D’Onofrio, proprio de Tapie à Saint-Tropez ?

David Leloup Journaliste

Quel est le lien entre Bernard Tapie, une veuve de Roger Vadim, un Diable rouge exilé à Porto, une somptueuse villa de Saint-Tropez et des sociétés écrans britanniques liées à une fiduciaire administrée par un prince luxembourgeois ? L’improbable réponse à cette question tient en quinze lettres : Luciano D’Onofrio, comme le dévoile notre enquête exclusive.

Malgré son inculpation pour blanchiment d’argent, Luciano D’Onofrio, l’ex-homme fort du Standard de Liège, continuerait de toucher des commissions occultes sur des transferts de footballeurs via des montages opaques passant par Luxembourg et Londres. Ces mêmes circuits financiers lui auraient en outre permis d’acquérir discrètement l’une des plus belles villas de Saint-Tropez.

Depuis qu’il a été contraint de quitter le Standard de Liège par la petite porte en juin 2011, poussé dans le dos par Roland Duchâtelet, le nouveau propriétaire du club, et inculpé par la justice liégeoise pour faux, usage de faux et blanchiment d’argent, l’ancien vice-président du Standard, 57 ans, a quasi disparu de la circulation.

A part son arrivée manquée au Sporting d’Anderlecht, fin 2011, et son sauvetage financier de l’AS Eupen quelques semaines plus tard, l’homme n’a guère défrayé la chronique ces dix-huit derniers mois. Mais il a continué à s’activer en coulisses. A jouer les intermédiaires de l’ombre dans une ribambelle de transferts de joueurs. Et il aurait investi dans l’immobilier de luxe sur la Côte d’Azur.

D’après la presse hexagonale, Luciano D’Onofrio aurait acquis, il y a un an, une somptueuse villa de Saint-Tropez qu’il aurait ensuite louée à son ami Bernard Tapie. Quelques mois plus tôt, l’homme a joué un rôle déterminant dans les transferts du Diable rouge Steven Defour et de l’international Espoir français Eliaquim Mangala du Standard au FC Porto. En guise de remerciement pour avoir fait baisser le prix des joueurs lors des négociations, il aurait reçu gratuitement du club portugais 10 % des droits économiques des deux footballeurs. Ce qui signifie qu’en cas de transfert il toucherait 10 % du montant payé à Porto.

Prête-noms et sociétés écrans

Ces transactions au Portugal, tout comme l’achat de la villa tropézienne, Luciano D’Onofrio les aurait réalisées à l’abri des regards, via des prête-noms et des sociétés écrans dans les paradis fiscaux.

Pourquoi une telle opacité ? D’Onofrio a-t-il craint de nouvelles saisies conservatoires de la justice liégeoise, après celles de son hôtel de maître du XVIIIe siècle en 2008, et de ses actions du Standard en 2011 ? Ou voudrait-il cacher des activités d’agent de joueurs qui enfreindraient les règles de la Fédération internationale de football (Fifa) ? A moins qu’il ne cherche à dépenser discrètement des fonds qu’il aurait omis de déclarer, comme ce million et demi d’euros que le parquet de Liège estime qu’il a blanchi dans la Cité ardente il y a dix ans ? Cela, l’ex-homme fort de Sclessin s’en défend. Et contre-attaque :  » Entre 2005 et 2011, quand j’étais salarié au Standard, j’ai payé 3 millions d’euros d’impôts ! Qui dit mieux ?  »

Quoi qu’il en soit, notre enquête montre que ces transactions lors des transferts et de l’acquisition de la villa ont laissé des traces qui accordent peu de place au doute : on tombe sur les mêmes intermédiaires et les mêmes boîtes aux lettres à Londres et à Luxembourg. Il y a même un lien direct entre une société liée au volet  » immobilier « , et une autre qui intervient dans le volet  » transferts « . Tout ceci suggère qu’une même personne se trouve derrière les deux opérations. Cela étant par ailleurs corroboré par des informations indépendamment publiées par le FC Porto, lâchées par Bernard Tapie en interview ou sorties dans la presse française.

Bref, se pencher sur le business post-Standard de Luciano D’Onofrio, c’est plonger à pieds joints dans l’univers trouble des transferts de joueurs et de l’immobilier de luxe. Où l’opacité règne en maître grâce aux titres au porteur britanniques…

DAVID LELOUP

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