Crédits : La fin des soldes

S’il semble un peu tard pour financer à bas prix des projets – immobiliers ou non -, les taux restent faibles dans l’absolu

S’il apparaît prudent de ne pas s’engager dans des produits de placement à revenu fixe à (très) court et à long termes (lire en page 60), fera-t-on aussi l’impasse sur les projets d’investissement à crédit, à caractère immobilier ou non ? Pas sûr. Il y a vingt ans, les taux d’intérêt culminaient bien au-dessus de la barre des 10 %. Au début des années 1980, le candidat au crédit hypothécaire pouvait ainsi se montrer fort satisfait s’il parvenait à arracher un taux inférieur à 14 % ! La faute à l’inflation… Dans le contexte actuel, de tels taux peuvent prêter à sourire ! Que ce soit pour un crédit  » voiture neuve  » ou pour un crédit hypothécaire, les taux dépassent rarement les 6 % aujourd’hui. Et pourtant ! Certains s’accordent à dire qu’il est vraisemblablement déjà trop tard pour financer à crédit (ou refinancer) l’achat d’un bien immobilier, du moins si l’on désire un taux plancher. Le raisonnement est d’une logique implacable.

La chute des taux

Les taux ayant plongé dans les tréfonds au deuxième trimestre, nombre d’emprunteurs se sont rués chez leur banquier pour refinancer leur crédit hypothécaire. Les chiffres livrés par l’Union professionnelle du crédit (UPC) sont éloquents : alors que l’on a refinancé les crédits hypothécaires à coups de dizaines de millions d’euros chaque mois en 2002, c’est le plus souvent en centaines de millions d’euros par mois que l’on a compté pour ce type d’opérations pendant les six premiers mois de l’année. En un an, les refinancements ont bondi de 255 % ! Toutes opérations confondues (achat, construction, transformation et refinancement), les crédits hypothécaires ont affiché une progression remarquable de près de 40 % au 1er semestre 2003. A raison : entre le mois de mars et le mois de juin 2003, le sacro-saint taux fixe à 20 ans, dont les Belges sont très friands (45 % de parts de marché l’an dernier), pointait ici et là bien en deçà des 5 %.

Vive la variabilité

Les taux variables ont toutefois monopolisé l’essentiel de la hausse des (re)financements hypothécaires. Ce type de taux étant susceptible de varier à des échéances bien déterminées tout au long de la durée de vie de l’emprunt, le candidat supporte un risque bien plus important qu’en optant pour un taux fixe. Ce surcroît de risque est censé être compensé par un taux d’intérêt plus faible à la souscription. Ainsi, le taux variable 5/5/5 (le taux à la souscription peut partir à la hausse ou à la baisse tous les 5 ans en fonction des taux du marché) ne dépassait que rarement les 4 % sur une durée de 20 ans et pour une quotité d’emprunt (le rapport entre le prix de l’immeuble et le montant emprunté) oscillant entre 80 et 100 %.

Cependant, de plus en plus d’institutions de crédit ont assorti ces taux variables de  » cap  » et de  » floor « , ce qui réduit le risque. Ces  » cap  » et ces  » floor  » sont des garde-fous qui empêchent les taux de franchir un certain seuil, à la hausse ou à la baisse. Un taux de 5,5 % (cap : +2 %, floor : -5 %) signifie donc, en gros, que le taux initial de souscription ne peut aller au-delà de 7,5 %, ni descendre en deçà de 0,5 %.

Trop tard pour discuter

Et aujourd’hui ? Au risque de décevoir, cette période dorée semble bel et bien révolue. Les taux à long terme (10 ans), qui déterminent les taux des crédits hypothécaires auprès des banques, ont repris leur envol à partir du mois de juin (passant de 3,4 % à 4,45 %), pour stationner à présent aux environs de 4,25 %. La différence n’est pas mince, on en conviendra. Et les banques, logiquement, n’ont pas manqué de revoir leurs taux à la hausse il y a quelques semaines. Si certaines institutions n’ont que fort peu étêté leurs taux officiellement, la marge de man£uvre commerciale laissée aux courtiers et aux agences est devenue bien plus étroite ! En d’autres termes, les institutions financières ne leur laissent plus autant de latitude pour abaisser leurs taux hypothécaires suite à une négociation serrée avec le candidat à l’emprunt. Résultat : alors qu’un taux fixe à 20 ans (quotité de 80 %) de 4,8 % pouvait être dégoté dans l’une ou l’autre institution financière au deuxième trimestre, un taux de 5,20 % apparaît aujourd’hui comme étant le résultat d’une négociation remarquable…

Gare aux pièges

La vigilance doit cependant rester de mise : les bonnes affaires peuvent parfois nourrir des regrets par la suite. Quelques exemples de vers dans le fruit : à la souscription du crédit hypothécaire, le taux exceptionnel arraché au courtier ou à l’agent… ne l’est qu’en raison de la souscription de toute une série de produits annexes, tels que l’assurance de solde restant dû et l’assurance  » incendie « . Or les tarifs de ces deux assurances peuvent varier du simple au double, pour une même couverture !

Comme une baisse des taux apparaît difficilement envisageable à court (et même à moyen) terme, le candidat à l’emprunt se consolera de taux un tantinet supérieurs à ce qu’il aurait pu obtenir il y a quelques mois en se rappelant que les taux restent faibles dans l’absolu !

Si les crédits hypothécaires sont à la fête lorsque les taux font du rase-mottes, d’autres paramètres expliquent leur bonne tenue ces derniers temps. La baisse des droits d’enregistrement en Flandre (et à Bruxelles, depuis cette année) ainsi que la déconfiture des marchés boursiers entre 2000 et 2002 expliquent également un net regain de faveur pour l’investissement immobilier. Mais, comme on le lira en page 67, le marché est devenu très difficile. l

François Mathieu

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