congo, c’est aussi une histoire d’émotions partagées.
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