L’apport des autres
Quelle différence faire entre manipulation et influence, tant au niveau professionnel et relationnel que familial ?
Béatrice Sepult, Lierneux
La différence entre les deux est, à la fois, peu importante et radicale. Que chacun d’entre nous soit le produit de ce qui est comme en dehors, comment l’ignorer ? Nés de l’accouplement de deux personnes étrangères l’une à l’autre, façonnés jusque dans notre for intime par l’environnement tant naturel que culturel, contraints par les nécessités matérielles et sociales, nous sommes manipulés û image vieille comme le monde û comme l’argile l’est par le potier. Ne sommes-nous donc qu’un agrégat fortuit dont le hasard serait l’architecte ? Incontestablement… mais pas intégralement. Nous ne sommes pas que manipulés.
En début d’existence, nous nous contentons de subir. Lors même que, très tôt, notre » jeune jeunesse » donne l’impression de vivacité, d’indépendance revendiquée, c’est plus une expression liée aux mécanismes du développement qu’une manifestation d’autonomie. L’éducation n’est pas autre chose que le refus de laisser ce bouillonnement naturel suivre son cours. Conviction forte : il faut manipuler aujourd’hui l’enfant pour lui permettre demain d’être davantage son propre maître. Mais les » manipulateur s » ne sont pas toujours des experts. C’est là un sujet d’actualité permanent.
Peu à peu, résultat de cette manipulation éducative, nous commençons à en ressentir le doigté étranger. Plus ou moins supportable, c’est selon. Tout au long de l’existence, nous réagirons à ce » triturement « . Soit nous acceptons de le subir par inconscience, par crainte, par une sorte de renoncement ; nous continuons à être manipulés. Soit nous négocions cet apport extérieur. Nous savons que les hommes et les choses sont nos assaillants perpétuels. Pour autant nous n’acceptons pas (ou plus) l’envahissement comme une plage basse accueille la marée haute. On parlera d’influence, plus de manipulation.
Etre influencé se confond avec l’état normal de l’adulte. A tout moment lui restera l’inquiétude que cela ne dégénère en manipulation. En ce sens, nous parlerons d’auto-manipulation. Dans ce qui nous vient de l’extérieur, nous choisissons ce qui peut (doit) devenir nôtre, comme on se (re)constitue par les aliments » sélectionnés » que nous ingérons. En d’autres termes, à la passivité de la manipulation succède l’intelligence û intelligere, c’est faire le tri. Personne ne peut se murer en lui-même ; chacun se nourrit du besoin et des idées d’autrui selon ce qu’il en espère. Ainsi navigue-t-on entre manipulation et influence… plus ou moins adroitement. Jean Nousse
Marc Lemaître, Alleur
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