De terribles petits vieux
Le roman de Cocteau, Les Enfants terribles, est aussi le livret d’un opéra pour quatre voix et trois pianos du compositeur Philip Glass. C’est dans une mise en scène signée par la jongleuse et performeuse française Phia Ménard que le spectacle fait prochainement halte à Bruxelles.
L’ histoire originelle est celle d’Elisabeth et Paul, une sœur et un frère orphelins. Un conte de tendresse et de complicité à l’ écart du monde des grands, puis de haine et de mort quand l’amour de Paul pour une autre vient perturber ce huis clos. Ici, la metteuse en scène et chorégraphe a pris la liberté de remplacer la chambre d’ado du récit premier par un home pour seniors. Elisabeth et Paul sont vieux, en habits fades et fanés. La réalité virtuelle s’invite sur scène par casques interposés pour les plonger dans leurs souvenirs d’enfance. Un acteur qui interprète à tour de rôle un infirmier, une animatrice et un narrateur s’ occupe des patients ou s’ adresse aux spectateurs, singeant parfois Cocteau lui-même. Cocteau que l’on retrouve en interlude, extrait de l’interview «Cocteau s’adresse à l’an 2000».
Le dispositif scénique, trois manèges concentriques, étourdit. Au centre, l’intérieur du home. A l’extérieur, un mince bandeau tournant où sont posés les pianos. L’ ensemble est froid comme la mort, baigné d’ombres et de lumière blanche. Le son s’ envole, entêtant, enivrant. L’ interprétation virtuose donne le tournis autant que le procédé scénique. La danse, présente à la création de l’opéra de Glass (1996), signée Susan Marshall, a globalement disparu au profit de ce tourbillon scénographié. Le tout est classe, calculé, froid. Les amateurs de musique minimaliste et de scénographie au diapason seront aux anges et tournoieront jusqu’au bout du chaos organisé de cette histoire de fin de rêves et de fin de vies.
Les Enfants terribles, au Théâtre national, à Bruxelles, les 10 et 11 février.
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