Enurésie : c’est grave, docteur ?

Pour différentes raisons, les parents exigent de leur enfant qu’il soit  » propre  » de plus en plus tôt, de nuit comme de jour. Est-ce bien raisonnable ? Et à partir de quand faut-il s’inquiéter des  » accidents  » ?

Moment crucial pour les petits enfants, l’entrée en maternelle est aussi l’occasion, pour certains parents, de se dire que leurs chers bambins, s’ils ne sont pas encore  » propres « , apprendront probablement à le devenir à l’école ! Il arrive cependant que la  » propreté  » soit une condition à l’admission du petit.  » Une telle exigence est absolument inadéquate aux capacités physiologiques de l’enfant. La période normale d’acquisition des contrôles sphinctériens se fait entre 2 ans et 4 ans pour les filles et jusqu’à 5 ans pour les garçons. Il est donc irraisonnable de l’exiger pour tous à deux ans et demi, ou même à 3 ans « , s’insurge le Dr Thierry Schurmans, néphrologue pédiatrique à l’hôpital universitaire des enfants Reine Fabiola, à Bruxelles. Cependant, après 5 ans, si l’enfant a encore fréquemment des  » accidents  » en journée, mieux vaut y être attentif.

Un trouble du fonctionnement de la vessie, notamment une vessie dite hyperactive, explique parfois ce type de problème. La vessie se contracte à la moindre sensation, donnant l’envie d’aller très souvent aux toilettes, même si cet organe n’est pas rempli.  » Un enfant devrait uriner entre 4 et 7 fois par jour. S’il va plus souvent aux toilettes, il faut envisager qu’il puisse avoir une vessie hyperactive. Son besoin est alors, le plus souvent, très urgent et quasi incontrôlable, et l’enfant éprouve de grandes difficultés à retenir l’urine. S’il ne parvient pas assez vite aux toilettes, il risque bien d’y avoir un accident « , explique le Dr Axel Feyaerts, urologue pédiatrique aux cliniques universitaires Saint-Luc, à Bruxelles.

La vessie hyperactive résulte dans certains cas d’une volonté répétée de faire rapidement pipi :  » Lorsque l’enfant force pour se dépêcher d’uriner, il va contracter sa vessie trop souvent, ce qui aura pour effet de la muscler, de rendre ses parois plus épaisses et de réduire sa capacité, d’où les besoins plus fréquents. L’enfant peut se dépêcher de faire pipi pour diverses raisons, notamment le manque d’intimité dans les toilettes quand les portes ne ferment pas ou lorsqu’il n’y a pas de porte ou s’il y fait trop froid, ce qui est assez fréquent dans les écoles.  »

L’énurésie nocturne concerne 180 000 personnes en Belgique, mais pas uniquement des jeunes enfants : 0,5 % des adultes de 20 à 40 ans sont également touchés. Jusqu’à 5 ans, si l’enfant a encore besoin d’un lange la nuit et n’a jamais été  » propre « , il ne faut pas trop s’inquiéter et ne pas le culpabiliser par des moqueries ou des brimades. En revanche, si le pipi au lit persiste après cet âge, là encore, il est temps de penser à consulter un médecin.

Les débordements nocturnes peuvent provenir d’un problème fonctionnel.  » Dans ce cas, l’énurésie peut avoir trois causes conjointes. Tout d’abord, une diminution de la capacité d’éveil : l’enfant ne se réveille pas lorsque sa vessie est pleine ou lorsqu’elle se contracte involontairement. Deuxièmement, il arrive que l’enfant ait une vessie hyperactive : le muscle de la vessie se contracte brutalement et involontairement, même si la vessie n’est pas remplie, donc avant même la sensation du besoin d’uriner. Enfin, il est possible que l’hormone antidiurétique ne joue pas son rôle nocturne. Normalement, elle doit permettre aux reins de produire moins d’urine durant la nuit, ralentissant le remplissage de la vessie « , explique le Dr Schurmans.

Une consultation chez le médecin généraliste ou le pédiatre aidera à trouver l’origine du problème. Si l’enfant refait pipi au lit après avoir été capable de rester au sec durant plus de six mois, il peut s’agir d’une cause psychologique. Mais, à nouveau, mieux vaut d’abord consulter un praticien afin de ne pas passer à côté d’une raison physiologique. L’énurésie entraîne des conséquences psychologiques chez l’enfant plus grand qui en souffre : donc, autant ne pas la sous-estimer… ni s’en inquiéter inutilement chez les plus petits.

Carine Maillard

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