Belmondo en six films
Plus de quatre-vingts films, et une trentaine de pièces de théâtre, en soixante ans de carrière. Le bilan est plus que respectable pour un acteur qui, très vite, put choisir ses projets à peu près sans contrainte, n’étant pas obligé de courir le cachet ni de jouer l’homme pressé. Si beaucoup de ses films cartonnèrent, capitalisant sur un public fidèle et rarement déçu, les chefs-d’oeuvre ne sont pas nombreux. Bébel n’en avait cure, peu soucieux qu’il était de reconnaissance hors du public populaire. Le cinéma de genre (aventures, polar, comédie) tient le haut du pavé dans la filmographie. Ses tout meilleurs films s’y inscrivent, et lui offrent des rôles où son talent trouve à s’exprimer par-delà les clichés. De Godard à de Broca en passant par Melville et Resnais, ils donnent à voir un Belmondo subtil autant que talentueux, inspirant ses réalisateurs et offrant à leur caméra sa personnalité unique.
À bout de souffle (1960)
Belmondo a quelques films derrière lui (dont Les Tricheurs, de Marcel Carné) quand Jean-Luc Godard l’embarque dans son premier long métrage. Il s’y révélera d’extraordinaire façon, incarnant idéalement Michel Poiccard, jeune voyou meurtrier d’un policier et amoureux d’une Américaine aux cheveux courts (Jean Seberg) qui vend des journaux à Paris. Tourné en décors réels et largement improvisé, A bout de souffle est un pastiche inventif et insolent du film noir, renversant toutes les règles et propulsant la Nouvelle Vague vers une explosion internationale.
Le Doulos (1962)
Le ténébreux et très stylé Jean-Pierre Melville avait déjà embarqué Belmondo dans Léon Morin, prêtre, un an avant de l’emmener dans son univers de polar solennel, captivant, épuré. Dans Le Doulos, l’acteur campe Silien, un hors-la-loi qui traîne dans le milieu une sale réputation de « balance », et se retrouve embringué dans un engrenage fatal. Lequel ne laissera, in fine, aucun survivant… Melville va vers la tragédie, trouve le langage qui s’épanouira dans la suite de sa carrière. Belmondo fait une création fascinante, entre mensonge et mort.
Stavisky (1974)
Le « suicide » de Serge Alexandre Stavisky, en 1934, mit brutalement fin à la saga de l’homme d’affaires accusé d’escroquerie et défiant la chronique d’une décennie riche de mille dangers. Belmondo est superbe devant la caméra précise d’un Alain Resnais s’intéressant de près à la psychologie du personnage réel, sans oublier pour autant les résonances politiques de sa trajectoire brutalement interrompue.
L’Homme de Rio (1964)
Une merveille de film d’aventure exotique, et un immense succès bien au-delà des frontières françaises. Philippe de Broca, qui deviendra le réalisateur fétiche de Bébel, l’exporte au Brésil en militaire suivant une jeune femme en danger – la follement spitante et tellement regrettée Françoise Dorléac – sur fond de trafic de trésors archéologiques. L’acteur brille de mille feux dans un film inspiré par Tintin et qui influencera, entre autres, Les Aventuriers de l’arche perdue.
Le Magnifique (1973)
On ne change pas une équipe qui gagne. De Broca et Belmondo se retrouvent pour une comédie d’action aussi frénétiquement agitée que nourrie d’onirisme et de bande dessinée. C’est l’histoire d’un écrivain timide et effacé de romans héroïques, qui voit ses créatures de fiction envahir son quotidien avec des conséquences burlesques. Irrésistible, même un demi-siècle plus tard.
Un singe en hiver (1962)
A 29 ans, Belmondo fait remarquablement face à l’immense Jean Gabin, qui a le double de son âge. La rencontre est mémorable, sous le regard d’un Henri Verneuil soignant sa reconstitution d’un coin de Normandie en juin 1944 puis quinze années plus tard. Michel Audiard est coscénariste et dialoguiste de cette adaptation du roman à succès d’Antoine Blondin, plein d’alcool, de nostalgie et d’illusions perdues.
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